Les différents régimes politiques qui se sont succédé à la tête du Sénégal ont initié différents projets, programmes, stratégies et plans dans plusieurs secteurs dont le dernier en date est le «Plan Sénégal Emergent (Pse)» pour placer le Sénégal sur les rampes de l’émergence ou du développement. Les résultats obtenus ont été plus ou moins satisfaisants. C’est pourquoi, il nous semble important, par le biais de cette modeste réflexion, d’évoquer un volet important de nos établissements humains : les bidonvilles qui, sans un traitement adéquat, risquent de retarder encore l’émergence tant attendue de notre pays.
L’un des phénomènes majeurs observés ces dernières décennies au Sénégal est le «boom» urbain avec une forte concentration de la population dans les agglomérations urbaines consécutive au taux d’accroissement naturel élevé et à l’exode rural. Cette croissance démographique exponentielle, faute d’une politique d’urbanisme adéquate, n’a pas été bien encadrée et contenue en termes de planification spatiale, d’offre en logements sociaux et de parcelles d’habitations viabilisées notamment, pour les néo citadins. Du coup, les marges ou périphéries des centres urbains ont été «squattées», timidement au début, par quelques habitations qui se sont démultipliées à souhait, au fil du temps, pour occuper des superficies importantes. Aujourd’hui, les bidonvilles ou quartiers précaires ou irréguliers n’occupent pas moins de 30% de l’habitat au Sénégal, ce qui équivaut à plus de 8.000 ha d’occupations urbaines irrégulières.
De telles statistiques, effarantes, montrent l’ampleur du phénomène des bidonvilles dans les villes sénégalaises. Rappelons que ces quartiers précaires ont comme identités communes : l’étroitesse des rues, la promiscuité, l’absence ou la faiblesse des réseaux (eau, électricité, téléphone, assainissement, voirie,) et des équipements (scolaires, sanitaires, socio-éducatifs, cultuels, etc.), l’absence de titres de propriété. A la lecture de cet environnement urbain marqué par des déficits de multiples ordres, il est aisé de comprendre qu’aucune initiative de développement durable ne peut prospérer avec l’absence d’un minimum de conditions de vie décentes voire humanisantes dans ces quartiers densément peuplés et s’étalant sur de vastes superficies.
A un certain moment de l’histoire, pour faire disparaître du décor urbain de tels quartiers mal structurés, l’Etat procédait à des déguerpissements forcés ou «politique du bulldozer» pour les rejeter dans la banlieue lointaine (exemples des villes de Pikine et de Guédiawaye). Mais que de drames sociaux vécus et de frustrations accumulées !
Fort heureusement, au milieu des années 1980, avec l’appui de la coopération technique allemande (Gtz), l’Etat, à travers la Direction de l’Urbanisme et de l’Architecture, a entrepris une nouvelle politique «douce» de résorption des bidonvilles dite «Restructuration et régularisation foncière» dont le quartier de «Dalifort» à Pikine a servi de zone pilote, avec des résultats probants obtenus à l’arrivée. Pour consolider cet acquis et assurer sa réplication à travers les nombreux quartiers irréguliers du Sénégal, un décret présidentiel a été pris en 2000 pour créer une fondation reconnue d’utilité publique, la «Fondation Droit à la Ville» afin que ces populations démunies, pour la plupart, et habitant ces quartiers irréguliers puissent avoir véritablement un «droit à la ville» dans des quartiers fonctionnels et bien intégrés au tissu urbain.
Depuis sa création, cette fondation dépendant du ministère en charge de l’Urbanisme a conduit avec succès des opérations de «Restructuration et régularisation foncière» dont, entre autres, les quartiers de Pikine à Saint-Louis, Khouma à Richard-Toll. Présentement, les quartiers de Hann, Petit Mbao, Grand Médine et Arafat/Grand Yoff sont en cours de restructuration urbaine. A terme, les conditions de vie dans ces quartiers vont être sensiblement améliorées : ouverture et élargissement de voies, mise en place de réseaux divers, octroi de titres de propriété (droits de superficie) à chaque propriétaire de maisons.
Cependant, malgré la présence de cette structure et des opérations, actions déjà menées dans ces quartiers, les interventions sont très limitées et minimes par rapport à l’immensité des superficies de bidonvilles à aménager. En effet, cette forme d’urbanisme curatif qui consiste à créer les conditions de développement des quartiers irréguliers par la mise en place des infrastructures de base et des équipements de proximité nécessitent des moyens importants à mettre en place par l’Etat et les Collectivités Locales appuyés en cela par les Partenaires Techniques et Financiers.
Pourtant le pari de l’émergence ou du développement durable sera relevé, difficilement, si les villes, véritables moteurs de croissance, ne sont pas bien aménagées notamment, dans leurs nombreux secteurs mal ou non lotis qui constituent d’énormes nids de nuisances et fléaux urbains.
A cet effet, il est nécessaire de :
·Renforcer la politique de Restructuration et Régularisation Foncière des bidonvilles ;
·Renforcer les moyens (financiers, humains et matériels) de la structure habilitée à mettre en œuvre la politique ;
·Définir et mettre en œuvre un programme national de résorption des bidonvilles ;
·Réactualiser la législation consacrée en la matière ;
·Renforcer le fonds créé pour la restructuration et régularisation foncière ;
·Réserver des zones de recasement dans les pôles urbains et nouveaux lotissements pour faciliter le relogement des populations qui seront déplacées pour les nécessités d’élargissement des emprises de voirie.
·Harmoniser les interventions des différents opérateurs urbains ;
·Etc.
Le phénomène urbain qui gagne davantage de terrain se présente comme un atout, une opportunité et non une faiblesse et contrainte. A cet égard, dans un contexte où l’émergence est tant brandie, chantée, souhaitée, l’habitat irrégulier ne doit plus trouver sa place au sein des communes et villes du Sénégal appelées à être les locomotives de la croissance. L’atteinte de cet objectif peut, certainement, être facilitée par l’expérience sénégalaise en matière de stratégies efficientes de résorption des bidonvilles dont il faudra juste renforcer, accompagner et hisser au rang qui sied à sa dimension et aux attentes de la proportion importante de populations concernées.
Mamadou DIENG
Vision Guediawaye
mdieng14@yahoo.fr
L’un des phénomènes majeurs observés ces dernières décennies au Sénégal est le «boom» urbain avec une forte concentration de la population dans les agglomérations urbaines consécutive au taux d’accroissement naturel élevé et à l’exode rural. Cette croissance démographique exponentielle, faute d’une politique d’urbanisme adéquate, n’a pas été bien encadrée et contenue en termes de planification spatiale, d’offre en logements sociaux et de parcelles d’habitations viabilisées notamment, pour les néo citadins. Du coup, les marges ou périphéries des centres urbains ont été «squattées», timidement au début, par quelques habitations qui se sont démultipliées à souhait, au fil du temps, pour occuper des superficies importantes. Aujourd’hui, les bidonvilles ou quartiers précaires ou irréguliers n’occupent pas moins de 30% de l’habitat au Sénégal, ce qui équivaut à plus de 8.000 ha d’occupations urbaines irrégulières.
De telles statistiques, effarantes, montrent l’ampleur du phénomène des bidonvilles dans les villes sénégalaises. Rappelons que ces quartiers précaires ont comme identités communes : l’étroitesse des rues, la promiscuité, l’absence ou la faiblesse des réseaux (eau, électricité, téléphone, assainissement, voirie,) et des équipements (scolaires, sanitaires, socio-éducatifs, cultuels, etc.), l’absence de titres de propriété. A la lecture de cet environnement urbain marqué par des déficits de multiples ordres, il est aisé de comprendre qu’aucune initiative de développement durable ne peut prospérer avec l’absence d’un minimum de conditions de vie décentes voire humanisantes dans ces quartiers densément peuplés et s’étalant sur de vastes superficies.
A un certain moment de l’histoire, pour faire disparaître du décor urbain de tels quartiers mal structurés, l’Etat procédait à des déguerpissements forcés ou «politique du bulldozer» pour les rejeter dans la banlieue lointaine (exemples des villes de Pikine et de Guédiawaye). Mais que de drames sociaux vécus et de frustrations accumulées !
Fort heureusement, au milieu des années 1980, avec l’appui de la coopération technique allemande (Gtz), l’Etat, à travers la Direction de l’Urbanisme et de l’Architecture, a entrepris une nouvelle politique «douce» de résorption des bidonvilles dite «Restructuration et régularisation foncière» dont le quartier de «Dalifort» à Pikine a servi de zone pilote, avec des résultats probants obtenus à l’arrivée. Pour consolider cet acquis et assurer sa réplication à travers les nombreux quartiers irréguliers du Sénégal, un décret présidentiel a été pris en 2000 pour créer une fondation reconnue d’utilité publique, la «Fondation Droit à la Ville» afin que ces populations démunies, pour la plupart, et habitant ces quartiers irréguliers puissent avoir véritablement un «droit à la ville» dans des quartiers fonctionnels et bien intégrés au tissu urbain.
Depuis sa création, cette fondation dépendant du ministère en charge de l’Urbanisme a conduit avec succès des opérations de «Restructuration et régularisation foncière» dont, entre autres, les quartiers de Pikine à Saint-Louis, Khouma à Richard-Toll. Présentement, les quartiers de Hann, Petit Mbao, Grand Médine et Arafat/Grand Yoff sont en cours de restructuration urbaine. A terme, les conditions de vie dans ces quartiers vont être sensiblement améliorées : ouverture et élargissement de voies, mise en place de réseaux divers, octroi de titres de propriété (droits de superficie) à chaque propriétaire de maisons.
Cependant, malgré la présence de cette structure et des opérations, actions déjà menées dans ces quartiers, les interventions sont très limitées et minimes par rapport à l’immensité des superficies de bidonvilles à aménager. En effet, cette forme d’urbanisme curatif qui consiste à créer les conditions de développement des quartiers irréguliers par la mise en place des infrastructures de base et des équipements de proximité nécessitent des moyens importants à mettre en place par l’Etat et les Collectivités Locales appuyés en cela par les Partenaires Techniques et Financiers.
Pourtant le pari de l’émergence ou du développement durable sera relevé, difficilement, si les villes, véritables moteurs de croissance, ne sont pas bien aménagées notamment, dans leurs nombreux secteurs mal ou non lotis qui constituent d’énormes nids de nuisances et fléaux urbains.
A cet effet, il est nécessaire de :
·Renforcer la politique de Restructuration et Régularisation Foncière des bidonvilles ;
·Renforcer les moyens (financiers, humains et matériels) de la structure habilitée à mettre en œuvre la politique ;
·Définir et mettre en œuvre un programme national de résorption des bidonvilles ;
·Réactualiser la législation consacrée en la matière ;
·Renforcer le fonds créé pour la restructuration et régularisation foncière ;
·Réserver des zones de recasement dans les pôles urbains et nouveaux lotissements pour faciliter le relogement des populations qui seront déplacées pour les nécessités d’élargissement des emprises de voirie.
·Harmoniser les interventions des différents opérateurs urbains ;
·Etc.
Le phénomène urbain qui gagne davantage de terrain se présente comme un atout, une opportunité et non une faiblesse et contrainte. A cet égard, dans un contexte où l’émergence est tant brandie, chantée, souhaitée, l’habitat irrégulier ne doit plus trouver sa place au sein des communes et villes du Sénégal appelées à être les locomotives de la croissance. L’atteinte de cet objectif peut, certainement, être facilitée par l’expérience sénégalaise en matière de stratégies efficientes de résorption des bidonvilles dont il faudra juste renforcer, accompagner et hisser au rang qui sied à sa dimension et aux attentes de la proportion importante de populations concernées.
Mamadou DIENG
Vision Guediawaye
mdieng14@yahoo.fr