Allocution à l’occasion de la Cérémonie de Lancement du Projet de construction de : six salles de classe, un bloc scientifique et une salle informatique, offert par Plan International au Lycée de Mpal/Académie de Saint-Louis
Par Samba Diao
Sociologue - Politiste
Professeur de Philo au Lycée Rawane Ngom de MpaLe Collectif des professeurs du Lycée El Hadj Rawane Ngom, dont je suis le porte-parole, en ma double qualité de professeur et de membre du Conseil de Gestion de l’établissement, vous souhaite la bienvenue à Mpal. Par ma voix, le Collectif vous dit très chaleureusement merci d’avoir répondu si nombreux à l’invitation. Nous voudrions saluer, ici et solennellement, l’engagement constant et oh combien salvateur de l’ONG Plan International et de ses partenaires techniques et financiers, en direction du Lycée de Mpal.
Le responsable régional de Plan et toute son équipe ont été sensibles au manque voire à l’inexistence d’infrastructures dont le lycée souffrait et qui induit une inégalité des chances scolaires. Non satisfaits de nous avoir offert les locaux dont nous disposons actuellement, ils reviennent aujourd’hui encore avec ce projet, qui contribuera à coup sûr à améliorer la qualité des enseignements-apprentissages. Dans le même élan, il convient de saluer les actions conjointes de l’Inspection d’Académie, du Conseil départemental, de la Mairie de Mpal, de l’Association des étudiants de Mpal et, last but not least, du Groupe de mise en œuvre (GMO). Nous sommes heureux de nous joindre à vous aujourd'hui pour participer à cette dynamique, j’allais dire à ce pas pour faire du lycée de Mpal un lycée d’excellence.
Ces efforts conjugués attestent du fait que l’École sénégalaise est notre affaire à nous tous. Parce que la mission de l’école est de dépasser les particularismes, les communautarismes, dirions-nous aujourd’hui, les clivages sociaux et culturels. L’École publique, comme disait Émile Chartier « est universelle parce que le savoir est universel ». Bien que nous ayons à faire face à des difficultés, ne croupissons pas dans la vallée du désespoir. L’enjeu en vaut la peine mesdames et messieurs ; car une société sans une École de qualité est une société vulnérable, je dirais même une société sans âme. Parce que, justement, le but de l’école est de former des hommes et des femmes libres et instruits qui, le moment venu, mettront leurs talents acquis et cultivés au service de la société.
Profitant de la solennité du moment, je voudrais lancer un appel à l’endroit des élèves. Cet appel tient en une phrase clé ; une phrase qui a valeur de programme parce que la jeunesse constitue l’avenir d’une nation. Prenant à témoin cet auguste assemblée, je vous dis ceci : prenez pour modèle, l’intellectuel ; et faites de la recherche du savoir leur crédo. Lorsque je dis « intellectuel » je ne pense pas seulement à celui qui a accumulé des diplômes. Je pense plutôt à l’intellectuel destructeur des évidences, à celui qui repère et indique, dans les inerties et contraintes du présent, les points de faiblesse, à celui qui prend conscience des problèmes de sa société, qui s’en informe et qui s’en inquiète parce qu’il est très attentif au présent.
Nous savons que cela demande beaucoup de courage dans une société ou l’intellectuel et le savoir sont progressivement dévalorisés, au profit de la Lutte, la Musique et la Danse. Cette posture est d’autant plus difficile que notre société est aujourd’hui soumise, pieds et poings liés, à une logique de la consommation à outrance et une culture du spectacle qui met à mal la valeur du savoir et le libre usage de la Raison. La séduction des apparences est partout, subrepticement et ouvertement, jusque dans nos salons. C’est pourquoi nous appelons les parents à redoubler de vigilance et à constituer un rempart contre la culture de la facilité et de la médiocrité qui, si nous n’y prenons garde, risque d’infester l’École sénégalaise.
Parce que le savoir et l’usage de la Raison constituent un rempart contre la domination, sous toutes ses formes, celui qui œuvre pour la transmission du savoir, notamment l’enseignant, risque gros. Comme disait François Chatelet, ce puissant intellectuel à la pensée sagace : « Le risque de l’éducateur est constant, car la corruption de la cité engendre l’inintelligence de la cité ». Socrate, Condorcet, Gramsci, Alleg ont subi respectivement la cigüe, la guillotine, la prison, la torture. Ils nous rappellent opportunément que la tâche de l’intellectuel n’est pas de distribuer l’aménité, mais de dire ce qui est. Aujourd’hui il n’y a plus de ciguë ou de guillotine ; mais, ayons le courage de le dire, il y a une entreprise de diabolisation de l’éducateur et de dévalorisation du savoir à tous les niveaux, qui n’est pas de nature à promouvoir l’École comme moyen de conquête de la Liberté et de la dignité humaine.
Nous avons choisi ce métier et, en conséquence de quoi, nous vous disons ici et solennellement, que nous ne ménagerons aucun effort pour combattre, aux côtés de tous les partenaires du Lycée Rawane Ngom de Mpal, l’ignorance. Nul doute que l’ignorance entrave et diminue l’homme, quel que soit ce qu’il est et ce qu’il possède. Ce combat contre l’ignorance est un défi énorme. Mais, ensemble, nous pouvons le relever ; parce que la vie de l’Esprit ne s’effraie pas devant les difficultés. Ce défi pour une école de qualité, nous devons le relever.
Parce que l’école sénégalaise doit rester ce qu’elle a promis d’être, c’est-à-dire une école républicaine, laïque et gratuite ; une école qui ne soit pas l’instrument d’un parti politique ou d’une classe sociale ; donc une école de la Liberté dans et par laquelle nous ferions l’expérience du bien-vivre-ensemble. Pour y parvenir, chacun de nous doit assumer sa responsabilité. Pour y parvenir, il faudrait que chacun de nous tienne un langage de vérité, sans flagornerie. Mesdames et messieurs, nous devons avoir le courage de cette vérité, dans la recherche des voies et moyens pour sortir l’École sénégalaise, j’allais dire le système éducatif sénégalais, de sa morbidité. Parce que, surtout, une société où l’École et le savoir seraient sacrifiés sous l’autel du spectacle, de l’avoir et des luttes politiciennes, se condamnerait elle-même à un assoupissement et une immobilité béate qui ne diffère pas beaucoup de la mort.
Pour avoir été témoin des actes positifs qui ont été progressivement posés par les uns et les autres en direction du Lycée, de l’engagement du personnel enseignant et administratif, de la diligence dont le Proviseur fait montre et de la participation active des populations de Mpal, j’ose espérer que, ensemble, nous réussirons à faire du Lycée de Mpal un lycée d’excellence. Je vous remercie de votre attention !
SAMBA DIAO, sociologue-politologue, Prof de philo
Par Samba Diao
Sociologue - Politiste
Professeur de Philo au Lycée Rawane Ngom de MpaLe Collectif des professeurs du Lycée El Hadj Rawane Ngom, dont je suis le porte-parole, en ma double qualité de professeur et de membre du Conseil de Gestion de l’établissement, vous souhaite la bienvenue à Mpal. Par ma voix, le Collectif vous dit très chaleureusement merci d’avoir répondu si nombreux à l’invitation. Nous voudrions saluer, ici et solennellement, l’engagement constant et oh combien salvateur de l’ONG Plan International et de ses partenaires techniques et financiers, en direction du Lycée de Mpal.
Le responsable régional de Plan et toute son équipe ont été sensibles au manque voire à l’inexistence d’infrastructures dont le lycée souffrait et qui induit une inégalité des chances scolaires. Non satisfaits de nous avoir offert les locaux dont nous disposons actuellement, ils reviennent aujourd’hui encore avec ce projet, qui contribuera à coup sûr à améliorer la qualité des enseignements-apprentissages. Dans le même élan, il convient de saluer les actions conjointes de l’Inspection d’Académie, du Conseil départemental, de la Mairie de Mpal, de l’Association des étudiants de Mpal et, last but not least, du Groupe de mise en œuvre (GMO). Nous sommes heureux de nous joindre à vous aujourd'hui pour participer à cette dynamique, j’allais dire à ce pas pour faire du lycée de Mpal un lycée d’excellence.
Ces efforts conjugués attestent du fait que l’École sénégalaise est notre affaire à nous tous. Parce que la mission de l’école est de dépasser les particularismes, les communautarismes, dirions-nous aujourd’hui, les clivages sociaux et culturels. L’École publique, comme disait Émile Chartier « est universelle parce que le savoir est universel ». Bien que nous ayons à faire face à des difficultés, ne croupissons pas dans la vallée du désespoir. L’enjeu en vaut la peine mesdames et messieurs ; car une société sans une École de qualité est une société vulnérable, je dirais même une société sans âme. Parce que, justement, le but de l’école est de former des hommes et des femmes libres et instruits qui, le moment venu, mettront leurs talents acquis et cultivés au service de la société.
Profitant de la solennité du moment, je voudrais lancer un appel à l’endroit des élèves. Cet appel tient en une phrase clé ; une phrase qui a valeur de programme parce que la jeunesse constitue l’avenir d’une nation. Prenant à témoin cet auguste assemblée, je vous dis ceci : prenez pour modèle, l’intellectuel ; et faites de la recherche du savoir leur crédo. Lorsque je dis « intellectuel » je ne pense pas seulement à celui qui a accumulé des diplômes. Je pense plutôt à l’intellectuel destructeur des évidences, à celui qui repère et indique, dans les inerties et contraintes du présent, les points de faiblesse, à celui qui prend conscience des problèmes de sa société, qui s’en informe et qui s’en inquiète parce qu’il est très attentif au présent.
Nous savons que cela demande beaucoup de courage dans une société ou l’intellectuel et le savoir sont progressivement dévalorisés, au profit de la Lutte, la Musique et la Danse. Cette posture est d’autant plus difficile que notre société est aujourd’hui soumise, pieds et poings liés, à une logique de la consommation à outrance et une culture du spectacle qui met à mal la valeur du savoir et le libre usage de la Raison. La séduction des apparences est partout, subrepticement et ouvertement, jusque dans nos salons. C’est pourquoi nous appelons les parents à redoubler de vigilance et à constituer un rempart contre la culture de la facilité et de la médiocrité qui, si nous n’y prenons garde, risque d’infester l’École sénégalaise.
Parce que le savoir et l’usage de la Raison constituent un rempart contre la domination, sous toutes ses formes, celui qui œuvre pour la transmission du savoir, notamment l’enseignant, risque gros. Comme disait François Chatelet, ce puissant intellectuel à la pensée sagace : « Le risque de l’éducateur est constant, car la corruption de la cité engendre l’inintelligence de la cité ». Socrate, Condorcet, Gramsci, Alleg ont subi respectivement la cigüe, la guillotine, la prison, la torture. Ils nous rappellent opportunément que la tâche de l’intellectuel n’est pas de distribuer l’aménité, mais de dire ce qui est. Aujourd’hui il n’y a plus de ciguë ou de guillotine ; mais, ayons le courage de le dire, il y a une entreprise de diabolisation de l’éducateur et de dévalorisation du savoir à tous les niveaux, qui n’est pas de nature à promouvoir l’École comme moyen de conquête de la Liberté et de la dignité humaine.
Nous avons choisi ce métier et, en conséquence de quoi, nous vous disons ici et solennellement, que nous ne ménagerons aucun effort pour combattre, aux côtés de tous les partenaires du Lycée Rawane Ngom de Mpal, l’ignorance. Nul doute que l’ignorance entrave et diminue l’homme, quel que soit ce qu’il est et ce qu’il possède. Ce combat contre l’ignorance est un défi énorme. Mais, ensemble, nous pouvons le relever ; parce que la vie de l’Esprit ne s’effraie pas devant les difficultés. Ce défi pour une école de qualité, nous devons le relever.
Parce que l’école sénégalaise doit rester ce qu’elle a promis d’être, c’est-à-dire une école républicaine, laïque et gratuite ; une école qui ne soit pas l’instrument d’un parti politique ou d’une classe sociale ; donc une école de la Liberté dans et par laquelle nous ferions l’expérience du bien-vivre-ensemble. Pour y parvenir, chacun de nous doit assumer sa responsabilité. Pour y parvenir, il faudrait que chacun de nous tienne un langage de vérité, sans flagornerie. Mesdames et messieurs, nous devons avoir le courage de cette vérité, dans la recherche des voies et moyens pour sortir l’École sénégalaise, j’allais dire le système éducatif sénégalais, de sa morbidité. Parce que, surtout, une société où l’École et le savoir seraient sacrifiés sous l’autel du spectacle, de l’avoir et des luttes politiciennes, se condamnerait elle-même à un assoupissement et une immobilité béate qui ne diffère pas beaucoup de la mort.
Pour avoir été témoin des actes positifs qui ont été progressivement posés par les uns et les autres en direction du Lycée, de l’engagement du personnel enseignant et administratif, de la diligence dont le Proviseur fait montre et de la participation active des populations de Mpal, j’ose espérer que, ensemble, nous réussirons à faire du Lycée de Mpal un lycée d’excellence. Je vous remercie de votre attention !
SAMBA DIAO, sociologue-politologue, Prof de philo