Contribution-Affaire Aida Ndiongue : l’intervention du procureur la république sème la confusion
iGFM (Dakar) Au cours de sa conférence de presse, le procureur de la république, Bassirou Gueye, a jeté en pâture Madame Aida Ndiongue, ex sénatrice libérale en détaillant les éléments de l’enquête alors que l’affaire est en instruction. Aussi a-t-il créé une énorme confusion dans l’esprit de beaucoup de Sénégalais en mettant en cause la présomption d’innocence dont aurait pu bénéficier la prévenue . Il y’a là véritablement une atteinte grave à la dignité de Aida Ndiongue et une violation flagrante de ses droits.
On peut penser valablement que l’objectif visé par le Procureur de la république en annonçant des montants faramineux « détournés » est de légitimer aux yeux de l’opinion publique la poursuite de la traque des biens mal acquis ; celle-ci étant ralentie depuis quelques mois par la désapprobation générale des manières utilisées par Mimi Touré ex ministre de la justice devenue premier ministre et par le dossier cocasse de Karim Wade qui n’avance pas.
En effet, le procureur de la république a publié des informations revêtues du sceau « secret – instruction ». En plus , il n’a pas explicité la nature de la somme colossale qu’il dit avoir trouvée dans les banques et appartenant à Aida Ndiongue . Son intervention a laissé croire que les 31 ,5 milliards de francs Cfa « trouvés » sont réellement dans les comptes bancaires de Aida Ndiongue c’est-à-dire inscrits sur les livres de la CBAO et des autres institutions financières concernées par cette affaire .Or les montants annoncés représenteraient la somme des marchés obtenus par Aida Ndiongue au cours de la période visée. Pourtant les marchés en question ont fait l’objet de passation régulière et ont été validés par le Premier ministre d’alors devenu Président de la République a souligné à juste titre récemment l’ex ministre libéral Oumar Sarr . C’est ainsi que les 23 milliards de francs Cfa que le procureur de la République dit avoir trouvé le 07 janvier 2014 seraient le montant total de 6 marchés et non de l’argent trouvé dans les caisses des banques.
De même, le procureur de la république dit avoir trouvé des bijoux en or et en diamant d’une valeur de plus de 15 milliards de francs Cfa mais il n’a pas révélé à l’opinion publique comment ces bijoux ont été évalués et qui est l’expert agréé qui a été réquisitionné par ses propres services pour procéder à leur évaluation et en certifier leur valeur exacte ?
En tout état de cause, Aida Ndiongue a été vilipendée et dénigrée par le procureur de la république qui a affirmé publiquement devant les caméras du monde que la richesse de l’ex Sénatrice pourrait être « dépensée, brûlée » à raison de 1,3 millions de francs cfa par une personne pendant 100 ans.
Il est regrettable de constater que c’est la même méthode qui a été utilisée par le procureur spécial Alioune Ndao dans l’affaire Karim Wade qui revient : le montant de 697 milliards incriminés lors de la première inculpation de l’ancien ministre libéral et fils de l’ex Président ne reflète pas la situation exacte de ses comptes bancaires à l’époque. Il représente plutôt le montant correspondant à l’estimation du patrimoine fictif (DPW, BMCE, SHS ….) qui lui a été attribué injustement et exhibé à travers les medias par le Procureur spécial. Cela a été suffisant pour jeter le discrédit sur Karim et brouiller l’opinion nationale et internationale pendant très longtemps.
L’autre confusion grave est l’intrusion du procureur de la république, chargé de l’enquête préliminaire, dans l’instruction du dossier. Or l’instruction des affaires pénales relève exclusivement du juge d’instruction . Il y’ a eu non seulement violation du secret de l’instruction par le procureur de la république qui a révélé à l’opinion « des éléments nouveaux du dossier » mais un télescopage inadmissible entre celui-ci et le juge d’instruction dans le champ de l’instruction.
Cette situation s’est déjà produite dans la gestion des dossiers de la traque des dignitaires de l’ancien régime notamment dans le dossier de Karim Wade où le procureur spécial Alioune Ndao a « repris » celui-ci pour lui infliger arbitrairement une seconde mise en demeure suivie d’une autre inculpation après 6 mois de détention et de blocage pour absence de preuve alors que l’affaire est toujours en instruction dans la commission provisoire .
Aida Ndiongue a été aussi déférée par la gendarmerie à la suite de l’information ouverte par le procureur de la République puis inculpée par le juge . Or cela n’a pas empêché le procureur de la république de revenir à la charge plusieurs semaines après, à la suite de « nouvelles investigations » avec de nouvelles révélations en vue de préparer le juge et l’opinion à une nouvelle inculpation pour la même affaire.
Pourtant le juge d’instruction comme le juge de la commission d’instruction « peut procéder à des interrogatoires et à des auditions, délivrer des commissions rogatoires ou des délégations judiciaires et décerner tout mandant nécessaire à l’accomplissement de sa mission et à la manifestation de la vérité ». Pourquoi donc, à ce stade de l’instruction, le procureur de la république ou le procureur spécial se remet-il à enquêter à nouveau et à empiéter sur les prérogatives du juge d’instruction ou du juge de la commission provisoire ?
Que servent alors les cabinets d’instruction et les chambres ou commission d’instruction si le procureur de la république ou le procureur spécial peut à tout moment s’emparer d’un dossier en instruction et faire le travail à la place des juges sans que personne ne bronche ?
Pourquoi lorsque le Procureur de la république ou le procureur spécial détient des informations supplémentaires pour une affaire en instruction, il ne les transmet pas à la chambre d’instruction compétente mais préfère commencer une nouvelle enquête pour obtenir une nouvelle inculpation ?
Est ce qu’il y’a délimitation des compétences du parquet général voire du parquet spécial et celles des chambres d’instruction ?
Dans le cas de Karim comme dans celui de Aida Ndiongue il y’a eu visiblement confusion des rôles entre le procureur de la république (le procureur spécial) et le juge d’instruction (la commission d’instruction) et concomitamment un télescopage entre les deux . En effet, après avoir terminé son enquête, déféré le prévenu qui est inculpé par le juge et mis en détention pendant plusieurs semaines, le procureur de la république est revenu à la charge en vue de décrocher une seconde inculpation. De tels agissements sont assimilés par l’opinion comme un harcèlement politico-judiciaire et un dérapage judicaire jamais observé au Sénégal .
Force est de constater que dans la traque des dignitaires de l’ancien régime en cours, les pouvoirs du Procureur de la république et du procureur spécial sont devenus exorbitants par rapport à ceux du juge d’instruction et du juge de la commission d’instruction. C’est comme si le pouvoir politique exerçait une pression énorme sur le parquet et définissait la marche des procédures judiciaires concernant les hommes politiques.
En tout état de cause, la double inculpation apparue récemment dans les procédures judiciaires et la liberté provisoire octroyée à certains prévenus par les juges d’instruction et refusées par le parquet prouveraient au besoin que les juges résistent encore à la pression politique.
C’est pourquoi , je dénonce de toutes mes forces le harcèlement politico-judiciaire exercé à l’endroit de mes frères du Parti Démocratique Sénégalais (PDS) restés fidèles à son Secrétaire général national Me Abdoulaye Wade et toutes les dérives notées dans les procédures judiciaires en cours.
Enfin, j ’invite les magistrats et les juristes au nom de l’intérêt supérieur de la nation et de la bonne marche de la justice à nous édifier sur la conformité avec le droit des procédures judicaires engagées dans le cadre de la traque des dignitaires de l’ancien régime .
Farba Senghor
iGFM (Dakar) Au cours de sa conférence de presse, le procureur de la république, Bassirou Gueye, a jeté en pâture Madame Aida Ndiongue, ex sénatrice libérale en détaillant les éléments de l’enquête alors que l’affaire est en instruction. Aussi a-t-il créé une énorme confusion dans l’esprit de beaucoup de Sénégalais en mettant en cause la présomption d’innocence dont aurait pu bénéficier la prévenue . Il y’a là véritablement une atteinte grave à la dignité de Aida Ndiongue et une violation flagrante de ses droits.
On peut penser valablement que l’objectif visé par le Procureur de la république en annonçant des montants faramineux « détournés » est de légitimer aux yeux de l’opinion publique la poursuite de la traque des biens mal acquis ; celle-ci étant ralentie depuis quelques mois par la désapprobation générale des manières utilisées par Mimi Touré ex ministre de la justice devenue premier ministre et par le dossier cocasse de Karim Wade qui n’avance pas.
En effet, le procureur de la république a publié des informations revêtues du sceau « secret – instruction ». En plus , il n’a pas explicité la nature de la somme colossale qu’il dit avoir trouvée dans les banques et appartenant à Aida Ndiongue . Son intervention a laissé croire que les 31 ,5 milliards de francs Cfa « trouvés » sont réellement dans les comptes bancaires de Aida Ndiongue c’est-à-dire inscrits sur les livres de la CBAO et des autres institutions financières concernées par cette affaire .Or les montants annoncés représenteraient la somme des marchés obtenus par Aida Ndiongue au cours de la période visée. Pourtant les marchés en question ont fait l’objet de passation régulière et ont été validés par le Premier ministre d’alors devenu Président de la République a souligné à juste titre récemment l’ex ministre libéral Oumar Sarr . C’est ainsi que les 23 milliards de francs Cfa que le procureur de la République dit avoir trouvé le 07 janvier 2014 seraient le montant total de 6 marchés et non de l’argent trouvé dans les caisses des banques.
De même, le procureur de la république dit avoir trouvé des bijoux en or et en diamant d’une valeur de plus de 15 milliards de francs Cfa mais il n’a pas révélé à l’opinion publique comment ces bijoux ont été évalués et qui est l’expert agréé qui a été réquisitionné par ses propres services pour procéder à leur évaluation et en certifier leur valeur exacte ?
En tout état de cause, Aida Ndiongue a été vilipendée et dénigrée par le procureur de la république qui a affirmé publiquement devant les caméras du monde que la richesse de l’ex Sénatrice pourrait être « dépensée, brûlée » à raison de 1,3 millions de francs cfa par une personne pendant 100 ans.
Il est regrettable de constater que c’est la même méthode qui a été utilisée par le procureur spécial Alioune Ndao dans l’affaire Karim Wade qui revient : le montant de 697 milliards incriminés lors de la première inculpation de l’ancien ministre libéral et fils de l’ex Président ne reflète pas la situation exacte de ses comptes bancaires à l’époque. Il représente plutôt le montant correspondant à l’estimation du patrimoine fictif (DPW, BMCE, SHS ….) qui lui a été attribué injustement et exhibé à travers les medias par le Procureur spécial. Cela a été suffisant pour jeter le discrédit sur Karim et brouiller l’opinion nationale et internationale pendant très longtemps.
L’autre confusion grave est l’intrusion du procureur de la république, chargé de l’enquête préliminaire, dans l’instruction du dossier. Or l’instruction des affaires pénales relève exclusivement du juge d’instruction . Il y’ a eu non seulement violation du secret de l’instruction par le procureur de la république qui a révélé à l’opinion « des éléments nouveaux du dossier » mais un télescopage inadmissible entre celui-ci et le juge d’instruction dans le champ de l’instruction.
Cette situation s’est déjà produite dans la gestion des dossiers de la traque des dignitaires de l’ancien régime notamment dans le dossier de Karim Wade où le procureur spécial Alioune Ndao a « repris » celui-ci pour lui infliger arbitrairement une seconde mise en demeure suivie d’une autre inculpation après 6 mois de détention et de blocage pour absence de preuve alors que l’affaire est toujours en instruction dans la commission provisoire .
Aida Ndiongue a été aussi déférée par la gendarmerie à la suite de l’information ouverte par le procureur de la République puis inculpée par le juge . Or cela n’a pas empêché le procureur de la république de revenir à la charge plusieurs semaines après, à la suite de « nouvelles investigations » avec de nouvelles révélations en vue de préparer le juge et l’opinion à une nouvelle inculpation pour la même affaire.
Pourtant le juge d’instruction comme le juge de la commission d’instruction « peut procéder à des interrogatoires et à des auditions, délivrer des commissions rogatoires ou des délégations judiciaires et décerner tout mandant nécessaire à l’accomplissement de sa mission et à la manifestation de la vérité ». Pourquoi donc, à ce stade de l’instruction, le procureur de la république ou le procureur spécial se remet-il à enquêter à nouveau et à empiéter sur les prérogatives du juge d’instruction ou du juge de la commission provisoire ?
Que servent alors les cabinets d’instruction et les chambres ou commission d’instruction si le procureur de la république ou le procureur spécial peut à tout moment s’emparer d’un dossier en instruction et faire le travail à la place des juges sans que personne ne bronche ?
Pourquoi lorsque le Procureur de la république ou le procureur spécial détient des informations supplémentaires pour une affaire en instruction, il ne les transmet pas à la chambre d’instruction compétente mais préfère commencer une nouvelle enquête pour obtenir une nouvelle inculpation ?
Est ce qu’il y’a délimitation des compétences du parquet général voire du parquet spécial et celles des chambres d’instruction ?
Dans le cas de Karim comme dans celui de Aida Ndiongue il y’a eu visiblement confusion des rôles entre le procureur de la république (le procureur spécial) et le juge d’instruction (la commission d’instruction) et concomitamment un télescopage entre les deux . En effet, après avoir terminé son enquête, déféré le prévenu qui est inculpé par le juge et mis en détention pendant plusieurs semaines, le procureur de la république est revenu à la charge en vue de décrocher une seconde inculpation. De tels agissements sont assimilés par l’opinion comme un harcèlement politico-judiciaire et un dérapage judicaire jamais observé au Sénégal .
Force est de constater que dans la traque des dignitaires de l’ancien régime en cours, les pouvoirs du Procureur de la république et du procureur spécial sont devenus exorbitants par rapport à ceux du juge d’instruction et du juge de la commission d’instruction. C’est comme si le pouvoir politique exerçait une pression énorme sur le parquet et définissait la marche des procédures judiciaires concernant les hommes politiques.
En tout état de cause, la double inculpation apparue récemment dans les procédures judiciaires et la liberté provisoire octroyée à certains prévenus par les juges d’instruction et refusées par le parquet prouveraient au besoin que les juges résistent encore à la pression politique.
C’est pourquoi , je dénonce de toutes mes forces le harcèlement politico-judiciaire exercé à l’endroit de mes frères du Parti Démocratique Sénégalais (PDS) restés fidèles à son Secrétaire général national Me Abdoulaye Wade et toutes les dérives notées dans les procédures judiciaires en cours.
Enfin, j ’invite les magistrats et les juristes au nom de l’intérêt supérieur de la nation et de la bonne marche de la justice à nous édifier sur la conformité avec le droit des procédures judicaires engagées dans le cadre de la traque des dignitaires de l’ancien régime .
Farba Senghor