C’est ainsi qu’on note divers épisodes attestant du non-respect des règles du jeu démocratique, qui avait été l’un des principaux griefs à l’encontre du précédent régime d’Abdoulaye WADE.
Il y a d’abord l’implication massive et au plus haut niveau des membres de la famille présidentielle, non seulement dans le jeu politique, mais aussi dans les affaires minières (Pétrotim) et même financières (Banque de Dakar). Il y a aussi l’utilisation de tournées économiques pour débaucher des maires, militants de partis alliés, et des personnalités politiques de l’Opposition, anciens dignitaires du précédent régime libéral, qui ne semblent être nullement concernées par la reddition des comptes. Enfin, on est allé jusqu’à repeindre des bus de la société nationale de transport aux couleurs du parti présidentiel, en droite ligne des pratiques du Parti-Etat socialiste reprises par le parti démocratique sénégalais.
Mais la meilleure preuve de la prédominance d’éléments de continuité de pratiques politiques immorales par rapport à la rupture attendue, c’est cette insoutenable “transhumance” dont les origines remontent aux premières années de notre indépendance, quand le poète-président, soutenu par les ténors de la Françafrique et les cercles foccartistes, ne laissait à l’élite politico-religieuse de notre pays qu’une alternative : se soumettre au Parti-Etat ou périr ! La persistance de cette tare monstrueuse, qu’est ce phénomène de la transhumance politique, dénote de la somme d’efforts que notre Démocratie se doit encore d’accomplir pour se hisser au rang des Nations, dans lesquelles, les citoyens ont pu conquérir un minimum de lisibilité de l’offre politique.
Une autre tendance nettement perceptible dans les manœuvres « yakaaristes », c’est la cour assidue faite par le président de la République (et de l’APR) aux notabilités religieuses mais surtout politiques, dont certaines, contrairement au turbulent avocat nonagénaire, ne demandent qu’à jouir d’un repos mérité. Comme jamais auparavant, des décorations, poliment acceptées mais parfois refusées, sont distribuées à bout de bras à d’anciens hommes d’Etat, dont plusieurs – pas tous ! – brillent par la tortuosité de leur parcours politique!
C’est ainsi qu’on cherche à installer la Nation dans une ambiance de “compromission historique” ou “d’unanimisme béat”, à force d’artifices médiatiques au service d’une propagande agressive.
Les tentatives d’imposer un leadership de plus en plus pesant voire répressif, pour étouffer toutes formes de contestation se heurtent au vieil esprit frondeur des Sénégalais, comme le prouvent les reculs imposés par les syndicats d’enseignants au gouvernement de Mohammed Dionne. Et cela ne fait que commencer !
Face au rouleau compresseur du pouvoir apériste, qui pense avoir déjà résolu l’équation du deuxième mandat, on ne discerne encore aucune alternative crédible. Le parti socialiste, qui revendique le droit à la différence et à la candidature ne fait cependant état d’aucune divergence de fond avec la politique conduite par le gouvernement de la République. Le porte-drapeau des dissidents de l’AFP à Guédiawaye porte une responsabilité certaine dans l’élection du frère du président Macky Sall comme maire de la Ville de Guédiawaye. Plus généralement, les responsables de l’AFP ont capitulé devant la boulimie pouvoiriste du parti présidentiel. D’une manière générale, tous les potentiels rivaux de Macky Sall aux prochaines présidentielles semblent être empêtrés dans des contradictions inextricables au sein de leurs propres formations politiques, omettant de présenter au peuple sénégalais leur offre politique, qui semble pour l’instant se résumer à vouloir faire peur à Macky en s’affichant, de manière ostentatoire, avec l’ex-président Abdoulaye Wade. Les partis de gauche, quant à eux, exigent, certes timidement encore, des discussions programmatiques sérieuses et la prise en compte de la plateforme des Assises Nationales.
Autant il a été difficile à la CREI de démêler l’écheveau des sociétés écran du vrai faux ex prince héritier, autant c’est un jeu d’enfant pour tout apprenti politologue de comprendre que le Président de la République se sert de Benno Bokk Yakaar comme d’une coalition écran, qui outre son caractère virtuel, semble servir à camoufler les transactions politiquement douteuses de ses diverses entités, avec en ligne de mire, une victoire électorale aux prochaines élections présidentielles de 2017.
NIOXOR TINE