Quels sont les facteurs explicatifs ou raisons principales de cette victoire ?
La défaite de l’opposition était-elle évitable ?
Ce sont autant de questions qui taraudent notre esprit et auxquelles nous allons apporter des réponses objectives, empiriques (basées sur des faits).
En effet, au delà de l’achat de conscience, de la lettre n° 66 en date du 24 février 2019 permettant aux détenteurs de cartes d’électeurs mais n’ayant pas retrouvé leur nom sur la liste d’émargement de voter dans le dernier bureau et du nombre excessif et incontrôlable de votants hors bureau, les raisons les plus saillantes de la défaite de l’opposition sont : le processus électoral biaisé, la passivité de l‘opposition et le boycott improductif et préjudiciable de Maître WADE.
Par ailleurs, il faut saluer la maturité du peuple sénégalais qui est sorti en masse pour exprimer son choix avec un taux de participation de 66% malgré la rétention de certaines cartes d’électeurs et l’inscription « ne peut pas voter » sur d’autres.
1) Le processus électoral biaisé
L’élection est matérialisée par le vote c'est-à-dire l’introduction d’un bulletin dans une urne pour exprimer un choix, de continuité ou de rupture.
Cependant, ceci n’est que la partie visible de l’iceberg car l’élection est tout un processus qui commence avec le choix d’une date, l’ouverture des candidatures, l’inscription des électeurs, la délivrance des cartes d’identité et /ou d’électeur, la carte électorale, le fichier électoral…
Toutes ces étapes, à part le maintien de la date préalablement fixée, ont soulevé des doutes, des désaccords et des craintes de l’opposition.
Le fichier électoral a été entouré d’une certaine nébuleuse quant à la carte électorale, elle a été modifiée unilatéralement sans même demander l’avis de la Commission électorale nationale autonome (CENA).
Cette CENA qui ne marche pas sur les pas de l’ancien Observatoire national des élections (ONEL), a brillé par son manque de communication au niveau de toutes les étapes du processus.
La deuxième raison est relative à la passivité de l’opposition.
2) La passivité de l’opposition
Cette passivité de l’opposition peut être mesurée à deux niveaux : la loi sur le parrainage et l’organisation de l’élection présidentielle par un Ministre de l’Intérieur partisan.
2-1 : La loi sur le parrainage
La loi n° 2018- 22 du 04 juillet 2018 portant modification du Code électoral a institué le parrainage pour l’élection présidentielle au Sénégal.
Ce système de parrainage a pris de cours toute l’opposition qui a été mise devant le fait accompli. C’est l’une des raisons principales de cette défaite de l’opposition qui n’a pas su s’unir pour combattre les dérives du parti au pouvoir et se mettre d’accord sur les fondamentaux.
Cette passivité de l’opposition qui n’a pas été réactive, se réunissant dans les salons et animant des conférences de presse à tout-va, a grandement contribué à sa défaite.
Elle devait exiger son accord pour toute modification du Code électoral consensuel de 1992 qui a jeté les bases d’un renforcement de la démocratie sénégalaise et a permis plusieurs alternances au Sénégal.
Il y a certains combats en matière préélectorale ou politique qu’on doit mener en amont et non en aval quand tout est ficelé, calculé. Cette opposition n’a qu’à s’en vouloir qu’à elle-même car le peuple a exprimé son désir de changement mais les dés étaient déjà pipés, le sort déjà scellé.
C’est un énorme gâchis car toutes les conditions étaient réunies pour que le changement de système préconisé par le candidat SONKO intervienne.
2-2 : L’organisation de l’élection par un Ministre de l’Intérieur partisan
C’est la pièce maitresse du puzzle, le facteur explicatif le plus pertinent de la défaite de l’opposition.
Une certaine tradition républicaine depuis 2000, basée sur l’élégance et la courtoisie démocratique voudrait que l’élection présidentielle au Sénégal soit organisée par une personnalité neutre, consensuelle.
Ce pacte non inscrit (malheureusement dans la Constitution ou le Code électoral ) a été rompu par le régime du Président Macky SALL malgré son opposition ferme à l’organisation de l’élection présidentielle de 2012 par Maître Ousmane NGOM, ancien Ministre de l’Intérieur sous WADE.
Sa détermination a été payante, tout le contraire de l’opposition sénégalaise qui a brillé par sa passivité, son verbiage inutile, son manque d’unité manifeste, son culte des égos (chacun se croyant le Messie, le Meilleur, l’Indispensable).
La dernière raison explicative de cette défaite est relative à la position de boycott adoptée par Maître WADE.
3) Le boycott improductif et préjudiciable WADIEN
Sa venue et son accueil triomphal ont surement fait trembler le pouvoir car , qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, Maître WADE demeure un génie politique plein de charisme, d’éloquence, de courage.
Cependant, malgré son âge la sagesse lui a fait défaut lors de cette joute électorale. En effet, en proposant le boycott ,qui n’a pas du reste été suivi avec ce taux de participation, il a volontairement ou involontairement servi les intérêts du parti au pouvoir avec la dispersion des voix. S’il avait soutenu de façon nette et claire un candidat de l’opposition, en l’occurrence Idy ou Sonko, ce dernier pourrait faire le plein de voix et on pourrait présager un second tour avec les scores des autres candidats.
Le non-suivi de son mot d’ordre de boycott a vraisemblablement signé sa mort politique qui coïncide avec la naissance d’un phénomène, d’une réalité incontournable dans l’échiquier politique sénégalais : Ousmane SONKO.
Son immixtion dans le champ politique est salutaire pour la démocratie sénégalaise car il y amène sa fougue de jeunesse, son courage, sa vision basée sur le patriotisme, l’indépendance économique, le culte des valeurs et la gouvernance vertueuse.
L’opposition sénégalaise a intérêt à lui donner la place qu’il mérite, de par l’expression des suffrages lors de cette élection présidentielle, pour un Sénégal plus juste et plus prospère.
Lepatriotesaintlouisien@gmail.com