Si j’avais à définir de manière succincte l’intellectuel, je dirais simplement que c’est celui qui, imbu d’un certain nombre de connaissances théoriques acquises dans les universités et écoles, se pose comme la conscience critique de sa culture et de son époque et ce, aussi bien dans son action que dans sa pensée. On ne peut pas cerner la signification et le statut de l’intellectuel en ne prenant pas en compte ce qui fait son essence même, à savoir, la faculté de la mise en question, la vertu de l’inquisition. Son rôle consiste essentiellement à alerter, à mettre en garde contre les dérives, en un mot à être le vigile toujours sobre du tourbillon qu’est l’histoire de son peuple.
Mais le problème est que dans les mots et dans les actes qui ponctuent la vie d’un homme, et principalement ceux de l’intellectuel, rien n’est fortuit : il y a toujours une signification, qu’elle soit patente ou latente, consciente ou inconsciente. C’est là une raison suffisante pour faire preuve de vigilance et de lucidité devant les dires et l’engagement politique d’un journaliste comme Latif Coulibaly. Au moment où le pays profond est en train de sombrer dans une pauvreté sans précédant et que dans les grandes villes les pénuries se multiplient Latif n’a trouvé rien de meilleur à proposer aux Sénégalais que « les marmites de l’APR ».
Tout le monde n’a pas les ressorts intellectuels pour faire de la sémiologie, mais on peut tenter de rechercher les non-dits derrière les dires d’un homme. Car le langage ne dit pas toujours le vrai et, pire, il a ceci de tout à fait fâcheux qu’il voile tout en dévoilant et parfois entre ce qu’on dit, ce qu’on veut dire et ce qu’on ne veut pas dire, la lisière est brouillée. Schopenhauer, raillant Socrate, a proposé une maxime énigmatique « Ne parle pas pour que je te voie », suggérant par là la fonction dissimulatrice du langage.
L’homme est, en effet, profondément investi de cette magie du verbe qui agit par envoûtement : il est versatile et sait bien cacher ses intentions en parlant. La plupart des hommes, en effet, parlent pour cacher des choses ou pour en suggérer d’autres se situant dans une perspective très éloignée du champ à partir duquel ils énoncent leurs propositions. Il faut, nous semble-t-il, pour ne pas toujours se contenter de la signification première et apparente des actes et des discours d’un homme, essayer de les situer dans le contexte de leur commission et de leur émission. Latif est le prototype du journalisme opportuniste qui voit dans la démocratie un moyen de se « hisser au-dessus » des autres en faisant des citoyens un troupeau de fanatisés.
Prototype d’abord, car il incarne le mythe de la perspicacité du journaliste d’opinion qui n’est en réalité qu’un vulgaire instrument du jeu de dupes des politiciens qui lui filent des bribes d’information pour nuire à leurs adversaires.
Prototype ensuite, car le nombre de jeunes journalistes que Latif a formés et qui l’ont quasiment mythifié est non négligeable. Il a, inconsciemment ou inconsciemment instillé dans leur esprit une perception étroite de la réalité politique de notre pays.
La suggestion et l’exemple sont les plus puissants vecteurs de propagande (quelle soit positive ou négative). Latif nous a inondés de textes et de livres pamphlets ou diatribes contre les régimes de Diouf et de Wade, mais aujourd’hui, il joue le même rôle qu’il reprochait aux partisans et courtisans de ces derniers.
Qu’est ce qui a alors changé ? Les choses ou l’homme ? Comment Latif, un défenseur acharné de la bonne gouvernance, peut-il accepter de siéger dans un gouvernement où il joue juste le rôle de GARNITURE démocratique ? Comment Latif peut-il pousser le reniement jusqu’à légitimer les marchés de gré à gré, l’interdiction systématique des marches et les décrets d’avance et à délégitimer les grèves des enseignants ?
On sait que la politique est « une mare où grognent des cochons ». Sous ce rapport, la politique est une affaire répugnante et on comprend dés lors pourquoi beaucoup hésitent à y plonger directement et préfèrent passer par des raccourcis comme le « cannibalisme intellectuel et moral ». Malheureusement elle reste un champ fertile à la récolte de fruits « paradisiaques », un moyen de vivre et même de bien vivre. Et pour cette raison la parade de certains intellectuels actuels est simple : il s’agit de boire dans la marre des cochons à leur insu et en toute discrétion.
Alassane K. KITANE
Professeur au Lycée Serigne Ahmadou Ndack Seck de Thiès
Mais le problème est que dans les mots et dans les actes qui ponctuent la vie d’un homme, et principalement ceux de l’intellectuel, rien n’est fortuit : il y a toujours une signification, qu’elle soit patente ou latente, consciente ou inconsciente. C’est là une raison suffisante pour faire preuve de vigilance et de lucidité devant les dires et l’engagement politique d’un journaliste comme Latif Coulibaly. Au moment où le pays profond est en train de sombrer dans une pauvreté sans précédant et que dans les grandes villes les pénuries se multiplient Latif n’a trouvé rien de meilleur à proposer aux Sénégalais que « les marmites de l’APR ».
Tout le monde n’a pas les ressorts intellectuels pour faire de la sémiologie, mais on peut tenter de rechercher les non-dits derrière les dires d’un homme. Car le langage ne dit pas toujours le vrai et, pire, il a ceci de tout à fait fâcheux qu’il voile tout en dévoilant et parfois entre ce qu’on dit, ce qu’on veut dire et ce qu’on ne veut pas dire, la lisière est brouillée. Schopenhauer, raillant Socrate, a proposé une maxime énigmatique « Ne parle pas pour que je te voie », suggérant par là la fonction dissimulatrice du langage.
L’homme est, en effet, profondément investi de cette magie du verbe qui agit par envoûtement : il est versatile et sait bien cacher ses intentions en parlant. La plupart des hommes, en effet, parlent pour cacher des choses ou pour en suggérer d’autres se situant dans une perspective très éloignée du champ à partir duquel ils énoncent leurs propositions. Il faut, nous semble-t-il, pour ne pas toujours se contenter de la signification première et apparente des actes et des discours d’un homme, essayer de les situer dans le contexte de leur commission et de leur émission. Latif est le prototype du journalisme opportuniste qui voit dans la démocratie un moyen de se « hisser au-dessus » des autres en faisant des citoyens un troupeau de fanatisés.
Prototype d’abord, car il incarne le mythe de la perspicacité du journaliste d’opinion qui n’est en réalité qu’un vulgaire instrument du jeu de dupes des politiciens qui lui filent des bribes d’information pour nuire à leurs adversaires.
Prototype ensuite, car le nombre de jeunes journalistes que Latif a formés et qui l’ont quasiment mythifié est non négligeable. Il a, inconsciemment ou inconsciemment instillé dans leur esprit une perception étroite de la réalité politique de notre pays.
La suggestion et l’exemple sont les plus puissants vecteurs de propagande (quelle soit positive ou négative). Latif nous a inondés de textes et de livres pamphlets ou diatribes contre les régimes de Diouf et de Wade, mais aujourd’hui, il joue le même rôle qu’il reprochait aux partisans et courtisans de ces derniers.
Qu’est ce qui a alors changé ? Les choses ou l’homme ? Comment Latif, un défenseur acharné de la bonne gouvernance, peut-il accepter de siéger dans un gouvernement où il joue juste le rôle de GARNITURE démocratique ? Comment Latif peut-il pousser le reniement jusqu’à légitimer les marchés de gré à gré, l’interdiction systématique des marches et les décrets d’avance et à délégitimer les grèves des enseignants ?
On sait que la politique est « une mare où grognent des cochons ». Sous ce rapport, la politique est une affaire répugnante et on comprend dés lors pourquoi beaucoup hésitent à y plonger directement et préfèrent passer par des raccourcis comme le « cannibalisme intellectuel et moral ». Malheureusement elle reste un champ fertile à la récolte de fruits « paradisiaques », un moyen de vivre et même de bien vivre. Et pour cette raison la parade de certains intellectuels actuels est simple : il s’agit de boire dans la marre des cochons à leur insu et en toute discrétion.
Alassane K. KITANE
Professeur au Lycée Serigne Ahmadou Ndack Seck de Thiès