11h30 à Guet-Ndar. Les populations vaquent tranquillement à leurs occupations. Au lendemain du grand Magal de Touba, la sardinelle, espèce pélagique communément appelée « Yaa-boye » en ouolof et fort prisée par les ménagères est revenue en force. A partir du pont Moustapha Malick Gaye, une belle vue panoramique permet d’apercevoir un quartier populeux, dense et vivant, des ruelles étroites. Derrière les clôtures de bois, de tôles ou de parpaings, les maisons en dur sont aussi nombreuses que les baraques. Ces constructions frappent par leur petite taille et leur entassement dans un espace réduit. Les populations sont confrontées à d’énormes difficultés pour se déplacer dans cette partie de la ville qui reçoit régulièrement des milliers de touristes, hommes d’affaires et autres visiteurs.
Accoudé à la portière d’un taxi urbain, Baye Gaye, un chauffeur rompu à la tâche, âgé d’une quarantaine d’années et domicilié à Pilote Barre dans le Gandiolais, attend un client aux abords du grand marché de Ndar-Toute. Il déclare avoir réalisé déjà un bon chiffre d’affaires. Il est issu d’une grande famille de pêcheurs. Ses frères, mareyeurs ont effectué, pendant une quinzaine d’années, de nombreuses campagnes de pêche en haute mer. Aujourd’hui, ils font le pied de grue chaque matin sur le quai de débarquement de poissons de Diamalaye à Guet-Ndar. Ils achètent et revendent des cageots de sardinelles. Grâce aux revenus tirés de la pêche, souligne-t-il, tous les membres de sa famille ont pu construire de très belles maisons dans le Gandiolais, dans le Toubé et dans d’autres localités de l’arrondissement de Rao.
Le visiteur qui débarque pour la première fois à Guet-Ndar, Santhiaba, Gokhou-Mbathie, à hydrobase et dans certaines localités du Gandiolais, se rend compte aisément des efforts déployés constamment par les pêcheurs, les mareyeurs, les vendeuses de poisson et autres transformatrices de produits de mer, en vue de contribuer à la lutte contre la pauvreté, le chômage endémique des jeunes, la délinquance juvénile, le désœuvrement, la mendicité forcée, etc.
Selon ce chauffeur de taxi, c’est avec les ressources financières générées par ses nombreuses campagnes de pêche en mer notamment dans la zone maritime mauritanienne qu’il a pu acheter ce véhicule de transport en commun. Il a mis à la disposition de ses neveux une solide et fonctionnelle pirogue qu’ils utilisent souvent pour aller chercher du poisson en mer.
Malgré les difficultés auxquelles les pêcheurs de la Langue de Barbarie sont quotidiennement confrontés dans l’exercice de leur métier, ces derniers, à en croire Baye Gaye, arrivent à subvenir aux besoins de leurs familles, à se reconvertir au moment opportun, dans d’autres domaines de la vie économique de notre pays. « Nos problèmes, confie-t-il, tournent essentiellement autour du renouvellement des licences de pêche, de l’arraisonnement des pirogues sénégalaises par les gardes côtes mauritaniennes, de la gestion de la brèche (chavirement de nombreuses embarcations frêles et vétustes dans ce canal de délestage des eaux, aménagé en 2003 par l’Etat pour aider les populations de Saint-Louis à faire face aux inondations dues aux eaux de pluies et à la forte crue du fleuve), des problèmes de conservation des produits halieutiques, etc. ».
Renouvellement des licences de pêche
Ce vieux quartier atypique de pêcheurs grouille de monde dans un vacarme indescriptible, exhibant fièrement ses vieilles chaumières, attrayantes dans leur prodigieux enchevêtrement, sa grande mosquée qui trône imperturbable au milieu de Lodo et de Pondokholé (sous-quartiers). Des centaines de pirogues s'alignent sur la plage. A Diamalaye où l’on débarque la sardinelle et le cimetière « Thiaka Ndiaye », le visiteur découvre des tombes hérissées de piquets de bois ou de fer, recouvertes de filets de pêche qui, à l’origine, étaient l’unique moyen de protéger les sépultures contre les chacals et les chiens errants. Guet-Ndar est un monde à part, un havre de paix où l’on élève le ton à sa guise, où un voisin peut se permettre de réprimander et de corriger sévèrement un enfant têtu, un endroit où grâce à une solidarité agissante, on s’évertue à rendre des services à son prochain sans ostentation.
En effet, dans ce quartier, tout le monde est unanime à reconnaître que l’altruisme, l’honnêteté, la loyauté dans les rapports, la gestion collective et associative des problèmes sociaux, la dignité et la sincérité sont autant de valeurs qui contribuent à l’équilibre de cette communauté que chacun s’efforce de préserver.
Aux abords du marché de Ndar-Toute et du monument aux morts, le spectacle est poignant lorsqu’on voit ces braves femmes de la Langue de Barbarie, venues de divers horizons, déployer des efforts pour éviter d’occuper entièrement la chaussée, héler des clients grincheux parfois exécrables, arrogants, capricieux et hautains, jeter dans tous les sens un regard à la dérobée pour surveiller les badauds agressifs, les pickpockets, les jeunes délinquants à la langue mielleuse, les déplacements des agents municipaux et les forces de sécurité qui les rappellent à l’ordre à tout moment. « Mon mari fait partie de ces nombreux pêcheurs qui ont disparu en mer, il y a trois ans.
Actuellement, c’est un parent mareyeur domicilié à Gokhou-Mbathie qui me ravitaille tous les jours en sardinelles. Je parviens à nourrir ma famille grâce à la revente de ces produits. Mon commerce est florissant. J’envisage d’aider deux de mes enfants à ouvrir un commerce au grand marché de Sor », confie cette veuve. Elle invite les pouvoirs publics à développer davantage le secteur de la pêche dans notre pays. « Nous tenons à être des citoyennes à part entière et nous allons nous battre pour survivre et exister, pour éduquer nos enfants, pour contribuer à la lutte contre la pauvreté, la délinquance juvénile », déclare-t-elle.
Le commerce est florissant
Une autre interlocutrice est fière d’exhiber son teint cuivré, basané, un visage en forme aérodynamique, très fin sur le tracé des lignes, un nez aquilin. Clinquante dans son Meulfeu (habit maure qui couvre entièrement les attributs féminins), la jeune femme est une métisse sénégalaise d’origine mauritanienne qui manie à merveille la langue Ouolof. Très loquace, elle nous fait comprendre que les pêcheurs demeurent des citoyens qui prêchent par l’exemple, sur tous les plans et à tous les niveaux. « Nous avons appris, dès notre tendre enfance, à lutter contre le chômage endémique des jeunes, le désœuvrement, l’oisiveté, la mendicité », affirme-t-elle.
« C’est très rare de voir des individus tendre la main à Gokhou-Mbathie, Guet-Ndar, Santhiaba, à Hydrobase et dans le Gandiolais où l’on remarque de fortes concentrations humaines composées essentiellement de communautés de pêcheurs », selon notre interlocutrice. Dans ces localités, précise-t-elle, si les garçons vont chercher le poisson en mer, les jeunes femmes se lèvent à l’aube pour se ravitailler en sardinelles à Diamalaye et les commercialiser au marché de Sor.
Reportage de
Mbagnick Kharachi Diagne
Accoudé à la portière d’un taxi urbain, Baye Gaye, un chauffeur rompu à la tâche, âgé d’une quarantaine d’années et domicilié à Pilote Barre dans le Gandiolais, attend un client aux abords du grand marché de Ndar-Toute. Il déclare avoir réalisé déjà un bon chiffre d’affaires. Il est issu d’une grande famille de pêcheurs. Ses frères, mareyeurs ont effectué, pendant une quinzaine d’années, de nombreuses campagnes de pêche en haute mer. Aujourd’hui, ils font le pied de grue chaque matin sur le quai de débarquement de poissons de Diamalaye à Guet-Ndar. Ils achètent et revendent des cageots de sardinelles. Grâce aux revenus tirés de la pêche, souligne-t-il, tous les membres de sa famille ont pu construire de très belles maisons dans le Gandiolais, dans le Toubé et dans d’autres localités de l’arrondissement de Rao.
Le visiteur qui débarque pour la première fois à Guet-Ndar, Santhiaba, Gokhou-Mbathie, à hydrobase et dans certaines localités du Gandiolais, se rend compte aisément des efforts déployés constamment par les pêcheurs, les mareyeurs, les vendeuses de poisson et autres transformatrices de produits de mer, en vue de contribuer à la lutte contre la pauvreté, le chômage endémique des jeunes, la délinquance juvénile, le désœuvrement, la mendicité forcée, etc.
Selon ce chauffeur de taxi, c’est avec les ressources financières générées par ses nombreuses campagnes de pêche en mer notamment dans la zone maritime mauritanienne qu’il a pu acheter ce véhicule de transport en commun. Il a mis à la disposition de ses neveux une solide et fonctionnelle pirogue qu’ils utilisent souvent pour aller chercher du poisson en mer.
Malgré les difficultés auxquelles les pêcheurs de la Langue de Barbarie sont quotidiennement confrontés dans l’exercice de leur métier, ces derniers, à en croire Baye Gaye, arrivent à subvenir aux besoins de leurs familles, à se reconvertir au moment opportun, dans d’autres domaines de la vie économique de notre pays. « Nos problèmes, confie-t-il, tournent essentiellement autour du renouvellement des licences de pêche, de l’arraisonnement des pirogues sénégalaises par les gardes côtes mauritaniennes, de la gestion de la brèche (chavirement de nombreuses embarcations frêles et vétustes dans ce canal de délestage des eaux, aménagé en 2003 par l’Etat pour aider les populations de Saint-Louis à faire face aux inondations dues aux eaux de pluies et à la forte crue du fleuve), des problèmes de conservation des produits halieutiques, etc. ».
Renouvellement des licences de pêche
Ce vieux quartier atypique de pêcheurs grouille de monde dans un vacarme indescriptible, exhibant fièrement ses vieilles chaumières, attrayantes dans leur prodigieux enchevêtrement, sa grande mosquée qui trône imperturbable au milieu de Lodo et de Pondokholé (sous-quartiers). Des centaines de pirogues s'alignent sur la plage. A Diamalaye où l’on débarque la sardinelle et le cimetière « Thiaka Ndiaye », le visiteur découvre des tombes hérissées de piquets de bois ou de fer, recouvertes de filets de pêche qui, à l’origine, étaient l’unique moyen de protéger les sépultures contre les chacals et les chiens errants. Guet-Ndar est un monde à part, un havre de paix où l’on élève le ton à sa guise, où un voisin peut se permettre de réprimander et de corriger sévèrement un enfant têtu, un endroit où grâce à une solidarité agissante, on s’évertue à rendre des services à son prochain sans ostentation.
En effet, dans ce quartier, tout le monde est unanime à reconnaître que l’altruisme, l’honnêteté, la loyauté dans les rapports, la gestion collective et associative des problèmes sociaux, la dignité et la sincérité sont autant de valeurs qui contribuent à l’équilibre de cette communauté que chacun s’efforce de préserver.
Aux abords du marché de Ndar-Toute et du monument aux morts, le spectacle est poignant lorsqu’on voit ces braves femmes de la Langue de Barbarie, venues de divers horizons, déployer des efforts pour éviter d’occuper entièrement la chaussée, héler des clients grincheux parfois exécrables, arrogants, capricieux et hautains, jeter dans tous les sens un regard à la dérobée pour surveiller les badauds agressifs, les pickpockets, les jeunes délinquants à la langue mielleuse, les déplacements des agents municipaux et les forces de sécurité qui les rappellent à l’ordre à tout moment. « Mon mari fait partie de ces nombreux pêcheurs qui ont disparu en mer, il y a trois ans.
Actuellement, c’est un parent mareyeur domicilié à Gokhou-Mbathie qui me ravitaille tous les jours en sardinelles. Je parviens à nourrir ma famille grâce à la revente de ces produits. Mon commerce est florissant. J’envisage d’aider deux de mes enfants à ouvrir un commerce au grand marché de Sor », confie cette veuve. Elle invite les pouvoirs publics à développer davantage le secteur de la pêche dans notre pays. « Nous tenons à être des citoyennes à part entière et nous allons nous battre pour survivre et exister, pour éduquer nos enfants, pour contribuer à la lutte contre la pauvreté, la délinquance juvénile », déclare-t-elle.
Le commerce est florissant
Une autre interlocutrice est fière d’exhiber son teint cuivré, basané, un visage en forme aérodynamique, très fin sur le tracé des lignes, un nez aquilin. Clinquante dans son Meulfeu (habit maure qui couvre entièrement les attributs féminins), la jeune femme est une métisse sénégalaise d’origine mauritanienne qui manie à merveille la langue Ouolof. Très loquace, elle nous fait comprendre que les pêcheurs demeurent des citoyens qui prêchent par l’exemple, sur tous les plans et à tous les niveaux. « Nous avons appris, dès notre tendre enfance, à lutter contre le chômage endémique des jeunes, le désœuvrement, l’oisiveté, la mendicité », affirme-t-elle.
« C’est très rare de voir des individus tendre la main à Gokhou-Mbathie, Guet-Ndar, Santhiaba, à Hydrobase et dans le Gandiolais où l’on remarque de fortes concentrations humaines composées essentiellement de communautés de pêcheurs », selon notre interlocutrice. Dans ces localités, précise-t-elle, si les garçons vont chercher le poisson en mer, les jeunes femmes se lèvent à l’aube pour se ravitailler en sardinelles à Diamalaye et les commercialiser au marché de Sor.
Reportage de
Mbagnick Kharachi Diagne