Quand la mémoire va ramasser du bois mort, elle rapporte le fagot qui lui plait
Cette boutade n’est pas de moi mais de Birago Diop l’un des pères spirituels des écrivains du Sénégal.
Ce soir , loin de l’imaginaire et de l’irréel, Je vais vous entretenir en toute vérité de la vie fascinante de ma sœur et amie Madame Mbacké : Mame Younouss Dieng
Il n’ya de beau que le vrai dit un vers respecté et j’en déduis que rien n’est beau sans vérité.
Cette grande dame imbue de fortes valeurs citoyennes est le modèle de femme positive, courageuse et respectable .Elle incarne des qualités exceptionnelles héritage de sa mère Adja Sagar Mbaye première femme élue en 1978 Première Adjointe au Maire de Tivaouane. Pétrie de pudeur et de dignité elle fut à ses côtés le rempart de sa survie morale, malgré ses doutes et ses interrogations d’adolescente. L’attention portée par cette dernière sur elle sera couronnée par son admission au certificat d’étude primaire en 1955 alors qu’elle était élève en classe de CM1.
Mame Younouss tire son inspiration de son Cayor profond mais surtout de Tivaouane sa ville natale, ancien terroir des Tiédos, devenu le sanctuaire de la Tidjania grâce au travail fécondant du vénéré Cheikh Seydi Elhadj Malick Sy depuis son installation en 1902.
Dans ses romans : Aawo bi ou l’ombre en feu ses héroïnes restent des femmes fortes, mais chevillées à leur culture qu’elles transmettent à la postérité.
Mame Younouss répercute ainsi sans haine, mais en échos retentissants, toutes les voix étranglées de ses sœurs opprimées souvent maintenues dans des moules d'évolution dépassées ; ses sœurs aux têtes bourdonnantes de maternités prolongées.
Un plaidoyer poignant qui laisse apparaitre la faiblesse physiologique de la femme à côté d’un courage inébranlable devant l’épreuve.
Des épreuves qu’elle connaît en tant que mère.
Une femme devient mère dans l'éclatement de sa chair. C'est là tout le réalisme de notre expression : "Doom neexul dafa meeti" (un enfant tient la douleur).
"dafa meeti", la vigilance aiguë et le potentiel de dévouement qui vont faire d'un amas de chair articulée sans défense et sans pensée, un homme ou une femme aimé , respecté et porteur d’espoirs.
« Dafa meeti » la Patience requise pour enfouir dans ce terrain malléable, propice à toutes les semences, les seules graines valables de la morale universelle.
Son engagement et son dévouement dans les combats pour l’émancipation de la femme sénégalaise se sont toujours révélés dans plusieurs mouvements associatifs qu’elle eut à diriger.
Ce n’est pas gratuit ni hasardeux qu’elle ait choisie la carrière enseignante depuis 1960 : c’elle « de former des cœurs et des esprits», ni également d’être membre fondateur du Syndicat National de l’enseignement Laïc du Sénégal SYNELS en 1961. En fouillant les arcanes de l’histoire, l’Archiviste que je suis trouve qu’elle tient cet héritage de son grand père Mody Mbaye.
Qui est Mody Mbaye
Né le 13 aout 1871 à Saint- louis, il avait été en 1893, le premier Sénégalais à qui ait été délivré le Brevet élémentaire , ce modeste instituteur allait faire trembler quelques années plus tard non seulement Henri COR Le Gouverneur du Sénégal mais également le gouverneur général William Ponty et même le Ministre des colonies. Mody Mbaye fut le premier contestataire sénégalais, le premier cadre à refuser l’arbitraire et les incohérences de l’administration coloniale à une époque où l’on pouvait payer toute velléité de rébellion de sa liberté, voire de sa vie. Il fut un détonateur et plus que tout autre, il a aidé à créer dans les pays de protectorat un climat de trouble annonciateur de l’éveil politique.
Blaise Diagne qui entreprend en 1914 la conquête du siège du Sénégal au parlement français trouve en Mody Mbaye un appui efficace qui l’introduit au prés de Galandou Diouf et du Mouvement des jeunes Sénégalais fondé en 1912 : par de Thiécouta Diop, Lamine Gueye, papa Mar Diop, Ibrahima Boye et consort. Au soir du deuxième tour le 10 mai 1914, Blaise Diagne était élu premier Député noir né au Sénégal.
Musulmane pratiquante, Sa ferveur en l’islam lui vient de son père Cheikh Balla Nar Dieng un grand adepte du vénéré Cheikh Saad Bou Aby. Il était également son ambassadeur attitré auprès de la famille de Seydi Elhadj Malick Sy .Cette confiance lui valut la fonction de Trésorier général dans le premier Dahira formé dans la sainte ville sous l’égide de Serigne Babacar Sy.
Dés 1961 alors qu’aucune langue n’est encore codifiée, elle prit l’initiative et le courage de traduire en wolof l’hymne national du Sénégal, une action citoyenne pour un éveil collectif de la conscience des Sénégalais face à leur destin, alors qu’ailleurs en Afrique on rythmait l’indépendance avec la Rumba.
le développement des langues nationales sera l’occasion de publier en 1985 « Jenner », un recueil de poèmes puis « Aawo bi » en 1992 le premier roman sénégalais en wolof.
En 2004, elle est Co-traductrice en wolof du roman de Mariama Bâ « Une si longue lettre ».
Son penchant pour la littérature en langue nationale n’est qu’une volonté de partager avec ses concitoyens analphabètes ses connaissances acquises par ce support dont parlait George Duhamel faisant du livre « un commerce entre l’auteur, le lecteur et les autres lecteurs ».
Mame Younouss est très profondément attachée à Keur Sala Derguene ,ce terroir du cayor d’où est originaire son père qui forme avec Gatti Ngaraff, xawlu et Souger la contrée de Keur Moussé Mboré où est issu Moussé Boury Ndéguène Codou djewrigne Mboul . Celui qui par son sens de l’honneur et de fidélité à l’endroit du Damel Samba Laobé fall , parti à la bataille de Guilé sur son cheval « SIRATTE » et en revint mortellement blessé .
Sa carrière d’enseignante a été élogieuse, trente-cinq années d’activité dans la fonction publique où elle eut les meilleures joies de sa vie « former des cœurs et des esprits »
Tout le sens de sa mission éducative reposait essentiellement sur les valeurs de cette lettre de Jules Ferry du 17 novembre 1886 adressée aux Instituteurs « Vous êtes l’auxiliaire et à certains égards le suppléant du père de famille. Devant ces tourments de notre société ou chaque jour apporte son cortège de questionnement sur le sens de notre destin, vous restez notre espoir que les règles universelles de la morale seront les seules graines que vous sèmeriez sur les consciences de ces êtres innocents qui sont vos enfants. »
Epouse tendre, bonne mère de famille fervente talibé attachée à la voie de khadimou Rassoul, Mame Younouss reste solidement ancrée dans sa culture où les seules vertus qui élèvent l’homme sont la dignité, l’honneur le respect de la parole donnée, l’esprit du partage et de solidarité dans la discrétion.
Dans l’ombre en feu, son dernier roman plébiscité premier prix littéraire Sedar Birago des lycées du Sénégal en 2008, Lilyan kesteloot, ce grand critique nous dit « Ecrit dans un style conventionnel, mais très réaliste, très précis, très fouillé, le roman ne fait grâce ni d’une plainte ni d’une larme, on en sort tout de même assez bouleversé pour pleurer.»
Déjà honorée en 1992 du grade de chevalier dans l’ordre national du lion
Et des palmes académiques ;
En 2003, Chevalier des Arts et des Lettres, l’hommage qui vous ait rendu ce soir est bien méritée, la Nation vous distingue de nouveau et exalte devant vos pairs, vos parents et compagnons vos qualités de femme exceptionnelle qui a tout donné a son pays et qui constitue admirablement un model pour les générations.
Nous sommes en fête pour dire avec votre sœur Mariama Ba « mon cœur est en fête à chaque fois qu’une femme émerge de l’ombre »
Ma sœur continue de vivre car ta vie a un sens
Foire internationale de Dakar
Le Dimanche 15 Novembre 2015
Cette boutade n’est pas de moi mais de Birago Diop l’un des pères spirituels des écrivains du Sénégal.
Ce soir , loin de l’imaginaire et de l’irréel, Je vais vous entretenir en toute vérité de la vie fascinante de ma sœur et amie Madame Mbacké : Mame Younouss Dieng
Il n’ya de beau que le vrai dit un vers respecté et j’en déduis que rien n’est beau sans vérité.
Cette grande dame imbue de fortes valeurs citoyennes est le modèle de femme positive, courageuse et respectable .Elle incarne des qualités exceptionnelles héritage de sa mère Adja Sagar Mbaye première femme élue en 1978 Première Adjointe au Maire de Tivaouane. Pétrie de pudeur et de dignité elle fut à ses côtés le rempart de sa survie morale, malgré ses doutes et ses interrogations d’adolescente. L’attention portée par cette dernière sur elle sera couronnée par son admission au certificat d’étude primaire en 1955 alors qu’elle était élève en classe de CM1.
Mame Younouss tire son inspiration de son Cayor profond mais surtout de Tivaouane sa ville natale, ancien terroir des Tiédos, devenu le sanctuaire de la Tidjania grâce au travail fécondant du vénéré Cheikh Seydi Elhadj Malick Sy depuis son installation en 1902.
Dans ses romans : Aawo bi ou l’ombre en feu ses héroïnes restent des femmes fortes, mais chevillées à leur culture qu’elles transmettent à la postérité.
Mame Younouss répercute ainsi sans haine, mais en échos retentissants, toutes les voix étranglées de ses sœurs opprimées souvent maintenues dans des moules d'évolution dépassées ; ses sœurs aux têtes bourdonnantes de maternités prolongées.
Un plaidoyer poignant qui laisse apparaitre la faiblesse physiologique de la femme à côté d’un courage inébranlable devant l’épreuve.
Des épreuves qu’elle connaît en tant que mère.
Une femme devient mère dans l'éclatement de sa chair. C'est là tout le réalisme de notre expression : "Doom neexul dafa meeti" (un enfant tient la douleur).
"dafa meeti", la vigilance aiguë et le potentiel de dévouement qui vont faire d'un amas de chair articulée sans défense et sans pensée, un homme ou une femme aimé , respecté et porteur d’espoirs.
« Dafa meeti » la Patience requise pour enfouir dans ce terrain malléable, propice à toutes les semences, les seules graines valables de la morale universelle.
Son engagement et son dévouement dans les combats pour l’émancipation de la femme sénégalaise se sont toujours révélés dans plusieurs mouvements associatifs qu’elle eut à diriger.
Ce n’est pas gratuit ni hasardeux qu’elle ait choisie la carrière enseignante depuis 1960 : c’elle « de former des cœurs et des esprits», ni également d’être membre fondateur du Syndicat National de l’enseignement Laïc du Sénégal SYNELS en 1961. En fouillant les arcanes de l’histoire, l’Archiviste que je suis trouve qu’elle tient cet héritage de son grand père Mody Mbaye.
Qui est Mody Mbaye
Né le 13 aout 1871 à Saint- louis, il avait été en 1893, le premier Sénégalais à qui ait été délivré le Brevet élémentaire , ce modeste instituteur allait faire trembler quelques années plus tard non seulement Henri COR Le Gouverneur du Sénégal mais également le gouverneur général William Ponty et même le Ministre des colonies. Mody Mbaye fut le premier contestataire sénégalais, le premier cadre à refuser l’arbitraire et les incohérences de l’administration coloniale à une époque où l’on pouvait payer toute velléité de rébellion de sa liberté, voire de sa vie. Il fut un détonateur et plus que tout autre, il a aidé à créer dans les pays de protectorat un climat de trouble annonciateur de l’éveil politique.
Blaise Diagne qui entreprend en 1914 la conquête du siège du Sénégal au parlement français trouve en Mody Mbaye un appui efficace qui l’introduit au prés de Galandou Diouf et du Mouvement des jeunes Sénégalais fondé en 1912 : par de Thiécouta Diop, Lamine Gueye, papa Mar Diop, Ibrahima Boye et consort. Au soir du deuxième tour le 10 mai 1914, Blaise Diagne était élu premier Député noir né au Sénégal.
Musulmane pratiquante, Sa ferveur en l’islam lui vient de son père Cheikh Balla Nar Dieng un grand adepte du vénéré Cheikh Saad Bou Aby. Il était également son ambassadeur attitré auprès de la famille de Seydi Elhadj Malick Sy .Cette confiance lui valut la fonction de Trésorier général dans le premier Dahira formé dans la sainte ville sous l’égide de Serigne Babacar Sy.
Dés 1961 alors qu’aucune langue n’est encore codifiée, elle prit l’initiative et le courage de traduire en wolof l’hymne national du Sénégal, une action citoyenne pour un éveil collectif de la conscience des Sénégalais face à leur destin, alors qu’ailleurs en Afrique on rythmait l’indépendance avec la Rumba.
le développement des langues nationales sera l’occasion de publier en 1985 « Jenner », un recueil de poèmes puis « Aawo bi » en 1992 le premier roman sénégalais en wolof.
En 2004, elle est Co-traductrice en wolof du roman de Mariama Bâ « Une si longue lettre ».
Son penchant pour la littérature en langue nationale n’est qu’une volonté de partager avec ses concitoyens analphabètes ses connaissances acquises par ce support dont parlait George Duhamel faisant du livre « un commerce entre l’auteur, le lecteur et les autres lecteurs ».
Mame Younouss est très profondément attachée à Keur Sala Derguene ,ce terroir du cayor d’où est originaire son père qui forme avec Gatti Ngaraff, xawlu et Souger la contrée de Keur Moussé Mboré où est issu Moussé Boury Ndéguène Codou djewrigne Mboul . Celui qui par son sens de l’honneur et de fidélité à l’endroit du Damel Samba Laobé fall , parti à la bataille de Guilé sur son cheval « SIRATTE » et en revint mortellement blessé .
Sa carrière d’enseignante a été élogieuse, trente-cinq années d’activité dans la fonction publique où elle eut les meilleures joies de sa vie « former des cœurs et des esprits »
Tout le sens de sa mission éducative reposait essentiellement sur les valeurs de cette lettre de Jules Ferry du 17 novembre 1886 adressée aux Instituteurs « Vous êtes l’auxiliaire et à certains égards le suppléant du père de famille. Devant ces tourments de notre société ou chaque jour apporte son cortège de questionnement sur le sens de notre destin, vous restez notre espoir que les règles universelles de la morale seront les seules graines que vous sèmeriez sur les consciences de ces êtres innocents qui sont vos enfants. »
Epouse tendre, bonne mère de famille fervente talibé attachée à la voie de khadimou Rassoul, Mame Younouss reste solidement ancrée dans sa culture où les seules vertus qui élèvent l’homme sont la dignité, l’honneur le respect de la parole donnée, l’esprit du partage et de solidarité dans la discrétion.
Dans l’ombre en feu, son dernier roman plébiscité premier prix littéraire Sedar Birago des lycées du Sénégal en 2008, Lilyan kesteloot, ce grand critique nous dit « Ecrit dans un style conventionnel, mais très réaliste, très précis, très fouillé, le roman ne fait grâce ni d’une plainte ni d’une larme, on en sort tout de même assez bouleversé pour pleurer.»
Déjà honorée en 1992 du grade de chevalier dans l’ordre national du lion
Et des palmes académiques ;
En 2003, Chevalier des Arts et des Lettres, l’hommage qui vous ait rendu ce soir est bien méritée, la Nation vous distingue de nouveau et exalte devant vos pairs, vos parents et compagnons vos qualités de femme exceptionnelle qui a tout donné a son pays et qui constitue admirablement un model pour les générations.
Nous sommes en fête pour dire avec votre sœur Mariama Ba « mon cœur est en fête à chaque fois qu’une femme émerge de l’ombre »
Ma sœur continue de vivre car ta vie a un sens
Foire internationale de Dakar
Le Dimanche 15 Novembre 2015