Les découvertes de gaz au Sénégal ont permis d’estimer « les réserves que nous avons dans le secteur à 910 milliards de mètres cubes (m3), ce qui classe le Sénégal, cinquième pays d’Afrique en matière de réserves et vingt septième pays dans le monde ».
Ce sont les propos de Mamadou Faye, le directeur général de la Société des pétroles du Sénégal (Petrosen). Ce dernier faisait une présentation à l’occasion de la concertation nationale sur le contenu local.
D’où provient ce classement ?
Africa Check n’a pas pu obtenir de Petrosen l’origine du classement sur les réserves mondiales de gaz permettant à son directeur général de mettre le Sénégal à la 27e place mondiale et 5e africaine. Malgré nos multiples tentatives nous n’avons pas eu de réponse.
Notre article sera actualisé si nous obtenons une réponse de Petrosen.
A combien sont estimées les réserves de gaz du Sénégal ?
Dans sa présentation à l’occasion de la concertation nationale sur le contenu local dans le secteur des hydrocarbures, le directeur général de Petrosen a indiqué qu’en s’appuyant sur les différentes découvertes, « les réserves de gaz du Sénégal sont estimées à 910 milliards de mètres cubes ».
Dans sa déclaration, Mamadou Faye prend également en compte le gaz qui pourrait être extrait des puits de pétrole découverts pour établir les réserves de gaz au Sénégal à 910 milliards de m3.
Selon lui, « le début de l’exploitation des hydrocarbures est prévu en 2022 ».
Africa Check a par ailleurs contacté la société BP, qui devrait exploiter deux blocs de gaz signalés au Sénégal : « celui de Saint-Louis Offshore Profond et celui de Cayar Offshore Profond ».
Selon la compagnie, les deux blocs ont, à ce jour, fait l’objet des découvertes suivantes : « Grand Tortue Ahmeyim (Saint-Louis Offshore Profond) avec 15 TCF – Trillion cubic feet, l’unité de mesure de référence pour le gaz – et Yakaar Teranga (Cayar Offshore Profond) qui fait approximativement 15 TCF ».
Le Sénégal au 27e rang mondial en matière de réserves de gaz ?
Africa Check a consulté l’édition 2019 de la Revue statistique de BP sur l’énergie mondiale : BP Statistical Review of World Energy.
Ce document, basé sur des données de 2018, fait un classement mondial des réserves prouvées. Il indique qu’avec 1 375 TCF (environ 38 900 milliards de m3), la Russie arrive en tête du classement mondial des réserves de gaz.
Elle est suivie, dans l’ordre, par l’Iran, le Qatar, le Turkménistan et les Etats-Unis pour composer le top 5. Le Nigeria est le seul pays africain figurant dans le top 10.
Le Sénégal au 5e rang africain ?
Dans la partie Afrique du BP Statistical Review of World Energy on trouve dans l’ordre de grandeur le Nigeria (188,8 TCF), l’Algérie (153,1), l’Egypte (75,5) et la Libye (50,5).
Aucun autre pays africain n’apparaît dans le tableau, mais le rapport indique que le reste de l’Afrique se partage 41,7 TCF, sans préciser de quels pays il s’agit.
Le classement de BP, basé sur des données de 2018, ne fait pas apparaître le Sénégal parmi les pays africains dotés des plus grandes réserves de gaz, ni le Mozambique, pays dans lequel d’importantes découvertes ont été faites ces dernières années.
Dans un article publié le 19 juin 2019, le site de la chaîne française BFM indiquait que le Mozambique dispose de réserves estimées à 5 000 milliards de m3. Cela ferait entrer le Mozambique dans le top 10 mondial et le mettrait à la 2e place africaine juste derrière le Nigeria avec comme conséquence d’exclure le Sénégal d’une potentielle 5e place en Afrique.
Cité dans un article du site français Les Echos, un responsable de Wood Mackenzie, un groupe mondial de conseil et de recherche dans les domaines de l’énergie a indiqué que le Mozambique se classerait dans le « Top 5 » des producteurs mondiaux à la fin des années 2030, derrière les Etats-Unis, le Qatar, l’Australie et la Russie, si les extensions de capacités prévues sont ajoutées.
Des estimations et non des « réserves prouvées » pour le Sénégal
Africa Check a contacté Francis Perrin, spécialiste des problématiques énergétiques, chercheur associé au Policy Center for the New South (PCNS, Rabat) et directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS, Paris).
Selon lui, même si le classement n’est pas faux (27ème au niveau mondial et 5ème au niveau africain), « il est encore un peu tôt pour figer les choses pour le Sénégal car l’exploration n’y est pas très ancienne ». Les estimations actuelles devront être confirmées grâce à de futurs travaux d’exploration.
Il souligne toutefois qu’il est question « de réserves prouvées de gaz naturel dans le classement de BP. Or, aujourd’hui, les estimations pour le Sénégal ne sont pas des réserves prouvées ».
Perrin précise que « si l’on s’en tient seulement aux réserves prouvées, le Sénégal n’est pas dans les 27 premiers détenteurs de réserves prouvées dans le monde ».
Il indique toutefois que « la situation est évolutive et que BP devrait progressivement confirmer un chiffre plus élevé, sans doute beaucoup plus élevé ». « Il ne faut donc pas se focaliser trop sur un classement à ce stade », conclut-il.
Qu’entend-on par réserves ?
Le site spécialisé Connaissances des Energies explique que « les réserves de gaz sont constituées des volumes de gaz naturel récupérables dans des gisements exploités ou pouvant l’être au vu des critères techniques et économiques ».
Le site précise que les réserves « sont qualifiées et classées selon le potentiel économique qu’elles représentent », en réserves prouvées, probables et possibles.
Selon l’ingénieur géologue Fary Ndao, auteur de l’ouvrage L’or noir du Sénégal : comprendre l’industrie pétrolière et ses enjeux au Sénégal, on entend par réserves prouvées « la quantité de pétrole/gaz découvert que l’on est sûr à 90 % de pouvoir produire sous les conditions économiques et techniques du moment ».
« Les réserves probables représentent la quantité de pétrole/gaz que l’on est sûr à 50 % de pouvoir produire », souligne-t-il.
Le site Connaissance des Energies précise à ce sujet que « les réserves probables ont été testées mais ne font pas l’objet d’une production ».
Enfin « les réserves possibles représentent la quantité de pétrole/gaz que l’on est sûr à 10 % de pouvoir produire », indique Fary Ndao.
Conclusion : l’affirmation peut induire en erreur
Le directeur général de la Société des pétroles du Sénégal (Petrosen) a récemment déclaré que les découvertes de gaz au Sénégal placent le pays au 27e rang mondial et au 5e en Afrique en matière de réserves.
Mamadou Faye a avancé le chiffre de 910 milliards de m3, ce qui correspond à peu près à 32 TCF (Trillion Cubic Feet, l’unité de mesure de référence pour le gaz. Cela équivaut à 1 000 milliards de pieds cubes).
En analysant le rapport BP Statistical Review of World Energy 2019, on voit qu’avec ces 32 TCF, le Sénégal se trouve derrière 26 pays dont 4 africains que sont le Nigeria, l’Algérie, l’Egypte et la Libye.
Toutefois selon Francis Perrin, spécialiste du pétrole et du gaz, le classement de BP parle de réserves prouvées alors que les estimations portant sur le Sénégal ne peuvent pas, pour le moment, être considérées comme telles.
Par ailleurs les découvertes de gaz annoncées au Mozambique pourraient bouleverser le classement.
La déclaration du DG de Petrosen peut donc induire en erreur, si l’on sait que les chiffres avancés sont pour le moment considérés comme des estimations et non des réserves prouvées.
Africacheck.org
Ce sont les propos de Mamadou Faye, le directeur général de la Société des pétroles du Sénégal (Petrosen). Ce dernier faisait une présentation à l’occasion de la concertation nationale sur le contenu local.
D’où provient ce classement ?
Africa Check n’a pas pu obtenir de Petrosen l’origine du classement sur les réserves mondiales de gaz permettant à son directeur général de mettre le Sénégal à la 27e place mondiale et 5e africaine. Malgré nos multiples tentatives nous n’avons pas eu de réponse.
Notre article sera actualisé si nous obtenons une réponse de Petrosen.
A combien sont estimées les réserves de gaz du Sénégal ?
Dans sa présentation à l’occasion de la concertation nationale sur le contenu local dans le secteur des hydrocarbures, le directeur général de Petrosen a indiqué qu’en s’appuyant sur les différentes découvertes, « les réserves de gaz du Sénégal sont estimées à 910 milliards de mètres cubes ».
Dans sa déclaration, Mamadou Faye prend également en compte le gaz qui pourrait être extrait des puits de pétrole découverts pour établir les réserves de gaz au Sénégal à 910 milliards de m3.
Selon lui, « le début de l’exploitation des hydrocarbures est prévu en 2022 ».
Africa Check a par ailleurs contacté la société BP, qui devrait exploiter deux blocs de gaz signalés au Sénégal : « celui de Saint-Louis Offshore Profond et celui de Cayar Offshore Profond ».
Selon la compagnie, les deux blocs ont, à ce jour, fait l’objet des découvertes suivantes : « Grand Tortue Ahmeyim (Saint-Louis Offshore Profond) avec 15 TCF – Trillion cubic feet, l’unité de mesure de référence pour le gaz – et Yakaar Teranga (Cayar Offshore Profond) qui fait approximativement 15 TCF ».
Le Sénégal au 27e rang mondial en matière de réserves de gaz ?
Africa Check a consulté l’édition 2019 de la Revue statistique de BP sur l’énergie mondiale : BP Statistical Review of World Energy.
Ce document, basé sur des données de 2018, fait un classement mondial des réserves prouvées. Il indique qu’avec 1 375 TCF (environ 38 900 milliards de m3), la Russie arrive en tête du classement mondial des réserves de gaz.
Elle est suivie, dans l’ordre, par l’Iran, le Qatar, le Turkménistan et les Etats-Unis pour composer le top 5. Le Nigeria est le seul pays africain figurant dans le top 10.
Le Sénégal au 5e rang africain ?
Dans la partie Afrique du BP Statistical Review of World Energy on trouve dans l’ordre de grandeur le Nigeria (188,8 TCF), l’Algérie (153,1), l’Egypte (75,5) et la Libye (50,5).
Aucun autre pays africain n’apparaît dans le tableau, mais le rapport indique que le reste de l’Afrique se partage 41,7 TCF, sans préciser de quels pays il s’agit.
Le classement de BP, basé sur des données de 2018, ne fait pas apparaître le Sénégal parmi les pays africains dotés des plus grandes réserves de gaz, ni le Mozambique, pays dans lequel d’importantes découvertes ont été faites ces dernières années.
Dans un article publié le 19 juin 2019, le site de la chaîne française BFM indiquait que le Mozambique dispose de réserves estimées à 5 000 milliards de m3. Cela ferait entrer le Mozambique dans le top 10 mondial et le mettrait à la 2e place africaine juste derrière le Nigeria avec comme conséquence d’exclure le Sénégal d’une potentielle 5e place en Afrique.
Cité dans un article du site français Les Echos, un responsable de Wood Mackenzie, un groupe mondial de conseil et de recherche dans les domaines de l’énergie a indiqué que le Mozambique se classerait dans le « Top 5 » des producteurs mondiaux à la fin des années 2030, derrière les Etats-Unis, le Qatar, l’Australie et la Russie, si les extensions de capacités prévues sont ajoutées.
Des estimations et non des « réserves prouvées » pour le Sénégal
Africa Check a contacté Francis Perrin, spécialiste des problématiques énergétiques, chercheur associé au Policy Center for the New South (PCNS, Rabat) et directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS, Paris).
Selon lui, même si le classement n’est pas faux (27ème au niveau mondial et 5ème au niveau africain), « il est encore un peu tôt pour figer les choses pour le Sénégal car l’exploration n’y est pas très ancienne ». Les estimations actuelles devront être confirmées grâce à de futurs travaux d’exploration.
Il souligne toutefois qu’il est question « de réserves prouvées de gaz naturel dans le classement de BP. Or, aujourd’hui, les estimations pour le Sénégal ne sont pas des réserves prouvées ».
Perrin précise que « si l’on s’en tient seulement aux réserves prouvées, le Sénégal n’est pas dans les 27 premiers détenteurs de réserves prouvées dans le monde ».
Il indique toutefois que « la situation est évolutive et que BP devrait progressivement confirmer un chiffre plus élevé, sans doute beaucoup plus élevé ». « Il ne faut donc pas se focaliser trop sur un classement à ce stade », conclut-il.
Qu’entend-on par réserves ?
Le site spécialisé Connaissances des Energies explique que « les réserves de gaz sont constituées des volumes de gaz naturel récupérables dans des gisements exploités ou pouvant l’être au vu des critères techniques et économiques ».
Le site précise que les réserves « sont qualifiées et classées selon le potentiel économique qu’elles représentent », en réserves prouvées, probables et possibles.
Selon l’ingénieur géologue Fary Ndao, auteur de l’ouvrage L’or noir du Sénégal : comprendre l’industrie pétrolière et ses enjeux au Sénégal, on entend par réserves prouvées « la quantité de pétrole/gaz découvert que l’on est sûr à 90 % de pouvoir produire sous les conditions économiques et techniques du moment ».
« Les réserves probables représentent la quantité de pétrole/gaz que l’on est sûr à 50 % de pouvoir produire », souligne-t-il.
Le site Connaissance des Energies précise à ce sujet que « les réserves probables ont été testées mais ne font pas l’objet d’une production ».
Enfin « les réserves possibles représentent la quantité de pétrole/gaz que l’on est sûr à 10 % de pouvoir produire », indique Fary Ndao.
Conclusion : l’affirmation peut induire en erreur
Le directeur général de la Société des pétroles du Sénégal (Petrosen) a récemment déclaré que les découvertes de gaz au Sénégal placent le pays au 27e rang mondial et au 5e en Afrique en matière de réserves.
Mamadou Faye a avancé le chiffre de 910 milliards de m3, ce qui correspond à peu près à 32 TCF (Trillion Cubic Feet, l’unité de mesure de référence pour le gaz. Cela équivaut à 1 000 milliards de pieds cubes).
En analysant le rapport BP Statistical Review of World Energy 2019, on voit qu’avec ces 32 TCF, le Sénégal se trouve derrière 26 pays dont 4 africains que sont le Nigeria, l’Algérie, l’Egypte et la Libye.
Toutefois selon Francis Perrin, spécialiste du pétrole et du gaz, le classement de BP parle de réserves prouvées alors que les estimations portant sur le Sénégal ne peuvent pas, pour le moment, être considérées comme telles.
Par ailleurs les découvertes de gaz annoncées au Mozambique pourraient bouleverser le classement.
La déclaration du DG de Petrosen peut donc induire en erreur, si l’on sait que les chiffres avancés sont pour le moment considérés comme des estimations et non des réserves prouvées.
Africacheck.org