Après la déclaration de l’Élysée, l’audience accordée par le président Sall à Marine Le Pen, la rencontre secrète entre Sonko et une conseillère de Macron, les derniers rebondissements actent la fin de l’idylle entre Macron et Macky Sall, fait remarquer le journal Enquête.
Qui l’eût cru ? Des ‘’mackystes’’ en guerre contre Macron et France 24. Des ‘’sonkistes’’ en bouclier de Macron et France 24. Il y a quelques mois, le scénario n’était envisageable même pas en rêve au Sénégal. Pourtant, c’est ce à quoi on a droit depuis quelques jours. La goutte d’eau qui a fait déborder le vase, c’est le communiqué du ministre de la Communication, faisant suite à un article de France 24 sur l’arrestation du n°2 de Pastef/Les patriotes Birame Soulèye Diop.
Dans le communiqué, le ministre accuse France 24 de ‘’traitement tendancieux’’ de l’actualité politique sénégalaise. ‘’Le gouvernement du Sénégal a la surprise de constater, une nouvelle fois, une couverture médiatique tendancieuse de l’actualité politique au Sénégal depuis plusieurs mois par la chaine de télévision France 24. Ce traitement sans éthique, sans équilibre, tendancieux et subversif de l’information sur le Sénégal, est manifeste à l’analyse de leurs bulletins, émissions, interviews et écrits diffusés en boucle sur la chaine’’, lit-on dans le document.
La note ajoute : ‘’Alors qu’un député de l’opposition, au cours d’une conférence de presse, a publiquement injurié et diffamé des chefs d’État, puis présenté ses excuses, la chaine justifie sa garde à vue par sa position sur le discours à la Nation du président de la République, ce qui est manifestement fallacieux.’’
Depuis, la toile s’enflamme. Pendant que des souverainistes, soutiens invétérés de Sonko, prennent la défense du média français qu’ils taxaient autrefois d’outil au service de l’impérialisme, le camp présidentiel naguère pro-France semble prendre le chemin du maquis.
Responsable de l’APR à Rufisque, Abdoul Aziz Konaté y va de ses accusations. ‘’Le général De Gaulle a raison, clame-t-il. Les États n’ont pas d’amis. Ils n’ont que des intérêts. Que Macron sache alors que le Sénégal fera tout pour défendre ses propres intérêts dans l’exploitation de son pétrole découvert sous l’ère Macky Sall, un digne héritier de Koly Tenguella, chef de la dynastie des Déniankés, branche de la noblesse ceddo du Fouta. Il ne se laissera jamais faire’’. Pour lui, malgré les ‘’ragots’’ qui se racontaient par-ci, par-là, l’histoire a montré que Paris souhaiterait aujourd’hui passer par Sonko pour avoir ce qu’il n’a pu avoir avec Macky Sall.
À Pastef, on rit simplement sous cape. Loin du temps où tous les prétextes étaient bons pour descendre en flammes la France et ses médias, dont RFI et France 24, des soutiens de Sonko brocardent le gouvernement et défendent France 24. Sur certaines pages très actives dans la défense de l’opposant radical et de son projet, l’on n’a pas tardé de décréter avec beaucoup d’enthousiasme la chaine autrefois bannie de ‘’Télé Askan Wi’’, c’est-à-dire la télévision du peuple.
Moins euphorique, le responsable à Pastef Amadou Ba se réjouit en ces termes : ‘’Attaque du gouvernement sénégalais : France 24 lance la ‘gatsa-gatsa’ médiatique (œil pour œil, dent pour dent).’’ Depuis 4 heures, constate-t-il, ‘’le journaliste vedette de France 24, Marc Perelman, a publié sur son compte Twitter près d’une dizaine de coupures vidéos de l’entretien de Sonko’’.
Un autre responsable du Pastef, membre de la cellule de communication, Ababacar Sadikh Top, partageait sur sa page une capture reprenant une information de RFI à charge contre le régime. La capture est accompagnée du commentaire suivant : ‘’RFI khana day sott’’ (RFI se solidarise-t-elle avec France 24). En titre, l’article disponible sur le portail du site d’informations mentionne : ‘’Le Sénégal de Macky Sall est endetté jusqu’au cou, selon l’économiste Meissa Babou.’’
Pendant longtemps, les deux médias ont été accusés par les membres de Pastef, avec à leur tête leur leader, d’être des bras armés de la politique étrangère impérialiste de la France.
Il faut noter que la coïncidence entre cette série d’articles et les difficultés dernièrement notées sur l’axe Dakar – Paris n’est pas pour plaider en faveur desdits médias. Sur le papier qui a fait l’objet de la réaction du ministère de la Communication, certains n’ont pas manqué de relever deux titres publiés sur le portait de la chaine (France 24) qui peuvent être sujets à commentaire. Dans le premier, le média souligne : ‘’Sénégal : un opposant en prison pour avoir mis en doute les intentions du président Sall.’’ Par la suite, ce titre a été corrigé, si l’on se fie aux captures, pour donner : ‘’Sénégal : un opposant en garde à vue après des propos sur le président Sall.’’ Ce qui se rapproche plus de la réalité.
Réagissant sur la RFM à la suite du tollé suscité, le ministre est revenu sur les raisons de son communiqué : ‘’Nous avons remarqué, comme hier, durant toute la journée, il y avait un bandeau qui est passé en boucle pendant 24 heures, dans lequel on disait : ’Un député est arrêté au motif qu’il a des doutes sur la décision du président de la République de ne pas briguer un troisième mandat’, alors que tout le monde sait qu’il a été gardé à vue pour des propos infamants, injurieux qu’il a tenus à l’égard de chefs d’État. C’est donc une information fausse relayée toute la journée. Et ce n’est qu’un élément. Nous avons vu comment ces événements du mois de juin ont été traités, comparé d’ailleurs au traitement qu’ils ont fait des événements similaires survenus dans le territoire français. Cela montre qu’ils ne font pas un traitement équilibré et objectif de ce qui se passe au Sénégal.’’
Selon les recoupements faits par ‘’EnQuête’’, cette information dont parle le ministre était en réalité une info de l’AFP reprise par le journal dans son bandeau. La même info a été publiée avec le titre indiqué plus haut, non seulement par le site de France 24, mais aussi par plusieurs autres médias français dont ‘’Le Monde’’.
Dans tous les cas, ces derniers événements prouvent, s’il en était encore besoin, que le tandem Macky-Macron, pour ne pas dire l’axe Paris – Dakar ne fonctionne plus comme auparavant.
Quelques heures seulement avant ces derniers rebondissements, Macky Sall trouvait ‘’inélégante’’ la rencontre entre un conseiller de Macron et l’opposant radical Ousmane Sonko. Lui qui trouve normale l’audience accordée à Marine Le Pen.
Interpellé par ‘’Le Monde’’ sur l’état des relations avec la France, Macky Sall exprime ses états d’âme : ‘’Nos relations sont très bonnes. Mais il faut éviter la monotonie. C’est normal qu’il y ait quelques couacs, mais ce n’est rien par rapport à la valeur de la relation entre la France et le Sénégal. Cela va au-delà de nos personnes, au président Macron et moi-même. Marine Le Pen est venue au Sénégal et a demandé que je la reçoive, j’ai accepté. Cela ne peut pas être un facteur de déstabilisation de la relation avec la France. J’ai, pour ma part, trouvé inélégant que Paris missionne [en mars] une conseillère [de l’Élysée] pour rencontrer mon opposant [Ousmane Sonko]. Pour autant, cela ne va pas casser notre relation.’’
Les éléments annonciateurs de cette dégradation des relations avaient été notés depuis plusieurs semaines. Dans son édition du 3 mars dernier, ‘’EnQuête’’ revenait déjà sur des signaux annonciateurs de ce déclin, dans un article intitulé : ‘’Macky-Macron : la fin d’une époque.’’
Depuis lors, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, notamment la rencontre secrète entre la conseillère Afrique de l’Élysée et Ousmane Sonko, le 27 mars.
REWMI
Qui l’eût cru ? Des ‘’mackystes’’ en guerre contre Macron et France 24. Des ‘’sonkistes’’ en bouclier de Macron et France 24. Il y a quelques mois, le scénario n’était envisageable même pas en rêve au Sénégal. Pourtant, c’est ce à quoi on a droit depuis quelques jours. La goutte d’eau qui a fait déborder le vase, c’est le communiqué du ministre de la Communication, faisant suite à un article de France 24 sur l’arrestation du n°2 de Pastef/Les patriotes Birame Soulèye Diop.
Dans le communiqué, le ministre accuse France 24 de ‘’traitement tendancieux’’ de l’actualité politique sénégalaise. ‘’Le gouvernement du Sénégal a la surprise de constater, une nouvelle fois, une couverture médiatique tendancieuse de l’actualité politique au Sénégal depuis plusieurs mois par la chaine de télévision France 24. Ce traitement sans éthique, sans équilibre, tendancieux et subversif de l’information sur le Sénégal, est manifeste à l’analyse de leurs bulletins, émissions, interviews et écrits diffusés en boucle sur la chaine’’, lit-on dans le document.
La note ajoute : ‘’Alors qu’un député de l’opposition, au cours d’une conférence de presse, a publiquement injurié et diffamé des chefs d’État, puis présenté ses excuses, la chaine justifie sa garde à vue par sa position sur le discours à la Nation du président de la République, ce qui est manifestement fallacieux.’’
Depuis, la toile s’enflamme. Pendant que des souverainistes, soutiens invétérés de Sonko, prennent la défense du média français qu’ils taxaient autrefois d’outil au service de l’impérialisme, le camp présidentiel naguère pro-France semble prendre le chemin du maquis.
Responsable de l’APR à Rufisque, Abdoul Aziz Konaté y va de ses accusations. ‘’Le général De Gaulle a raison, clame-t-il. Les États n’ont pas d’amis. Ils n’ont que des intérêts. Que Macron sache alors que le Sénégal fera tout pour défendre ses propres intérêts dans l’exploitation de son pétrole découvert sous l’ère Macky Sall, un digne héritier de Koly Tenguella, chef de la dynastie des Déniankés, branche de la noblesse ceddo du Fouta. Il ne se laissera jamais faire’’. Pour lui, malgré les ‘’ragots’’ qui se racontaient par-ci, par-là, l’histoire a montré que Paris souhaiterait aujourd’hui passer par Sonko pour avoir ce qu’il n’a pu avoir avec Macky Sall.
À Pastef, on rit simplement sous cape. Loin du temps où tous les prétextes étaient bons pour descendre en flammes la France et ses médias, dont RFI et France 24, des soutiens de Sonko brocardent le gouvernement et défendent France 24. Sur certaines pages très actives dans la défense de l’opposant radical et de son projet, l’on n’a pas tardé de décréter avec beaucoup d’enthousiasme la chaine autrefois bannie de ‘’Télé Askan Wi’’, c’est-à-dire la télévision du peuple.
Moins euphorique, le responsable à Pastef Amadou Ba se réjouit en ces termes : ‘’Attaque du gouvernement sénégalais : France 24 lance la ‘gatsa-gatsa’ médiatique (œil pour œil, dent pour dent).’’ Depuis 4 heures, constate-t-il, ‘’le journaliste vedette de France 24, Marc Perelman, a publié sur son compte Twitter près d’une dizaine de coupures vidéos de l’entretien de Sonko’’.
Un autre responsable du Pastef, membre de la cellule de communication, Ababacar Sadikh Top, partageait sur sa page une capture reprenant une information de RFI à charge contre le régime. La capture est accompagnée du commentaire suivant : ‘’RFI khana day sott’’ (RFI se solidarise-t-elle avec France 24). En titre, l’article disponible sur le portail du site d’informations mentionne : ‘’Le Sénégal de Macky Sall est endetté jusqu’au cou, selon l’économiste Meissa Babou.’’
Pendant longtemps, les deux médias ont été accusés par les membres de Pastef, avec à leur tête leur leader, d’être des bras armés de la politique étrangère impérialiste de la France.
Il faut noter que la coïncidence entre cette série d’articles et les difficultés dernièrement notées sur l’axe Dakar – Paris n’est pas pour plaider en faveur desdits médias. Sur le papier qui a fait l’objet de la réaction du ministère de la Communication, certains n’ont pas manqué de relever deux titres publiés sur le portait de la chaine (France 24) qui peuvent être sujets à commentaire. Dans le premier, le média souligne : ‘’Sénégal : un opposant en prison pour avoir mis en doute les intentions du président Sall.’’ Par la suite, ce titre a été corrigé, si l’on se fie aux captures, pour donner : ‘’Sénégal : un opposant en garde à vue après des propos sur le président Sall.’’ Ce qui se rapproche plus de la réalité.
Réagissant sur la RFM à la suite du tollé suscité, le ministre est revenu sur les raisons de son communiqué : ‘’Nous avons remarqué, comme hier, durant toute la journée, il y avait un bandeau qui est passé en boucle pendant 24 heures, dans lequel on disait : ’Un député est arrêté au motif qu’il a des doutes sur la décision du président de la République de ne pas briguer un troisième mandat’, alors que tout le monde sait qu’il a été gardé à vue pour des propos infamants, injurieux qu’il a tenus à l’égard de chefs d’État. C’est donc une information fausse relayée toute la journée. Et ce n’est qu’un élément. Nous avons vu comment ces événements du mois de juin ont été traités, comparé d’ailleurs au traitement qu’ils ont fait des événements similaires survenus dans le territoire français. Cela montre qu’ils ne font pas un traitement équilibré et objectif de ce qui se passe au Sénégal.’’
Selon les recoupements faits par ‘’EnQuête’’, cette information dont parle le ministre était en réalité une info de l’AFP reprise par le journal dans son bandeau. La même info a été publiée avec le titre indiqué plus haut, non seulement par le site de France 24, mais aussi par plusieurs autres médias français dont ‘’Le Monde’’.
Dans tous les cas, ces derniers événements prouvent, s’il en était encore besoin, que le tandem Macky-Macron, pour ne pas dire l’axe Paris – Dakar ne fonctionne plus comme auparavant.
Quelques heures seulement avant ces derniers rebondissements, Macky Sall trouvait ‘’inélégante’’ la rencontre entre un conseiller de Macron et l’opposant radical Ousmane Sonko. Lui qui trouve normale l’audience accordée à Marine Le Pen.
Interpellé par ‘’Le Monde’’ sur l’état des relations avec la France, Macky Sall exprime ses états d’âme : ‘’Nos relations sont très bonnes. Mais il faut éviter la monotonie. C’est normal qu’il y ait quelques couacs, mais ce n’est rien par rapport à la valeur de la relation entre la France et le Sénégal. Cela va au-delà de nos personnes, au président Macron et moi-même. Marine Le Pen est venue au Sénégal et a demandé que je la reçoive, j’ai accepté. Cela ne peut pas être un facteur de déstabilisation de la relation avec la France. J’ai, pour ma part, trouvé inélégant que Paris missionne [en mars] une conseillère [de l’Élysée] pour rencontrer mon opposant [Ousmane Sonko]. Pour autant, cela ne va pas casser notre relation.’’
Les éléments annonciateurs de cette dégradation des relations avaient été notés depuis plusieurs semaines. Dans son édition du 3 mars dernier, ‘’EnQuête’’ revenait déjà sur des signaux annonciateurs de ce déclin, dans un article intitulé : ‘’Macky-Macron : la fin d’une époque.’’
Depuis lors, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, notamment la rencontre secrète entre la conseillère Afrique de l’Élysée et Ousmane Sonko, le 27 mars.
REWMI