Madicke Niang, nous a parlé de l’instrumentalisation de la justice durant le septennat du président Sall. Il est important de noter que Madicke Niang était ministre d'État, Garde des Sceaux, ministre de la Justice de 2007 à 2009 sous le président Wade. Il n’y a pas eu autant de morts et d’injustice que durant les mandats du président Wade. Des mesures n’ont pas été prises pour éradiquer l’instrumentalisation de la justice. Bien au contraire, il fallait toujours plaire au président Wade si on voulait rester dans le gouvernement. Nous ne pourrons pas juger comment il sera en mesure de ne pas instrumentaliser la justice tout en sachant qu’il a été celui qui l’a facilité au président Wade. Il nous parle ensuite de mal gouvernance. La mauvaise gouvernance a toujours été présente depuis notre indépendance. Si le président Diouf nous disait que ce qu’il voyait dans l’administration le choquait, cela montrait de la gravité. Il n’y a pas eu de rupture sous le président Wade, au contraire, cela a empiré même. Il y a eu le scandale où on disait que des membres directs de sa famille avaient « dérobé » une large somme d’argent sans suivi. Cela nous montre que la justice au Sénégal est une justice de deux poids deux mesures. Il parle ensuite du secteur privé qui est à terre, des 500 000 nouveaux pauvres sous Macky Sall et du non-paiement des bourses qui a causé la mort d’homme. Il ne faut pas oublier que nous ne pouvons pas dissocier le président Wade du candidat Madicke Niang. Sous le régime Wade, il y a eu autant de turbulences que sous le président Sall. Les étudiants étaient en grève le 31 janvier 2001 pour non-paiement des bourses et il y a eu mort d’un étudiant par balle réelle. Les professeurs étaient en grève, les élèves-policiers aussi pour non-paiement de salaire depuis 11 mois. Pendant que l’aide financière tardait à venir, il y avait des tensions budgétaires au sein de l’Etat. Certes, Madicke Niang est Madicke Niang et non le président Wade, mais les dissocier sera chose quasi-impossible, car sa candidature selon moi est une candidature calculée et choisie. Il a été utilisé pour un but précis autre que de devenir président. Wait and see !
El Hadj Sall, aussi connu sous El Hadj Issa Sall, nous parle d’une formation religieuse. Nous ne sommes pas un pays « religieux », donc il faut que nous fassions un choix. Si nous décidons de continuer dans cette lancée, il faut noter que la liberté de religion et le principe d'égalité jouent un rôle très important dans un État. Il veut rendre impératifs l’anglais et l’informatique depuis la maternelle. Une très belle initiative que nous devrions adopter depuis longtemps pour plus s’ouvrir au monde. Cette initiative aidera le Sénégal à attirer plus d’entreprises étrangères avec une main d’œuvre très qualifiée. Il veut un gouvernement avec 20 ministres, le président Sall avait annoncé un gouvernement avec 25 ministres, il en est à plus de 85 ministres. Cela devrait être une possibilité, cependant, on dirait que c’est une promesse que les Sénégalais ont arrêté de croire. Il parle aussi de patriotisme fiscal, il est impossible dans un pays pauvre, de faire de telle sorte que les citoyens s’acquittent de ce droit. Il faut être réaliste dans les programmes aussi, car nous savons que pour reformer ce pays, cela demandera des années de sacrifices. Real outsider!
Idrissa Seck n’a pas accepté de parler de « sa propre bouche », il a plutôt préféré raconter ce qu’il a pu recueillir de sa longue marche qui a duré quatre ans. Il nous dit que les citoyens qu’il a rencontrés parlent tous de la bonne gouvernance comme priorité. Idrissa Seck était très bien parti pour devenir le prochain président du Sénégal, mais hélas, la tache noire que le président Wade a causée dans sa carrière l’a beaucoup hanté malgré le non-lieu. En quelque sorte, celui qui l’a créé politiquement l’a tué politiquement. Il est en train de rebondir, car ayant une coalition forte autour de lui, il peut vraiment faire la surprise durant ces élections. Il est très connu pour son pragmatisme, imitant un peu les anglophones dans sa manière de faire. Le Sénégal a besoin de ce pragmatisme pour tendre vers l’émergence. Nous avons trop hérité du système « français » qui est un système relativement lent. 360-degree!
Ousmane Sonko a fait son allocution en Wolof, la langue la plus parlée au Sénégal qui est un signe de patriotisme, de quelqu’un qui croit en son pays et aux valeurs de son pays. Il veut éradiquer le secteur informel, nous allons attendre de voir comment il va expliquer son programme pour plus nous prononcer là-dessus. Ce qu’il faut déjà noter, c’est que le secteur informel est juste un symptôme de la maladie, soigner ce symptôme ne guérira pas le Sénégal de son mal. Le mal se trouve dans la pauvreté, le taux de chômage et les revenus faibles. Il faut soigner ce mal et tous les symptômes disparaîtront. Il nous parle aussi du secteur privé national qui est presque inexistant, cependant cela dérive aussi de la maladie de notre système. Un pays qui a une mauvaise fondation ne peut se permettre d’élever sur telle fondation. Il est essentiel de casser le fondement et le reconstruire ou d’arrêter d’élever pour renforcer la fondation avant de continuer l’élévation. Quand il promet de réduire l’impôt sur les sociétés, je ne suis pas sur quel électorat, est-il en train de séduire, mais ce n’est pas une bonne chose pour l’économie du Sénégal. Nous avons besoin de tout impôt que nous puissions avoir, car nous sommes un pays « fiscal ». Il faut une segmentation de l’électorat dans son discours pour conquérir le cœur des indécis. Son discours a été cohérent dans l’ensemble avec un excès de confiance qu’il faut un peu réduire pour mieux conquérir le cœur des adultes qui sont indécis. New blood!
Le président sortant est le président qui a été le plus à l’aise devant le grand écran, car la télévision nationale est son fief. Il a commencé son discours en parlant des guides religieux, car il sait que pour se faire réélire, c’est presque impératif qu’il gagne la région de Diourbel ou au moins deux départements de cette région. Certes, il avait commis l’erreur de qualifier les marabouts de simples citoyens, mais il faut admettre qu’il s’est racheté de la manière dont il les a traités. Il a compris que ces marabouts font partie du système du Sénégal depuis bien avant l’indépendance. Nous devons notre stabilité à Dieu et aux guides religieux. Je pense que durant sa longue marche avant 2012, Macky Sall a vu la pauvreté endémique qui était réelle au Sénégal, mais depuis qu’il est au palais présidentiel, il a dû oublier cette pauvreté, car il vit dans le luxe. Il parle de l’amélioration des conditions de vie, de l’injustice et des inégalités sociales. Certes, il y a eu des programmes pour aider les couches les plus démunies, mais nous devons regarder plus loin que le bout de notre nez. S’endetter pour aider en cas d’urgence est acceptable, mais d’en faire une politique de développement, c’est se préparer à un défaut de paiement. Nous pensons qu’il faut aider les couches les plus démunies, mais qu’est ce qui est en train d’être fait pour arrêter ces subventions et faire de ces citoyens des acteurs de développement ? Comme bon politicien, il a promis la construction d’une université et d’un aéroport. Je me demande si nous sommes dans une République ou un Royaume. Il y a des décisions qu’on ne doit point prendre à la légère, car nous sommes un pays pauvre et très endetté. Vouloir faire plaisir l’électorat, oui, mais à quel prix ? Les inégalités sociales sont toujours présentes et elles ne disparaîtront pas à l’horizon 2035, car le Sénégal ne s’est pas encore lancé dans une politique de développement sérieuse et concrète. La perception de l’instrumentalisation de la justice est réelle au Sénégal et le président doit changer cette perception. Si la population a cette perception, c’est par rapport aux malfaiteurs qui ont détourné les deniers publics et qui sont ensuite allés dans le camp présidentiel pour éviter d’éventuelles poursuites. Le président a utilisé cette arme pour accueillir tous ceux qui pouvaient le « fatiguer » dans sa marche vers un second mandat. Il est temps que le président donne sa parole durant cette campagne de ne plus présider le conseil de magistrature supérieur ainsi que son ministre de la Justice, même si ce dernier nous dit que le président n’y est qu’à titre symbolique. Puisque le président ne prend aucune décision comme le dit son ministre de la Justice et qu’il y a une perception de l’instrumentalisation de la justice, n’est-il pas mieux qu’il ne préside plus ? Il a aussi parlé de la seconde phase du PSE. Je l’ai déjà dit et je vais le répéter, la première phase du PSE est inachevée, donc comment peut-on entamer la seconde phase ? Les infrastructures ne sont pas en place pour accueillir le secteur privé donc le PSE est encore en retard de 5 ans et sa date de l’émergence va être poussée de 5 ans pour l’amener à 2040. Bref, le PSE n’est pas une vision économique, mais un plan qui a été mis en place pour allier politique de développement et politique politicienne. Pure politician!
Depuis l’indépendance, la manière de gérer le Sénégal n’a pas changé. Chaque président élu met en place des programmes similaires aux programmes existant en changeant l’appellation ainsi qu’un ou deux critères pour se l’approprier. Il n’y a pas de politiques conjoncturelles en place pour stimuler l’économie. Nous parlons toujours d’autosuffisance alimentaire, de pauvreté, de chômage, de santé, de la cherté de la vie, en quelque sorte de l’indice de développement humain. Il est temps d’être sérieux et de développer notre nation en diversifiant notre économie, en améliorant le climat des affaires, en se dotant d’une ressource humaine qualifiée. Il faut aussi développer le Sénégal d’une manière harmonieuse en coordonnant tous les leviers économiques et surtout arrêter de subventionner les entreprises publiques en faillite. Avant d’être condamné à vie, Nelson Mandela a dit ses mots : « Au cours de ma vie, je me suis entièrement consacré à la lutte du peuple africain. J'ai lutté contre la domination blanche et j'ai lutté contre la domination noire. Mon idéal le plus cher a été celui d'une société libre et démocratique dans laquelle tous vivraient en harmonie et avec des chances égales. J'espère vivre assez pour l'atteindre. Mais si cela est nécessaire, c'est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir. »
Mohamed Dia,
Consultant bancaire