Hubert Laba Ndao présentait hier son nouveau film à l’Institut Français devant une salle bondée, et le public est resté après la projection pour échanger avec le jeune réalisateur qui s’était déplacé pour la circonstance.
« Dakar-trottoir » est « le récit d’un amour brûlant entre Salla et Sirou, dans l’univers des trottoirs de Dakar. Derrière les façades des quartiers huppés qui côtoient les taudis, le deal est la règle, la grâce côtoie la misère, la sensualité est omniprésente, la violence aussi ». S’y croisent des personnages « surréalistes », l’avocat véreux, le flic ripoux, les filles de joie, le tonton mafieux qui parraine une bande de « dealers », dans une peinture féroce d’une ville d’Afrique aux prises avec les splendeurs et les misères de la modernité.
Entre polar et satire sociale, le film est une chronique urbaine qui a des airs d’un documentaire troublant de réalisme. « Dakar-trottoir » est en V.O, dans un ouolof argotique que le « wouolophone » averti savourera, dont le sous-titrage en français, pourtant bien travaillé, ne parvient pas cependant à rendre toutes les nuances. La photo est magnifique, la musique (signée Awadi) aussi, et les acteurs, bien qu’amateurs pour la plupart, tirent bien leur épingle du jeu.
« Dakar-trottoir », un film « africain » ? Tourné façon « Hollywood », on a du mal à classer l’œuvre d’Hubert Laba Ndao dans cette veine, tellement elle s’inspire d’un certain savoir-faire outre-Atlantique. Mais, peut-être, est-ce là le début d’un nouveau cinéma sur le continent, en rupture totale avec celui des aînés et pionniers, dans l’optique d’une vision plus universelle qui sorte enfin les réalisateurs africains de leur ghetto ?
(Dakar-trottoir, 2013, drame, Sénégal-France, 1h 30, avec Eriq Ebouaney, Charles Corrréa, Ibrahima Mbaye, Prudence Maidou)
Charles Camara