Lisons les mémoires du chroniqueur Tanor Latsoukabé Fall, petit-fils du Damel Makodou Koumba Yandé et diplômé de la Medersah de Saint-Louis, qui témoigne de cette mauvaise gouvernance dans son « Recueil sur la vie des Damels », paru en 1955 et publié dans le Bulletin de l’IFAN, en janvier 1974#.
« Daou Demba fut élu (…) avec beaucoup de difficultés, à cause de sa mauvaise conduite. Dès son jeune âge, il montra les défauts d’un mauvais prince (…) Quand il fut élu Damel, il ne tarda pas à se montrer très méchant envers ses sujets qu’il considérait comme taillables et corvéables à merci (…) Daou Demba disait que toutes les bonnes choses devaient revenir au roi et aux princes, les réjouissances ne convenant pas aux badolo qui en sont indignes (…) Daou Demba avait pour entourage des enfants étourdis et malpolis. Les vieillards étaient exclus de sa cour. Il ne voulait pas écouter leurs conseils. Ce qui lui aliéna la bienveillance de son protecteur Kotya Barma Fall qu’il essaya à plusieurs reprises de destituer de son titre de lamane diamatil, et même de tuer ».
Finalement, le méchant roi fut obligé de quitter le Kayor, chassé par l’hostilité générale et avec le concours de l’Assemblée des notables. Suivant la coutume, l’assemblée des notables se réunissait et se concertait pour destituer le Damel. « Après de multiples précautions et préparatifs », selon Tanor Latsoukabé Fall, « ils battaient le tam tram traditionnel en laissant au Damel le choix suivant: quitter le pays sans délai ou se faire tuer par le peuple soulevé contre lui ». Ainsi le Damel Madior Dior Yasin Issa choisit, en 1766, de partir au Saloum. Tout comme le Tègne du Baol Makodou Kodou Yandé en 1835, il avait été destitué par les notables à cause de sa mauvaise conduite dans sa manière de gouverner. Lorsque le Damel était atteint d’une maladie handicapante, comme c’était le cas de Déthialao Bassin Sow, il était exilé dans une paisible retraite. Cependant tous les Damels sont loin d’être des bourreaux du peuple comme ce contre-exemple de Daou Demba. Ainsi, entres autres souverains du Cayor et du Baol, Makhourédia Diodio (1684-1691), Latsoukabé Ngoné Dièye (1697-1719), Meissa Teinde Wedj (1719-1748) ont gouverné pendant de longues années » dans un calme absolu, furent de bons princes et eurent des conduites exemplaires ». L’expression wolof « Maka Meissa Teindé » est d’ailleurs synonyme de réjouissances et de bonheur.
Revenons à nos faux marquis et roitelets du moment, qui ont auto-proclamé la République du Sénégal comme monarchie républicaine au service de leurs délires et désirs de pouvoir. Soit, tant que le peuple sénégalais y consent par la sincérité des urnes. Ce qui est loin de convaincre les partisans de la thèse de la fraude électorale en 2007. Mais est-il acceptable de laisser accroire que quelque part, dans les lambeaux de l’Etat que nous ont légué Léopold Sédar Senghor et Abdou Diouf, il n’y ait pas une petite voix qui s’indigne, comme Stéphane Hessel (« Indignez-vous ! », janvier 2011, éditions Indigène, Paris)#, qui se souvienne des principes et des valeurs sur lesquels notre République est bâtie, sur lesquels notre société s’est développée, sur lesquels notre démocratie en progression repose ?
Est-il admissible de cautionner que l’on remette aujourd’hui en cause ces principes et ces valeurs de notre société, de notre République, de notre démocratie dans lesquels nous nous reconnaissons et dont nous nous nourrissons ? Peut-on penser que nous nous sommes tous résignés devant la routine de la forfaiture ? Aujourd’hui plus que jamais, nous avons besoin de ces valeurs et de ces principes. Peu nous chaut le régime, ou le parti ou le président que nous aurons au sortir des élections de février 2012, s’il ne devait pas respecter ces valeurs et principes, et les appliquer à son mode de gouvernance.
Nous ne sommes pas fiers de cette République du Sénégal où la règle inique du deux poids deux mesures peut s’abattre sur n’importe quel citoyen et vampiriser n’importe quel acte de gouvernance. C’est un drame lorsque dans un Etat policé comme le Sénégal, le régime PDS au pouvoir peut préméditer une entreprise criminelle sans coup férir. C’est une tragédie pour le Droit lorsqu’un parti au pouvoir peut convoyer, en plein jour, des nervis dans ses propres véhicules, pour commettre, en bande armée motorisée, des agressions physiques, verbales et psychologiques contre des citoyens sénégalais que l’Etat est censé défendre. C’est une farce tragique lorsque, l’Etat, en principe et en théorie impersonnel et équitable, ne s’élève pas, à travers ses différents services policiers, judiciaires, administratifs, contre les dérives et actes d’un régime politique aux antipodes de la bonne gouvernance et de la transparence.
Au contraire, nous voyons une immixtion et une ingérence des autorités de la République, Chef de l’Etat, Premier ministre, ministre de l’Intérieur, dans l’enquête qui est en cours. Ils ont violé le secret de l’instruction et désigné publiquement le coupable, avant même que la Justice ne se soit prononcée, omettant la responsabilité de leur parti: deux poids, deux mesures dans le traitement de l’affaire. A cet égard, la réaction de l’Union des magistrats du Sénégal, invitant ses collègues à faire preuve d’impartialité, d’indépendance et de diligence dans le traitement des dossiers- donc à respecter leur serment- est salutaire et courageuse. L’opinion publique a apprécié positivement et salué cet engagement à résister à toute forme de pression, à s’opposer à toute immixtion dans le fonctionnement de la justice et à garantir les droits et libertés.
Dans cette République du Sénégal, phare de la démocratie en Afrique, il a été possible d’envoyer des nervis, payés au lance-pierres et recrutés dans les couches les plus déshéritées de la banlieue dakaroise, agresser un chef de parti d’opposition, professeur d’Université et ancien ministre, un leader de la société civile, activiste des droits de l’Homme et ancien professeur d’Université lui-aussi, et contre un jeune leader de l’opposition, élu et maire de l’arrondissement de Sacré-Cœur-Mermoz. L’historien Abdoulaye Bathily, le littéraire Alioune Tine n’ont pas eu le malheur de faire face à leurs assaillants armés par le parti au pouvoir. Les conséquences les plus fâcheuses ont touché Barthélemy Dias, secrétaire général des Jeunesses socialistes, particulièrement ciblé par le PDS qui l’accuse régulièrement de tous les maux d’Israël.
L’impunité règne depuis l’agression de l’opposant et leader de parti Talla Sylla, dont les conclusions claires et nominatives de l’enquête de la gendarmerie, ont été enterrées par l’administration aux ordres de l’Etat-PDS. En décembre 2011 également, l’enquête policière de l’Etat du Sénégal n’a pas su résister à la règle inique du deux poids deux mesures. Les agresseurs et leurs commanditaires bénéficient de la bienveillance de la justice ou de l’application la plus clémente des règles du Droit, tandis que celui qui est agressé subit l’application la plus rigoureuse et la moins clémente de la justice. Les lampistes de la banlieue sont mis aux arrêts, les commanditaires sont complaisamment invités à se présenter devant la police quand ils le voudront bien parce qu’ils le valent bien. La victime de l’agression des nervis du PDS, qui a échappé à une tentative de mort certaine, est en prison alors qu’il présente toutes les garanties de représentation. Cherchez l’erreur.
Au Sénégal, des sambaboye# (cf. Chambonneau, directeur de la concession du Sénégal, dans la deuxième expédition au Galam, 23 juin 1665, in P.Cultru 1913 : 35 et 66) peuvent tuer, agresser, commettre des délits en toute impunité du moment que les commanditaires émargent au parti au pouvoir et les protègent. Cela nous rappelle furieusement le fabuleux destin des assassins de Me Babacar Sèye, vice-président du Conseil constitutionnel, qui vaquent la clope au bec, les mains dans les poches, sifflotant presque. Du déjà vu : escadron de la mort, arbitraire, impunité, anarchie. Quelqu’un peut-il nous expliquer les raisons d’une minute de silence, en plein congrès du PDS, pour un agresseur dont on n’est pas le commanditaire et que l’on nie connaître ensuite? Les Jambars de l’armée sénégalaise, qui sont tombés comme des mouches en décembre 2011 en Casamance, attendent toujours leur minute de silence.
Dans l’agression d’un élu et d’une mairie, c’est-à-dire une institution qui est un démembrement de l’Etat, la République du Sénégal incarnée par Me Wade et dirigée par le PDS, s’est attaquée à ses propres intérêts en s’attaquant à un maire élu et à un bâtiment officiel. Il est constant que Barthélemy Dias a été agressé dans l’exercice de ses fonctions en tant qu’officier du service public et agent de l’Etat, et qui plus est dans une institution de l’Etat. Ce faisant, la République du Sénégal de notre président bien aimé s’est attaquée au libre arbitre des citoyens sénégalais qui ont librement choisi leur maire. Ce n’est pas le dirigeant des jeunesses socialistes qui a été attaqué, c’est l’élu du peuple. Par ailleurs, le maire de sacré Cœur-Mermoz, est un « enfant » du PDS, car ne l’oublions pas, son père Jean-Paul Dias, est un ancien apparatchik et ministre du PDS dans le gouvernement d’union nationale sous le président Abdou Diouf. Les valeurs morales n’étouffent même pas les libéraux car ils n’ont pas hésité à s’attaquer à la chair de leur ancien « frère », fût-il maintenant leader socialiste. Le Pr Bathily, lui, n’a pas nié l’Histoire, qui a rappelé que le maire de Sacré Cœur-Mermoz est d’abord un fils pour lui, vu les liens du passé. Ce sont des valeurs fondamentales de la société sénégalaise. C’est ce respect de nos valeurs que nous attendons de nos dirigeants, quelle que soit la couleur de leur parti.
Dans l’agression contre la mairie de Barthélemy Dias, entachée par l’impunité et une justice inéquitable, nous ne pouvons que nous indigner d’un fait : « le pouvoir de l’argent, tellement combattu » par Me Wade lorsqu’il pilotait lui-même sa 205 à Paris, « n’a jamais été aussi grand, insolent, égoïste, avec ses propres serviteurs jusque dans les plus hautes sphères de l’Etat »#. S’indigner, c’est aussi résister contre l’oppresseur, comme les administrés du Damel Daou Demba Khourédia Koly l’ont fait avant de le révoquer. S’indigner, c’est s’opposer comme les citoyens du Sénégal l’ont fait le 23 juin 2011 pour révoquer la loi de dévolution monarchique du pouvoir. S’indigner, c’est révoquer l’arrogance et la mauvaise gouvernance dans les municipalités sénégalaises comme les électeurs l’ont fait en mars 2009. S’indigner, c’est désobéir, refuser le silence coupable, résister au pouvoir de l’argent, rejeter l’indifférence face à une vision de l’histoire complètement opposée à nos valeurs et principes, comme le font tant de citoyens anonymes et la jeunesse sénégalaise dans les mouvements M 23 et Y en a marre. S’indigner, c’est choisir comme Barthélemy Dias la vie sur la mort. Qui accepterait de se laisser conduire à l’abattoir sans se révolter ?
Le pouvoir absolu n’appartient qu’à Dieu. Le pouvoir doit être rendu au peuple sénégalais ; une fois que ce pouvoir lui sera rendu, il devra être rendu et exercé en son nom dans la justice, la démocratie, la lutte contre la corruption, le sens de l’intérêt général et la compétence. Nous attendons d’un nouveau régime et de nouveaux dirigeants de mettre un terme à l’Etat parallèle et partisan qui s’est greffé sur l’Etat du Sénégal et sur l’Administration.
Dié Maty FALL
« Daou Demba fut élu (…) avec beaucoup de difficultés, à cause de sa mauvaise conduite. Dès son jeune âge, il montra les défauts d’un mauvais prince (…) Quand il fut élu Damel, il ne tarda pas à se montrer très méchant envers ses sujets qu’il considérait comme taillables et corvéables à merci (…) Daou Demba disait que toutes les bonnes choses devaient revenir au roi et aux princes, les réjouissances ne convenant pas aux badolo qui en sont indignes (…) Daou Demba avait pour entourage des enfants étourdis et malpolis. Les vieillards étaient exclus de sa cour. Il ne voulait pas écouter leurs conseils. Ce qui lui aliéna la bienveillance de son protecteur Kotya Barma Fall qu’il essaya à plusieurs reprises de destituer de son titre de lamane diamatil, et même de tuer ».
Finalement, le méchant roi fut obligé de quitter le Kayor, chassé par l’hostilité générale et avec le concours de l’Assemblée des notables. Suivant la coutume, l’assemblée des notables se réunissait et se concertait pour destituer le Damel. « Après de multiples précautions et préparatifs », selon Tanor Latsoukabé Fall, « ils battaient le tam tram traditionnel en laissant au Damel le choix suivant: quitter le pays sans délai ou se faire tuer par le peuple soulevé contre lui ». Ainsi le Damel Madior Dior Yasin Issa choisit, en 1766, de partir au Saloum. Tout comme le Tègne du Baol Makodou Kodou Yandé en 1835, il avait été destitué par les notables à cause de sa mauvaise conduite dans sa manière de gouverner. Lorsque le Damel était atteint d’une maladie handicapante, comme c’était le cas de Déthialao Bassin Sow, il était exilé dans une paisible retraite. Cependant tous les Damels sont loin d’être des bourreaux du peuple comme ce contre-exemple de Daou Demba. Ainsi, entres autres souverains du Cayor et du Baol, Makhourédia Diodio (1684-1691), Latsoukabé Ngoné Dièye (1697-1719), Meissa Teinde Wedj (1719-1748) ont gouverné pendant de longues années » dans un calme absolu, furent de bons princes et eurent des conduites exemplaires ». L’expression wolof « Maka Meissa Teindé » est d’ailleurs synonyme de réjouissances et de bonheur.
Revenons à nos faux marquis et roitelets du moment, qui ont auto-proclamé la République du Sénégal comme monarchie républicaine au service de leurs délires et désirs de pouvoir. Soit, tant que le peuple sénégalais y consent par la sincérité des urnes. Ce qui est loin de convaincre les partisans de la thèse de la fraude électorale en 2007. Mais est-il acceptable de laisser accroire que quelque part, dans les lambeaux de l’Etat que nous ont légué Léopold Sédar Senghor et Abdou Diouf, il n’y ait pas une petite voix qui s’indigne, comme Stéphane Hessel (« Indignez-vous ! », janvier 2011, éditions Indigène, Paris)#, qui se souvienne des principes et des valeurs sur lesquels notre République est bâtie, sur lesquels notre société s’est développée, sur lesquels notre démocratie en progression repose ?
Est-il admissible de cautionner que l’on remette aujourd’hui en cause ces principes et ces valeurs de notre société, de notre République, de notre démocratie dans lesquels nous nous reconnaissons et dont nous nous nourrissons ? Peut-on penser que nous nous sommes tous résignés devant la routine de la forfaiture ? Aujourd’hui plus que jamais, nous avons besoin de ces valeurs et de ces principes. Peu nous chaut le régime, ou le parti ou le président que nous aurons au sortir des élections de février 2012, s’il ne devait pas respecter ces valeurs et principes, et les appliquer à son mode de gouvernance.
Nous ne sommes pas fiers de cette République du Sénégal où la règle inique du deux poids deux mesures peut s’abattre sur n’importe quel citoyen et vampiriser n’importe quel acte de gouvernance. C’est un drame lorsque dans un Etat policé comme le Sénégal, le régime PDS au pouvoir peut préméditer une entreprise criminelle sans coup férir. C’est une tragédie pour le Droit lorsqu’un parti au pouvoir peut convoyer, en plein jour, des nervis dans ses propres véhicules, pour commettre, en bande armée motorisée, des agressions physiques, verbales et psychologiques contre des citoyens sénégalais que l’Etat est censé défendre. C’est une farce tragique lorsque, l’Etat, en principe et en théorie impersonnel et équitable, ne s’élève pas, à travers ses différents services policiers, judiciaires, administratifs, contre les dérives et actes d’un régime politique aux antipodes de la bonne gouvernance et de la transparence.
Au contraire, nous voyons une immixtion et une ingérence des autorités de la République, Chef de l’Etat, Premier ministre, ministre de l’Intérieur, dans l’enquête qui est en cours. Ils ont violé le secret de l’instruction et désigné publiquement le coupable, avant même que la Justice ne se soit prononcée, omettant la responsabilité de leur parti: deux poids, deux mesures dans le traitement de l’affaire. A cet égard, la réaction de l’Union des magistrats du Sénégal, invitant ses collègues à faire preuve d’impartialité, d’indépendance et de diligence dans le traitement des dossiers- donc à respecter leur serment- est salutaire et courageuse. L’opinion publique a apprécié positivement et salué cet engagement à résister à toute forme de pression, à s’opposer à toute immixtion dans le fonctionnement de la justice et à garantir les droits et libertés.
Dans cette République du Sénégal, phare de la démocratie en Afrique, il a été possible d’envoyer des nervis, payés au lance-pierres et recrutés dans les couches les plus déshéritées de la banlieue dakaroise, agresser un chef de parti d’opposition, professeur d’Université et ancien ministre, un leader de la société civile, activiste des droits de l’Homme et ancien professeur d’Université lui-aussi, et contre un jeune leader de l’opposition, élu et maire de l’arrondissement de Sacré-Cœur-Mermoz. L’historien Abdoulaye Bathily, le littéraire Alioune Tine n’ont pas eu le malheur de faire face à leurs assaillants armés par le parti au pouvoir. Les conséquences les plus fâcheuses ont touché Barthélemy Dias, secrétaire général des Jeunesses socialistes, particulièrement ciblé par le PDS qui l’accuse régulièrement de tous les maux d’Israël.
L’impunité règne depuis l’agression de l’opposant et leader de parti Talla Sylla, dont les conclusions claires et nominatives de l’enquête de la gendarmerie, ont été enterrées par l’administration aux ordres de l’Etat-PDS. En décembre 2011 également, l’enquête policière de l’Etat du Sénégal n’a pas su résister à la règle inique du deux poids deux mesures. Les agresseurs et leurs commanditaires bénéficient de la bienveillance de la justice ou de l’application la plus clémente des règles du Droit, tandis que celui qui est agressé subit l’application la plus rigoureuse et la moins clémente de la justice. Les lampistes de la banlieue sont mis aux arrêts, les commanditaires sont complaisamment invités à se présenter devant la police quand ils le voudront bien parce qu’ils le valent bien. La victime de l’agression des nervis du PDS, qui a échappé à une tentative de mort certaine, est en prison alors qu’il présente toutes les garanties de représentation. Cherchez l’erreur.
Au Sénégal, des sambaboye# (cf. Chambonneau, directeur de la concession du Sénégal, dans la deuxième expédition au Galam, 23 juin 1665, in P.Cultru 1913 : 35 et 66) peuvent tuer, agresser, commettre des délits en toute impunité du moment que les commanditaires émargent au parti au pouvoir et les protègent. Cela nous rappelle furieusement le fabuleux destin des assassins de Me Babacar Sèye, vice-président du Conseil constitutionnel, qui vaquent la clope au bec, les mains dans les poches, sifflotant presque. Du déjà vu : escadron de la mort, arbitraire, impunité, anarchie. Quelqu’un peut-il nous expliquer les raisons d’une minute de silence, en plein congrès du PDS, pour un agresseur dont on n’est pas le commanditaire et que l’on nie connaître ensuite? Les Jambars de l’armée sénégalaise, qui sont tombés comme des mouches en décembre 2011 en Casamance, attendent toujours leur minute de silence.
Dans l’agression d’un élu et d’une mairie, c’est-à-dire une institution qui est un démembrement de l’Etat, la République du Sénégal incarnée par Me Wade et dirigée par le PDS, s’est attaquée à ses propres intérêts en s’attaquant à un maire élu et à un bâtiment officiel. Il est constant que Barthélemy Dias a été agressé dans l’exercice de ses fonctions en tant qu’officier du service public et agent de l’Etat, et qui plus est dans une institution de l’Etat. Ce faisant, la République du Sénégal de notre président bien aimé s’est attaquée au libre arbitre des citoyens sénégalais qui ont librement choisi leur maire. Ce n’est pas le dirigeant des jeunesses socialistes qui a été attaqué, c’est l’élu du peuple. Par ailleurs, le maire de sacré Cœur-Mermoz, est un « enfant » du PDS, car ne l’oublions pas, son père Jean-Paul Dias, est un ancien apparatchik et ministre du PDS dans le gouvernement d’union nationale sous le président Abdou Diouf. Les valeurs morales n’étouffent même pas les libéraux car ils n’ont pas hésité à s’attaquer à la chair de leur ancien « frère », fût-il maintenant leader socialiste. Le Pr Bathily, lui, n’a pas nié l’Histoire, qui a rappelé que le maire de Sacré Cœur-Mermoz est d’abord un fils pour lui, vu les liens du passé. Ce sont des valeurs fondamentales de la société sénégalaise. C’est ce respect de nos valeurs que nous attendons de nos dirigeants, quelle que soit la couleur de leur parti.
Dans l’agression contre la mairie de Barthélemy Dias, entachée par l’impunité et une justice inéquitable, nous ne pouvons que nous indigner d’un fait : « le pouvoir de l’argent, tellement combattu » par Me Wade lorsqu’il pilotait lui-même sa 205 à Paris, « n’a jamais été aussi grand, insolent, égoïste, avec ses propres serviteurs jusque dans les plus hautes sphères de l’Etat »#. S’indigner, c’est aussi résister contre l’oppresseur, comme les administrés du Damel Daou Demba Khourédia Koly l’ont fait avant de le révoquer. S’indigner, c’est s’opposer comme les citoyens du Sénégal l’ont fait le 23 juin 2011 pour révoquer la loi de dévolution monarchique du pouvoir. S’indigner, c’est révoquer l’arrogance et la mauvaise gouvernance dans les municipalités sénégalaises comme les électeurs l’ont fait en mars 2009. S’indigner, c’est désobéir, refuser le silence coupable, résister au pouvoir de l’argent, rejeter l’indifférence face à une vision de l’histoire complètement opposée à nos valeurs et principes, comme le font tant de citoyens anonymes et la jeunesse sénégalaise dans les mouvements M 23 et Y en a marre. S’indigner, c’est choisir comme Barthélemy Dias la vie sur la mort. Qui accepterait de se laisser conduire à l’abattoir sans se révolter ?
Le pouvoir absolu n’appartient qu’à Dieu. Le pouvoir doit être rendu au peuple sénégalais ; une fois que ce pouvoir lui sera rendu, il devra être rendu et exercé en son nom dans la justice, la démocratie, la lutte contre la corruption, le sens de l’intérêt général et la compétence. Nous attendons d’un nouveau régime et de nouveaux dirigeants de mettre un terme à l’Etat parallèle et partisan qui s’est greffé sur l’Etat du Sénégal et sur l’Administration.
Dié Maty FALL