Un célèbre adage wolof ne dit-il pas que « Maggum wakhoon naa ko moo gen maggum khamoon naa ko » en français « Nous attendons d'un sage qu'il dise « j'avais prévenu » plutôt de dire que « je savais que ça allait arriver » ?
A l’aune de toute cette violence qui secoue aujourd’hui le parti présidentiel au Sénégal, on est en droit de se demander si ce proverbe, bien de chez nous, ne vient pas malheureusement confirmer l’avertissement que Maître Alioune Badara Cissé, co-fondateur de l’Alliance Pour la République lançait ce soir du 1er novembre 2013 depuis Saint-Etienne en France, à l’intention de monsieur Macky Sall, Président de l’APR.
A l’évidence, il est temps de s’attaquer aux comportements belliqueux de certains responsables de l’APR, quand on sait que c’est ce parti qui a présenté au peuple le candidat devenu le 25 mars 2012, par sa volonté, le quatrième Président de la République du Sénégal. Ces attitudes sont allées très loin au point d’amener « les sénégalais à exprimer leur indignation » pour reprendre Seydou Gueye, porte parole du parti.
Mais n’est ce pas l’APR qui, dès sa naissance le 1er décembre 2008, refusa de se structurer en restant dans un état embryonnaire, à travers sa seule cellule de base, le Comité ?
Ce choix inédit pour une association dans le landerneau politique, n’a cessé d’étonner les observateurs qui se sont toujours demandés ce qu’il en adviendrait au moment de passer à la vitesse supérieure. Ils n’ont arrêté de s’interroger sur la capacité de ses responsables à taire leurs ambitions personnelles devant cette ferme volonté d’affirmation des uns et des autres et face à une massification sauvage.
Plutôt qu’une véritable et courageuse hiérarchisation dès son arrivée au pouvoir, l’Alliance pour la République s’est morfondue dans une léthargie incompréhensible qui amena ABC à sonner le réveil. Malheureusement, le pouvoir a cette capacité extraordinaire de griser ses tenants, au point de les rendre sourds et aveugles devant la plus évidente des réalités. Cet appel de Maître Cissé, on se le rappelle, fut reçu comme un acte de défiance et d’indiscipline par le Secrétariat Exécutif National du parti (SEN) qui prit la malencontreuse décision de le destituer de son poste de Coordonnateur national.
Il a fallu que les superviseurs commencent les premières tournées et réunions d’information pour que tout le monde se rende compte des enjeux que comportait la structuration d’une formation qui, de surcroit, porte le premier des sénégalais. D’ailleurs, tous ces soubresauts ne sont ils pas pour démontrer l’importance du parti au pouvoir dans la patrie ?
Monsieur le Président, un parti au pouvoir doit être à l’image de son Président c'est-à-dire fort. C’est une obligation à laquelle il ne peut se soustraire au risque de plonger le pays dans un chaos coupable. Et pour être fort, l’APR doit traverser cette phase de croissance avec tous ses pionniers pour que l’identité demeure, solide à toute épreuve. C’est l’unique voie de salut. Une commission de discipline pour instruire, juger et condamner les fauteurs de troubles dans les permanences trouvera vite ses limites dans les dispositions du Règlement intérieur du parti et dans la Realpolitik.
Echauffourées, jets de pierres, sabotage de réunions, coups de feu, telles sont les marques les plus visibles d’une violence « inacceptable et impardonnable » selon votre propos. Pire, la pédagogie par l’exemple d’un parti déstructuré, instable et incapable de relever les défis fonctionnels avec aisance et patriotisme aboutit inéluctablement à un mimétisme dont le résultat est aujourd’hui perceptible jusque chez nos concurrents politiques où des scènes similaires sont notées.
Alors Monsieur le Président, n’est il pas l’heure de « retrouver ses marques républicaines» en reconduisant dans ses fonctions celui qui a toujours été l’avocat défenseur de l’APR ? En effet, une Alliance Pour la République sans ce coordonnateur légitime, rassembleur et d’un charisme fort de la trempe de ABC, pourrait difficilement survivre de tous ces enjeux qui se confirment, de toutes ces ambitions qui se télescopent et de toute cette barbarie qui s’installe.
Monsieur le Président, cette solution, toujours à votre portée, requiert dépassement, courage et détermination. En politique, les hyènes et les gros lions, contrairement à ce que disait à Thiès Abdoulaye Wade en cet après-midi du 04 novembre 2009, ne sont point dans la jungle, mais dans les comités directeurs, les directoires et les couloirs de palais. Tant mieux si les faucons comprennent que la récréation est finie et que le maître doit reprendre du service. Sinon, les patriotes de ce pays, qui ont eu un grand espoir en cette Alliance produit d’une injustice notoire devront, malgré eux, déchanter.
Monsieur le Président, Il arrive des moments, dans l’histoire d’un parti, qui ne laissent pas de choix aux femmes et aux hommes de bonne volonté. Alors, l’unique choix, authentique et urgent, est celui d’un engagement vers une redynamisation de l’APR basée sur une réelle réconciliation des cœurs et des esprits, d’abord au sommet, ensuite au service de la patrie.
Mbagnick Diouf
Responsable APR à Saint-Louis
du Sénégal