Le ''sorcier'' de Fass Moussa Gningue regrette de s’être sacrifié pour son écurie. Éloigné de l’arène depuis des années, Moussa Gningue revient sur son role dans la préparation des combats et émet des regrets...
Cela fait longtemps que les férus de lutte ne vous ont pas vu dans l’arène. Que se passe-t-il ?
Je vous remercie de l’opportunité que vous m’offrez de parler aux nombreux amateurs de lutte. Je peux vous dire que j’ai quitté l’arène, sans la quitter... Il y a des moments où je viens dans l’arène comme spectateur, sur les gradins. Mais cela fait deux ou trois années que je n’ai pas foulé une enceinte pour accompagner un lutteur.
Pourquoi vous n’êtes plus visible dans l’arène ?
Quand on ne peut plus supporter certaines choses dans son domaine d’évolution, et qu’on ne peut pas les éradiquer, il faudrait mieux tout laisser tomber et aller à la retraite. J’ai fait 45 ans dans l’arène. J’y suis depuis l’âge de 15 ans. Maintenant, je dois aller à la retraite. C’est vrai qu’il y a des choses qui ne me plaisent pas dans l’écurie, (l’écurie de Fass, ndlr) mais je ne veux pas être rancunier avec les membres de cette écurie. Et c’est mieux que je me retire.
« Des Intrus m’ont poussé vers la sortie »
Mais justement, quel est le problème qui vous oppose à l’écurie Fass ?
Moi, je suis de Fass. Parce que j’y suis né et j’y ai grandi. Donc, il ne doit pas y avoir de problème entre Fass et moi. Seulement, il y a des intrus dans l’écurie. Ces gens ne font pas parti de l’écurie. On les a fait venir. Et aujourd’hui, ils sont en train de saboter le travail effectué par les anciens. Maintenant, quand on se rend compte que nos ambitions ne vont pas dans la même direction, je pense qu’il était de mon devoir de me retirer, et d’aller à la retraite.
Mais, est-ce que Moussa Gning a le droit de se laisser faire ? Quand on sait qu’il s’identifie à cette écurie ?
Vous savez, la vie change. Parce que si Moussa Gning a passé 45 longues années de sa vie dans cette écurie, étant un membre clé de Fass ; et que par ailleurs, des gens venus de nulle part le bousculent. C’est que quelque part, ils bénéficient de soutien au sein de certains membres de l’écurie. D’ailleurs, des gens qui ont démarré avec moi l’écurie, depuis le début, les soutiennent. Cela devient grave. Alors, je ne peux que me retirer. Mais je ne peux sortir de Fass, parce que je fais partie de Fass. Un exemple, la Jeanne d’Arc et le Jaraaf appartiennent aujourd’hui aux fils de ceux qui les ont fondés.
Mais d’aucuns disent que vous êtes partis parce que Moustapha Guèye s’est retiré ?
Non. C’est une coïncidence. La raison de mon départ, est liée à ces gens qui manigançaient beaucoup de choses derrière mon dos. Ils venaient me bousculer, me pousser vers la sortie. Je leur ai facilité la tâche. Mais, mon départ est venu à son heure, et cela a coïncidé avec le départ de Moustapha Guèye. Je n’en pouvais plus. Et je devais me retirer. Cela ne signifie pas que je ne supporte plus Fass. Au contraire !
Des membres de l’écurie vous accusaient aussi de profiter de l’argent des lutteurs ?
C’est ce que je viens de dire. « Seytaané waxul deugue wayé yakh na xéel » (Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose). Je pense que quand Fass n’était encore rien du tout, je vivais décemment. On ne peut manger des cailloux quand on collabore avec l’Olympique de Marseille. Du temps de l’international Sénégalais Abdoulaye Diallo, de Basile Boli... Ce que ce club m’a donné, c’est cent fois plus que ce que les lutteurs de Fass me donnaient pour leur préparation. L’argent ne peut m’impressionner. J’ai travaillé à l’Oncad. Ma dignité ne me permettait pas de bouffer l’argent des lutteurs de cette écurie. Mais ceux qui le disent sont les derniers venus à Fass. Eux, ils sont pauvres, ils sont éblouis par la couleur de l’argent. C’est pourquoi, ils le disent. Mbaye Guèye, Mor Nguer, Amadou Katy Diop, Birahim Ndiaye…, ces gens avec qui j’étais depuis longtemps, ne l’ont jamais dit. J’ai honte de faire pareille chose. Parce que j’ai mes parents à Fass. En ces temps-là, on ne voyait pas un lutteur percevoir un million de francs. Alors que moi, j’avais en ma possession beaucoup de taxis. Tous les taxis qui me transportaient lors des combats de lutte, sont les miens. Donc, s’ils disent que je bouffais l’argent de l’écurie Fass, ils racontent des bobards, et ne connaissent pas qui est Moussa Gning.
Donc, vous confirmez ceux qui disent que vous veniez beaucoup en aide aux lutteurs de l’écurie Fass, lors de leurs combats ?
Pour en savoir plus, il faut aller demander aux lutteurs que j’accompagnais. Ils peuvent te dire comment je vivais avec eux. Quand on allait voir un marabout, celui-ci disait qu’on devait lui remettre une somme d’argent. C’est moi qui décaissais. Et en général, ce je donnais au marabout était plus colossal que ce que l’écurie me donnait. Par exemple, il arrivait que le marabout nous demande 100 mille francs, dans un premier temps. Puis 200 mille francs. Et c’est moi qui donnais ces deux cent mille. Cela veut tout simplement dire que j’y perdais beaucoup d’argent. Aujourd’hui, ils ont peur. Ils ne savent plus quoi faire. C’est pourquoi, ils disent tout cela.
Quel est le plus grand cachet que vous avez reçu après avoir engagé un lutteur ?
Le plus grand cachet que j’ai reçu après avoir engagé un lutteur, c’était entre Gris Bordeaux et Baboye. Cela avoisinait les 90 millions, et depuis lors, il n’a plus reçu un cachet aussi costaud...
« Entre Gris et moi, laissons Dieu juger »
Quel est réellement votre problème avec Gris bordeaux ?
Je crois que Gris est un lutteur, je suis un encadreur. Je ne veux pas polémiquer sur cela. « Yague bayéwoul Dara » (L’avenir nous édifiera). Dans la mesure où ce qu’il pense est très différent de la réalité. Laissons Dieu juger…
Des gens disent qu’il manque à Gris quelqu’un comme toi, pour relancer sa carrière ?
Ce que je peux vous dire, est que je faisais beaucoup de choses pour lui. Et pour d’autres personnes autres que lui. Je le faisais pour Mbaye Guèye, Tapha Guèye, Toubabou Dior… Ce que je faisais, peut-être que tout le monde peut le faire. Mais, la différence est qu’il y avait la main de Dieu. C’est lui qui fait et qui défait. Il m’avait procuré beaucoup de victoires. Et même si je reviens, peut-être que Dieu ne vas plus exhausser les prières. Qui sait. « Pour le mystique, je dépensais le double ou le triple de ce que je recevais… »
Les gens sont allés jusqu’à dire que lors de son combat avec Bombardier, vous avez beaucoup contribué à sa victoire ?
Lors de ce combat, je vais vous le dire aujourd’hui, je suis parti dans des lieux où je ne vais plus jamais partir. Jamais ! Je ne vais plus jamais le faire pour un lutteur. Parce que quand le lutteur te donne une somme pour aller chercher du mystique, et que tu y ajoutes le double ou le triple de ce qu’il t’a donné, c’est difficile. Je l’ai fait parce que j’en faisais une affaire personnelle, un challenge. Mais si c’était à refaire, je ne vais plus jamais le refaire.
Pouvez-nous raconter une anecdote lors de ce combat. Quelque chose que vous avez vécu et que vous regrettez ?
Il y en a beaucoup. J’ai oublié peut-être certaines choses. J’en avais expliqué un bout dans un journal de la place. C’est du passé. Mais, je dois dire qu’il y a des choses que vous ne pouvez faire que pour quelqu’un qui vous est cher. Par exemple, lors de ce combat (Gris - Bombardier) je suis allé en pleine mer pour y noyer une chèvre et un mouton vivants, bien attachés. C’était un sacrifice. Si c’était à refaire, je ne le referais plus. Je prie le bon Dieu de me pardonner pour ce geste, et d’autres dont je ne voudrais pas parler ici. Mais c’est à cause de lui que je l’ai fait, pour qu’il gagne. Mais, Ndadié sou Nekhé Tass, sous Nakharé Tasse (il se répète suivi de rires).
Peut-on en savoir un peu sur le secret du défi qui vous a été lancé par Tapha Guèye et Gris Bordeaux, lors d’une des réunions de votre écurie ?
Moustapha Guèye et Gris Bordeaux m’ont lancé un défi, pour fouetter mon orgueil et me doper, afin de redoubler d’effort pour le combat contre Bombardier. Il y a des choses, quand on vous les dit, en tant que « Ngor », tu ne peux plus te retenir. Lors de cette réunion, les membres présents m’ont interpellé par rapport au combat, je n’ai pas voulu parler. Au second tour de table, Gris Bordeaux m’interpelle : « Grand, si tu m’aides comme tu le faisais avec Tapha Guèye, je sortirais de cette confrontation avec une victoire ». Les gens m’ont dit de répondre. J’ai dit non. C’est à ce moment que Tapha Guèye a pris la parole pour me dire : « Grand, la victoire de Gris sur Bombardier repose sur toi, si tu l’aides, il battra Bombardier ». Alors, j’en ai fait une affaire personnelle. Et j’ai dit à Gris Bordeaux, devant l’assistance, d’aller s’entraîner, et de ne pas se préoccuper des choses mystiques ; que tout sera à ma charge. Je lui ai dit que le jour du combat, il verra si c’est le même Bombardier qu’il a l’habitude de voir dans les combats. Il ne sera pas le même que celui qui a battu Tapha Guèye et Zale Lô.
C’est cette motivation qui vous a poussé à dépenser autant d’argent sur ce combat ?
Je suis de Ndakarou, mes grands parents viennent de Yoff. S’y ajoute, j’ai joué à la Ja, au Jaraaf et à l’Us Rail. On a été en finale de la coupe du Sénégal avec la Ja qui nous a battus. Tous ceux qui m’ont connu, le sont par le biais du sport. Si je dois me mettre au devant pour ce qui concerne Fass, je dois le faire avec mon courage et sans arrière-pensée. La seconde chose qui m’a motivé lors de ce combat, c’est que ma mère est restée 45 ans sans venir au Sénégal, et le combat a coïncidé avec son retour des Usa. Elle m’a remis 800.000 FCFA, et a exhorté mes six frères établis au pays de l’Oncle Sam d’en faire de même. Chacun d’eux m’a envoyé 800.000 FCFA par la banque Western Union qui se trouve à Fass, via la carte d’identité d’Alassane Diakhaté, un membre de l’écurie. Je ne regrette rien de l’argent que j’ai dépensé pour ce combat ; et si c’était à refaire, je le referais.
Peut-on s’attendre au retour de Moussa Gning à Fass ?
Mais je ne suis pas parti de Fass. Si changement il y a, c’est que je ne descends plus dans l’enceinte, mais personne ne peut me sortir de Fass. Je participe à tout ce qu’ils font. Actuellement, quand l’écurie obtient une victoire, tous les gens que je rencontre au stade ou en dehors me félicitent. Cela prouve que mon nom s’identifie à cette écurie ; et cela, personne n’y peut rien. Beaucoup de grands lutteurs viennent me courtiser pour les épauler dans leur combat, mais je leur dis que je suis et resterai toujours à Fass.
On dit qu’il se pourrait que vous soyez de retour pour coacher un autre lutteur de Fass ?
C’est possible, une partie de ma modeste personne m’appartient, et l’autre appartient à mes amis. Je ne suis pas un lutteur, mais les lutteurs ne sont pas plus populaires que moi dans l’arène. Il m’arrive parfois d’aller dans un milieu et de fuir à cause des gens qui viennent vers moi. J’ai des amis partout à travers le pays, des hautes personnalités, des dignitaires religieux etc. Peut-être, le fait que des gens me sollicitent pour retourner avec un lutteur pourrait s’avérer fructueux, et me permettre de coacher quelqu’un. Mais auparavant, j’aurai encore à en discuter avec ma famille, qui a beaucoup souffert de mes activités. Je vous ferai encore une confidence, lors du combat entre Gris Bordeaux- Bombardier, toute ma famille est restée malade après le combat, à cause des choses mystiques qui se préparaient chez moi. Sur la véranda là-bas (il désigne un coin de chez lui) étaient exposés, couteaux, coupe-coupe, et autres « haliwa » en fer sur des fourneaux que les membres de ma famille étaient chargés de bouillir. Je suis de Fass, je ne connais que Fass, et jamais je ne la quitterai pour une autre écurie.
Le fait d’avoir duré dans l’arène, vous a certainement permis de connaître tous les marabouts ou la quasi-totalité des marabouts du pays ?
Vous savez, en matière de football, les diplômés effectuent un recyclage. C’est le même cas de figure au niveau de la lutte. Car, il va arriver un moment où le lutteur doit augmenter ses connaissances en matière de marabouts, et ne pas se contenter de ceux avec qui on a l’habitude de travailler. Les choses évoluent. Pour la préparation d’un combat, avant d’aller chercher ailleurs, je fais le tour de la région du Cap-Vert, avant d’aller en Casamance, plus précisément à Helinkine d’où sont originaires mes grands parents. Et de venir à Dakar en passant par Banjul, du côté maternel. La mère de mon père est d’origine Soussou. Elle vient de la Guinée Conakry. Je suis un homme métissé, qui connaît les coins et recoins du pays. Je connais les lieux où se trouvent les bons marabouts.
(L'office).
Cela fait longtemps que les férus de lutte ne vous ont pas vu dans l’arène. Que se passe-t-il ?
Je vous remercie de l’opportunité que vous m’offrez de parler aux nombreux amateurs de lutte. Je peux vous dire que j’ai quitté l’arène, sans la quitter... Il y a des moments où je viens dans l’arène comme spectateur, sur les gradins. Mais cela fait deux ou trois années que je n’ai pas foulé une enceinte pour accompagner un lutteur.
Pourquoi vous n’êtes plus visible dans l’arène ?
Quand on ne peut plus supporter certaines choses dans son domaine d’évolution, et qu’on ne peut pas les éradiquer, il faudrait mieux tout laisser tomber et aller à la retraite. J’ai fait 45 ans dans l’arène. J’y suis depuis l’âge de 15 ans. Maintenant, je dois aller à la retraite. C’est vrai qu’il y a des choses qui ne me plaisent pas dans l’écurie, (l’écurie de Fass, ndlr) mais je ne veux pas être rancunier avec les membres de cette écurie. Et c’est mieux que je me retire.
« Des Intrus m’ont poussé vers la sortie »
Mais justement, quel est le problème qui vous oppose à l’écurie Fass ?
Moi, je suis de Fass. Parce que j’y suis né et j’y ai grandi. Donc, il ne doit pas y avoir de problème entre Fass et moi. Seulement, il y a des intrus dans l’écurie. Ces gens ne font pas parti de l’écurie. On les a fait venir. Et aujourd’hui, ils sont en train de saboter le travail effectué par les anciens. Maintenant, quand on se rend compte que nos ambitions ne vont pas dans la même direction, je pense qu’il était de mon devoir de me retirer, et d’aller à la retraite.
Mais, est-ce que Moussa Gning a le droit de se laisser faire ? Quand on sait qu’il s’identifie à cette écurie ?
Vous savez, la vie change. Parce que si Moussa Gning a passé 45 longues années de sa vie dans cette écurie, étant un membre clé de Fass ; et que par ailleurs, des gens venus de nulle part le bousculent. C’est que quelque part, ils bénéficient de soutien au sein de certains membres de l’écurie. D’ailleurs, des gens qui ont démarré avec moi l’écurie, depuis le début, les soutiennent. Cela devient grave. Alors, je ne peux que me retirer. Mais je ne peux sortir de Fass, parce que je fais partie de Fass. Un exemple, la Jeanne d’Arc et le Jaraaf appartiennent aujourd’hui aux fils de ceux qui les ont fondés.
Mais d’aucuns disent que vous êtes partis parce que Moustapha Guèye s’est retiré ?
Non. C’est une coïncidence. La raison de mon départ, est liée à ces gens qui manigançaient beaucoup de choses derrière mon dos. Ils venaient me bousculer, me pousser vers la sortie. Je leur ai facilité la tâche. Mais, mon départ est venu à son heure, et cela a coïncidé avec le départ de Moustapha Guèye. Je n’en pouvais plus. Et je devais me retirer. Cela ne signifie pas que je ne supporte plus Fass. Au contraire !
Des membres de l’écurie vous accusaient aussi de profiter de l’argent des lutteurs ?
C’est ce que je viens de dire. « Seytaané waxul deugue wayé yakh na xéel » (Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose). Je pense que quand Fass n’était encore rien du tout, je vivais décemment. On ne peut manger des cailloux quand on collabore avec l’Olympique de Marseille. Du temps de l’international Sénégalais Abdoulaye Diallo, de Basile Boli... Ce que ce club m’a donné, c’est cent fois plus que ce que les lutteurs de Fass me donnaient pour leur préparation. L’argent ne peut m’impressionner. J’ai travaillé à l’Oncad. Ma dignité ne me permettait pas de bouffer l’argent des lutteurs de cette écurie. Mais ceux qui le disent sont les derniers venus à Fass. Eux, ils sont pauvres, ils sont éblouis par la couleur de l’argent. C’est pourquoi, ils le disent. Mbaye Guèye, Mor Nguer, Amadou Katy Diop, Birahim Ndiaye…, ces gens avec qui j’étais depuis longtemps, ne l’ont jamais dit. J’ai honte de faire pareille chose. Parce que j’ai mes parents à Fass. En ces temps-là, on ne voyait pas un lutteur percevoir un million de francs. Alors que moi, j’avais en ma possession beaucoup de taxis. Tous les taxis qui me transportaient lors des combats de lutte, sont les miens. Donc, s’ils disent que je bouffais l’argent de l’écurie Fass, ils racontent des bobards, et ne connaissent pas qui est Moussa Gning.
Donc, vous confirmez ceux qui disent que vous veniez beaucoup en aide aux lutteurs de l’écurie Fass, lors de leurs combats ?
Pour en savoir plus, il faut aller demander aux lutteurs que j’accompagnais. Ils peuvent te dire comment je vivais avec eux. Quand on allait voir un marabout, celui-ci disait qu’on devait lui remettre une somme d’argent. C’est moi qui décaissais. Et en général, ce je donnais au marabout était plus colossal que ce que l’écurie me donnait. Par exemple, il arrivait que le marabout nous demande 100 mille francs, dans un premier temps. Puis 200 mille francs. Et c’est moi qui donnais ces deux cent mille. Cela veut tout simplement dire que j’y perdais beaucoup d’argent. Aujourd’hui, ils ont peur. Ils ne savent plus quoi faire. C’est pourquoi, ils disent tout cela.
Quel est le plus grand cachet que vous avez reçu après avoir engagé un lutteur ?
Le plus grand cachet que j’ai reçu après avoir engagé un lutteur, c’était entre Gris Bordeaux et Baboye. Cela avoisinait les 90 millions, et depuis lors, il n’a plus reçu un cachet aussi costaud...
« Entre Gris et moi, laissons Dieu juger »
Quel est réellement votre problème avec Gris bordeaux ?
Je crois que Gris est un lutteur, je suis un encadreur. Je ne veux pas polémiquer sur cela. « Yague bayéwoul Dara » (L’avenir nous édifiera). Dans la mesure où ce qu’il pense est très différent de la réalité. Laissons Dieu juger…
Des gens disent qu’il manque à Gris quelqu’un comme toi, pour relancer sa carrière ?
Ce que je peux vous dire, est que je faisais beaucoup de choses pour lui. Et pour d’autres personnes autres que lui. Je le faisais pour Mbaye Guèye, Tapha Guèye, Toubabou Dior… Ce que je faisais, peut-être que tout le monde peut le faire. Mais, la différence est qu’il y avait la main de Dieu. C’est lui qui fait et qui défait. Il m’avait procuré beaucoup de victoires. Et même si je reviens, peut-être que Dieu ne vas plus exhausser les prières. Qui sait. « Pour le mystique, je dépensais le double ou le triple de ce que je recevais… »
Les gens sont allés jusqu’à dire que lors de son combat avec Bombardier, vous avez beaucoup contribué à sa victoire ?
Lors de ce combat, je vais vous le dire aujourd’hui, je suis parti dans des lieux où je ne vais plus jamais partir. Jamais ! Je ne vais plus jamais le faire pour un lutteur. Parce que quand le lutteur te donne une somme pour aller chercher du mystique, et que tu y ajoutes le double ou le triple de ce qu’il t’a donné, c’est difficile. Je l’ai fait parce que j’en faisais une affaire personnelle, un challenge. Mais si c’était à refaire, je ne vais plus jamais le refaire.
Pouvez-nous raconter une anecdote lors de ce combat. Quelque chose que vous avez vécu et que vous regrettez ?
Il y en a beaucoup. J’ai oublié peut-être certaines choses. J’en avais expliqué un bout dans un journal de la place. C’est du passé. Mais, je dois dire qu’il y a des choses que vous ne pouvez faire que pour quelqu’un qui vous est cher. Par exemple, lors de ce combat (Gris - Bombardier) je suis allé en pleine mer pour y noyer une chèvre et un mouton vivants, bien attachés. C’était un sacrifice. Si c’était à refaire, je ne le referais plus. Je prie le bon Dieu de me pardonner pour ce geste, et d’autres dont je ne voudrais pas parler ici. Mais c’est à cause de lui que je l’ai fait, pour qu’il gagne. Mais, Ndadié sou Nekhé Tass, sous Nakharé Tasse (il se répète suivi de rires).
Peut-on en savoir un peu sur le secret du défi qui vous a été lancé par Tapha Guèye et Gris Bordeaux, lors d’une des réunions de votre écurie ?
Moustapha Guèye et Gris Bordeaux m’ont lancé un défi, pour fouetter mon orgueil et me doper, afin de redoubler d’effort pour le combat contre Bombardier. Il y a des choses, quand on vous les dit, en tant que « Ngor », tu ne peux plus te retenir. Lors de cette réunion, les membres présents m’ont interpellé par rapport au combat, je n’ai pas voulu parler. Au second tour de table, Gris Bordeaux m’interpelle : « Grand, si tu m’aides comme tu le faisais avec Tapha Guèye, je sortirais de cette confrontation avec une victoire ». Les gens m’ont dit de répondre. J’ai dit non. C’est à ce moment que Tapha Guèye a pris la parole pour me dire : « Grand, la victoire de Gris sur Bombardier repose sur toi, si tu l’aides, il battra Bombardier ». Alors, j’en ai fait une affaire personnelle. Et j’ai dit à Gris Bordeaux, devant l’assistance, d’aller s’entraîner, et de ne pas se préoccuper des choses mystiques ; que tout sera à ma charge. Je lui ai dit que le jour du combat, il verra si c’est le même Bombardier qu’il a l’habitude de voir dans les combats. Il ne sera pas le même que celui qui a battu Tapha Guèye et Zale Lô.
C’est cette motivation qui vous a poussé à dépenser autant d’argent sur ce combat ?
Je suis de Ndakarou, mes grands parents viennent de Yoff. S’y ajoute, j’ai joué à la Ja, au Jaraaf et à l’Us Rail. On a été en finale de la coupe du Sénégal avec la Ja qui nous a battus. Tous ceux qui m’ont connu, le sont par le biais du sport. Si je dois me mettre au devant pour ce qui concerne Fass, je dois le faire avec mon courage et sans arrière-pensée. La seconde chose qui m’a motivé lors de ce combat, c’est que ma mère est restée 45 ans sans venir au Sénégal, et le combat a coïncidé avec son retour des Usa. Elle m’a remis 800.000 FCFA, et a exhorté mes six frères établis au pays de l’Oncle Sam d’en faire de même. Chacun d’eux m’a envoyé 800.000 FCFA par la banque Western Union qui se trouve à Fass, via la carte d’identité d’Alassane Diakhaté, un membre de l’écurie. Je ne regrette rien de l’argent que j’ai dépensé pour ce combat ; et si c’était à refaire, je le referais.
Peut-on s’attendre au retour de Moussa Gning à Fass ?
Mais je ne suis pas parti de Fass. Si changement il y a, c’est que je ne descends plus dans l’enceinte, mais personne ne peut me sortir de Fass. Je participe à tout ce qu’ils font. Actuellement, quand l’écurie obtient une victoire, tous les gens que je rencontre au stade ou en dehors me félicitent. Cela prouve que mon nom s’identifie à cette écurie ; et cela, personne n’y peut rien. Beaucoup de grands lutteurs viennent me courtiser pour les épauler dans leur combat, mais je leur dis que je suis et resterai toujours à Fass.
On dit qu’il se pourrait que vous soyez de retour pour coacher un autre lutteur de Fass ?
C’est possible, une partie de ma modeste personne m’appartient, et l’autre appartient à mes amis. Je ne suis pas un lutteur, mais les lutteurs ne sont pas plus populaires que moi dans l’arène. Il m’arrive parfois d’aller dans un milieu et de fuir à cause des gens qui viennent vers moi. J’ai des amis partout à travers le pays, des hautes personnalités, des dignitaires religieux etc. Peut-être, le fait que des gens me sollicitent pour retourner avec un lutteur pourrait s’avérer fructueux, et me permettre de coacher quelqu’un. Mais auparavant, j’aurai encore à en discuter avec ma famille, qui a beaucoup souffert de mes activités. Je vous ferai encore une confidence, lors du combat entre Gris Bordeaux- Bombardier, toute ma famille est restée malade après le combat, à cause des choses mystiques qui se préparaient chez moi. Sur la véranda là-bas (il désigne un coin de chez lui) étaient exposés, couteaux, coupe-coupe, et autres « haliwa » en fer sur des fourneaux que les membres de ma famille étaient chargés de bouillir. Je suis de Fass, je ne connais que Fass, et jamais je ne la quitterai pour une autre écurie.
Le fait d’avoir duré dans l’arène, vous a certainement permis de connaître tous les marabouts ou la quasi-totalité des marabouts du pays ?
Vous savez, en matière de football, les diplômés effectuent un recyclage. C’est le même cas de figure au niveau de la lutte. Car, il va arriver un moment où le lutteur doit augmenter ses connaissances en matière de marabouts, et ne pas se contenter de ceux avec qui on a l’habitude de travailler. Les choses évoluent. Pour la préparation d’un combat, avant d’aller chercher ailleurs, je fais le tour de la région du Cap-Vert, avant d’aller en Casamance, plus précisément à Helinkine d’où sont originaires mes grands parents. Et de venir à Dakar en passant par Banjul, du côté maternel. La mère de mon père est d’origine Soussou. Elle vient de la Guinée Conakry. Je suis un homme métissé, qui connaît les coins et recoins du pays. Je connais les lieux où se trouvent les bons marabouts.
(L'office).