Au 2008 07 30, la mousson avait déjà donné près de 90 mm de pluie sur le bas-delta ndar ndar ! / Depuis le belvédère de Keur Lampsar (15h30), mon ancien pied-à-terre bangotin / Photo par Frédéric Bacuez
* Delta du fleuve Sénégal -
Inactivité persistante de l'hivernage 2014 sur la façade atlantique de l'Afrique occidentale, de la Mauritanie aux confins de la Sierra Leone... Si la remontée du Front Inter Tropical (FIT, ou Front de convergence intertropicale) a bien fonctionné, somme toute, atteignant le nord sahélien en juillet, en revanche les flux de mousson ont un mal fou à déporter leurs amas pluvieux vers le Couchant. Comme si un mur invisible les empêchait de venir arroser les plaines littorales de la Guinée-Bissau, de la Gambie, du Sénégal et de la Mauritanie - sans oublier, au large, les îles assoiffées du Cap-Vert... Le déluge précoce tombé sur le Guidimakha mauritanien et le Damga sénégalais en début de mois, puis les tumultes au-dessus du Gourma malien qui ont (en partie) entraîné la catastrophe aérienne du 24 juillet n'y changent rien. Partout l'hivernage a connu un démarrage tardif, et brutal - après être resté plus que de coutume sur les pays du Golfe de Guinée, en témoignent les inondations et glissements de terrain qui ont endeuillé la métropole ivoirienne d'Abidjan, en juin.
El Nino ne serait pas câlin avec la mousson ouest-africaine, mouais...
Faux espoirs aux tout premiers jours de juillet, à Ndar: brusque hausse de la moiteur, retrait des alizés océaniques, zébrures dans le ciel nocturne du delta; tous ces prémices habituels pour quelques gouttes éparses, ces fameuses 'traces' qui font l'essentiel des relevés pluviométriques sous nos latitudes... excentrées, en particulier à Ndar. Un mois plus tard, le constat est sans nuances: le Ramadan au régime sec, pas d'averse pour rafraîchir les nerfs mis à rude épreuve... De la péninsule du cap Vert aux sebkas de l'Aftout en passant par les Niayes de la Grande Côte et les dunes mortes du Ndiambour, rien, pas un millimètre d'eau ! Du Gandiolais au lac de Guier en passant par les Trois-Marigots, le Ndiaël et le Djoudj, le bas-delta se rétracte sur les marées et sur l'écoulement du fleuve. Le phénomène climatique El Nino (changement des températures océaniques de surface, modification des courants marins, bouleversement des flux pluvieux), qui surgit de l'océan Pacifique à intervalles réguliers, serait la cause de nos difficultés météorologiques sur l'Atlantique oriental. Il y a juste un hic: El Nino n'en est qu'à ses débuts, pour cette session, et ne prendra réellement son ampleur qu'en début d'année 2015; d'autre part, en l'état actuel des connaissances (très partielles) sur le phénomène, El Nino n'affecterait l'Afrique occidentale qu'à la marge (à la différence de l'Afrique australe et orientale). On restera ici suspendu à ces conjectures - et à une hypothétique mansuétude céleste.
Une mousson toujours plus chaotique
Dans le bas-delta du fleuve Sénégal ce ne sera pas la première ni la dernière fois que juillet finira à sec ! En 2007, il avait fallu attendre le 29 du mois pour qu'un grain précédé d'un impressionnant rideau de sables orangés - qu'on appelle en arabe haboob- déverse son premier sceau sur la cité deltaïque. Au 31 juillet 2008 par contre, Saint-Louis et ses environs avaient (déjà) recueilli 89,1 mm - 5,4 mm en juin; 83,7 mm en juillet. En bout de course, pourtant, 2007 avait fini avec 324 mm et 2008 avec 302,6 mm. Comme quoi... Rien n'est jamais perdu pour l'agriculture sahélienne, jusqu'au 10 août (et jusqu'au 20-25 juillet en zone des savanes). Si l'on se réfère aux moyennes pluviométriques* de Saint-Louis, sa norme au 31 juillet est de 44 mm d'eaux - trois pluies, en général: son relevé était de 30,4 mm (cumul 34,1 mm) au dernier jour de juillet 2009 - soit 78% de sa moyenne; et de 101,0 mm en 2010 - soit 230% de cette même norme... Dans le Ferlo, et plus généralement dans le Sahel septentrional, la situation est souvent encore plus imprévisible: on le voit cette année avec les deux inondations qui ont frappé Sélibaby (Mauritanie, 9 et 30 juillet) en ce singulier mois d'hivernage - dont 65 mm hier, lire ICI sur CRIDEM ! Ou, à quelque cent kilomètres au sud des zones affectées par le déluge, la poche de sécheresse absolue qui persiste sur le Ferlo méridional, autour de Ranerou. Dans ce même Ferlo steppique, Linguere, l'autre 'grande' ville de ce royaume d'un intense élevage extensif se souvient peut-être de ses 140,6 mm reçus en une seule averse, ce 30 juillet... 2009 !? Un seul constat, in fine: si au 31 juillet 2010 les stations météorologiques du Sahel sénégalais pulvérisaient leurs moyennes pluviométriques (134% pour Louga à 263% pour Podor), elles sont à la même date toutes largement déficitaires cette année, hormis Matam. Les crapauds jaspés (crapaud panthérin, amiethophrynus/bufo regularis, african toad) s'égosillent pourtant à s'en rompre les cordes vocales...
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