Cet après-midi du mercredi 1er septembre 2021 à Ndiawsir, la clémence crépusculaire du climat, se substitue gaiement à la douceur matinale. À force d’admirer, de contempler ces images esthétiques de la brousse, une douce chaleur joyeuse circule dans nos veines. Notre vision ne peut pas mesurer cette ampleur de la nature, aux dimensions qui s’étendent à l’infini.
Mais, notre mémoire et notre imagination suppléent à la faiblesse de notre vue émoussée. Cette beauté gigantesque nous remplit de satisfaction. Difficile de couver notre fascination croissante qui finit par éclore en un désir irrésistible de demander aux paisibles habitants de ce terroir, comment pourrait-on s’installer définitivement ici ?
A quelques encablures du croisement situé à trois cent mètres du village, la première maison que nous apercevons est en ruines. Ses énormes loquets en fer sont gagnés par la rouille. La porte massive s’ouvre en grinçant : « C’est un ressortissant de Saint-Louis qui vient de la racheter à un de ses parents, il compte la réhabiliter », précise notre guide-éclaireur, un jeune éleveur peulh qui gravit en courant l’escalier en colimaçon. Il règne dans cet endroit une atmosphère inquiétante. Le jour ne pénètre qu’à travers d’étroites fentes de meurtrières, percées avec fantaisie dans l’épaisseur des murs. Les marches usées s’enroulent d’une façon vertigineuse.
Un chaud soleil éclaire généreusement les grosses dalles d’ardoises du village de Ndiawsir. L’astre étincelant, illumine quelques nouvelles constructions en dur, futuristes, les ruelles antiques, les petites maisons en bois, les cases en paille, ses vieilles chaumières et son paysage enchanteur.
Sous la hantise des inondations
Notre premier interlocuteur, notamment Seydou Diaw, enseignant domicilié actuellement à Saint-Louis, a un problème simple à comprendre. Il dispose d’un terrain à usage d’habitation aux abords du village de Ndiawsir, qu’il ne peut pas encore mettre en valeur.
« Je n’ai pas encore construit ma maison car je sais que je serais confronté à d’énormes difficultés pour accéder à ma parcelle, du fait d’un manque criard de pistes rurales praticables », a-t-il précisé.
Je suis originaire de Pikine Diaminar, a-t-il ajouté, « je tiens vaille que vaille à quitter ce quartier qui est inondé chaque année par les eaux de pluies et une forte crue du fleuve, tous les membres de ma famille ont décidé de me rejoindre à Ndiawsir, où je suis actuellement hébergé par un ami en attendant d’être en mesure de construire ma propre maison ».
En effet, a-t-il souligné, « dans ce village, non seulement, on respire l’air pur de la campagne, mais, on peut bénéficier d’un espace vital où on peut bien éduquer les enfants ».
Pour le deuxième Adjoint au maire de Gandon, Ibrahima Bâ, qui habite dans ce village, « il suffit que les habitants de cette localité décident de mettre en commun leurs moyens, pour apporter les solutions les plus adéquates à ce problème récurrent et relatif à l’aménagement des pistes rurales ».
Il a laissé entendre que la municipalité de Gandon n’a pas assez de moyens « et le peu de ressources dont elle dispose est destiné à résoudre les problèmes de 56 villages et de 41 hameaux, moi personnellement, je ne cesse de plaider pour la cause de mon terroir, c’est tout ce que je peux faire ».
Notre interlocuteur nous met en rapport avec un fonctionnaire de l’Etat qui sera bientôt admis à faire valoir ses droits à la retraite. Ce sexagénaire, qui passe le plus clair de son temps à Ndiawsir, est tout ridé sous un chapeau de paille.
Cherté du loyer à Saint-Louis
Il exhibe un visage apoplectique, ascétique, buriné par les intempéries, tanné par les vents impétueux et le soleil ardent qui illumine souvent les vieilles chaumières de ce village et autres fragments de cette nature douce et joviale qui continue d’impressionner et de crucifier les visiteurs.
Sa mine grave et renfrognée est creusée par un dur labeur dans les services de l’Etat. Rongée par la fatigue, le stress des grandes villes, le calvaire, la galère et la grande corvée pour joindre les deux bouts, payer un loyer de 100.000 F dans le faubourg de Sor, subvenir correctement aux besoins de sa progéniture, pour rembourser des crédits bancaires, etc.
« Je prie Dieu, Le tout Puissant, pour déménager vers Ndiawsir avant de prendre ma retraite ».
Moi aussi, a-t-il expliqué, « je ne peux pas encore habiter dans ce village car, on m’a fait comprendre que le projet d’extension des réseaux électrique et d’eau potable, n’est pas encore réalisé ».
« On étouffe à Saint-Louis où le coût de la vie augmente de plus en plus, j’envisage de faire de l’aviculture à Ndiawsir, mes enfants pourraient exploiter à quelques encablures de ma maison, des terres cultivables ».
Il fait 17 heures 30. La ronde des aigrettes garcettes et des dendrocygnes veufs, nous rappelle que nous ne sommes pas loin du parc de la Langue de Barbarie.
D’un vol ample et majestueux, ces oiseaux migrateurs explorent cette zone comprise entre le Walo, le Toubé et le Gandiolais.
Nous prenons encore le temps de nous promener et de zigzaguer de porte en porte pour trouver un autre interlocuteur dans ce patelin où les populations évitent les questions oiseuses, préférant tout simplement se calfeutrer dans de vastes concessions.
Ndeye Meuyeu Dieng est une brave femme transformatrice de produits halieutiques, « nous avons décidé, mon mari et moi, de quitter Gokhou-Mbathie pour venir habiter à Ndiawsir, notre maison est habitable, il ne reste que quelques problèmes de finition ».
Au fure et à mesure que nous passons en revue ces constructions futuristes, intercalées par des habitations sommaires, nous sentons notre cœur battre plus allégrement.
Une sensation mystérieuse qui nous envahit lorsque nous admirons la beauté de ce paysage mythique et atypique, où de paisibles concitoyens donnent l’impression d’ignorer la haine, la rancœur, le mépris, l’ostentation, le cynisme, la cruauté, l’ingratitude, etc.
Humbles et modestes, ces gens ne savent qu’aimer, accueillir, congratuler. Ils savent aussi endurer et se taire. Prompts à rendre service, à offrir aux visiteurs une pastèque volumineuse, des mets riches et variés et autres plats somptueux. On ne les entend jamais se plaindre. Leur plaisir, c’est cultiver la terre, rechercher des carpes au fond du fleuve, mener d’autres activités professionnelles à Saint-Louis.
Plusieurs versions pour remonter une histoire
Certains notables de cette localité soutiennent avec la dernière énergie que ce village a été fondé depuis deux siècles par le célèbre Diam Bâ, un berger peulh qui venait du Ndiambour, plus précisément de Ndiadiéré. D’autres habitants tels que Mamadou Séne, un proche collaborateur du chef de village Souleye Sow, nous racontent que Thiambel Sow, un éleveur peulh transhumant, serait le fondateur de ce village.
M. Séne nous a fait savoir que Ndiawsir est un terme peulh qui signifie « la paix, la quiétude, le calme, la tranquilité ».
A l’époque, le vieux Thiambel s’était rendu compte que ce site était un cadre propice pour y mener une vie tranquille, pour y développer un projet agricole.
A côté du fleuve, a-t-il poursuivi, Thiambel et sa famille exploitaient des parcelles agricoles et s’adonnaient à l’élevage, « ils vivaient en parfaite harmonie avec d’autres habitants wolofs et peulhs qui ont fait venir, eux-aussi, leurs parents et amis qui étaient déjà installés à Gueumbeul, Ngayna et dans d’autres localités du Gandiolais et du Toubé ».
Séne nous a fait comprendre que son origine est sérére car, à l’époque, « un ressortissant du Sine a eu l’occasion de venir séjourner dans cette localité, où il a pu épouser une femme peulhe, il est certainement notre ancêtre ».
Mais, même cette version de la présence des séréres dans ce village, a-t-il soulignée, est balayée d’un revers de main par d’autres habitants de Ndiawsir, qui affirment que Séne ne serait que le diminutif de Séno, qui signifierait en peulh, colline ou montagne, « à l’époque, on avait l’habitude de stigmatiser ceux qui habitaient sur la colline, en les désignant du doigt par l’expression –les gens de Séno-, au fil du temps Séno est devenu Séne ».
Abondant dans le même sens, le chef du village, Souleye Sow, a confirmé les explications de Mamadou Sène, tout en invitant les pouvoirs publics à aider les populations de ce village à bénéficier dans les plus brefs délais d’un projet d’aménagement d’un pont sur un bras du fleuve qui le sépare de Ngaye-Ngaye, de pistes rurales, d’extension des réseaux d’eau potable et d’électricité. Ce pont pourrait leur permettre de rallier facilement Ngaye-Ngaye et de se retrouver en un temps-record à Gandon et au bord de la route nationale.
Reportage de Mbagnick Kharachi Diagne
Mais, notre mémoire et notre imagination suppléent à la faiblesse de notre vue émoussée. Cette beauté gigantesque nous remplit de satisfaction. Difficile de couver notre fascination croissante qui finit par éclore en un désir irrésistible de demander aux paisibles habitants de ce terroir, comment pourrait-on s’installer définitivement ici ?
A quelques encablures du croisement situé à trois cent mètres du village, la première maison que nous apercevons est en ruines. Ses énormes loquets en fer sont gagnés par la rouille. La porte massive s’ouvre en grinçant : « C’est un ressortissant de Saint-Louis qui vient de la racheter à un de ses parents, il compte la réhabiliter », précise notre guide-éclaireur, un jeune éleveur peulh qui gravit en courant l’escalier en colimaçon. Il règne dans cet endroit une atmosphère inquiétante. Le jour ne pénètre qu’à travers d’étroites fentes de meurtrières, percées avec fantaisie dans l’épaisseur des murs. Les marches usées s’enroulent d’une façon vertigineuse.
Un chaud soleil éclaire généreusement les grosses dalles d’ardoises du village de Ndiawsir. L’astre étincelant, illumine quelques nouvelles constructions en dur, futuristes, les ruelles antiques, les petites maisons en bois, les cases en paille, ses vieilles chaumières et son paysage enchanteur.
Sous la hantise des inondations
Notre premier interlocuteur, notamment Seydou Diaw, enseignant domicilié actuellement à Saint-Louis, a un problème simple à comprendre. Il dispose d’un terrain à usage d’habitation aux abords du village de Ndiawsir, qu’il ne peut pas encore mettre en valeur.
« Je n’ai pas encore construit ma maison car je sais que je serais confronté à d’énormes difficultés pour accéder à ma parcelle, du fait d’un manque criard de pistes rurales praticables », a-t-il précisé.
Je suis originaire de Pikine Diaminar, a-t-il ajouté, « je tiens vaille que vaille à quitter ce quartier qui est inondé chaque année par les eaux de pluies et une forte crue du fleuve, tous les membres de ma famille ont décidé de me rejoindre à Ndiawsir, où je suis actuellement hébergé par un ami en attendant d’être en mesure de construire ma propre maison ».
En effet, a-t-il souligné, « dans ce village, non seulement, on respire l’air pur de la campagne, mais, on peut bénéficier d’un espace vital où on peut bien éduquer les enfants ».
Pour le deuxième Adjoint au maire de Gandon, Ibrahima Bâ, qui habite dans ce village, « il suffit que les habitants de cette localité décident de mettre en commun leurs moyens, pour apporter les solutions les plus adéquates à ce problème récurrent et relatif à l’aménagement des pistes rurales ».
Il a laissé entendre que la municipalité de Gandon n’a pas assez de moyens « et le peu de ressources dont elle dispose est destiné à résoudre les problèmes de 56 villages et de 41 hameaux, moi personnellement, je ne cesse de plaider pour la cause de mon terroir, c’est tout ce que je peux faire ».
Notre interlocuteur nous met en rapport avec un fonctionnaire de l’Etat qui sera bientôt admis à faire valoir ses droits à la retraite. Ce sexagénaire, qui passe le plus clair de son temps à Ndiawsir, est tout ridé sous un chapeau de paille.
Cherté du loyer à Saint-Louis
Il exhibe un visage apoplectique, ascétique, buriné par les intempéries, tanné par les vents impétueux et le soleil ardent qui illumine souvent les vieilles chaumières de ce village et autres fragments de cette nature douce et joviale qui continue d’impressionner et de crucifier les visiteurs.
Sa mine grave et renfrognée est creusée par un dur labeur dans les services de l’Etat. Rongée par la fatigue, le stress des grandes villes, le calvaire, la galère et la grande corvée pour joindre les deux bouts, payer un loyer de 100.000 F dans le faubourg de Sor, subvenir correctement aux besoins de sa progéniture, pour rembourser des crédits bancaires, etc.
« Je prie Dieu, Le tout Puissant, pour déménager vers Ndiawsir avant de prendre ma retraite ».
Moi aussi, a-t-il expliqué, « je ne peux pas encore habiter dans ce village car, on m’a fait comprendre que le projet d’extension des réseaux électrique et d’eau potable, n’est pas encore réalisé ».
« On étouffe à Saint-Louis où le coût de la vie augmente de plus en plus, j’envisage de faire de l’aviculture à Ndiawsir, mes enfants pourraient exploiter à quelques encablures de ma maison, des terres cultivables ».
Il fait 17 heures 30. La ronde des aigrettes garcettes et des dendrocygnes veufs, nous rappelle que nous ne sommes pas loin du parc de la Langue de Barbarie.
D’un vol ample et majestueux, ces oiseaux migrateurs explorent cette zone comprise entre le Walo, le Toubé et le Gandiolais.
Nous prenons encore le temps de nous promener et de zigzaguer de porte en porte pour trouver un autre interlocuteur dans ce patelin où les populations évitent les questions oiseuses, préférant tout simplement se calfeutrer dans de vastes concessions.
Ndeye Meuyeu Dieng est une brave femme transformatrice de produits halieutiques, « nous avons décidé, mon mari et moi, de quitter Gokhou-Mbathie pour venir habiter à Ndiawsir, notre maison est habitable, il ne reste que quelques problèmes de finition ».
Au fure et à mesure que nous passons en revue ces constructions futuristes, intercalées par des habitations sommaires, nous sentons notre cœur battre plus allégrement.
Une sensation mystérieuse qui nous envahit lorsque nous admirons la beauté de ce paysage mythique et atypique, où de paisibles concitoyens donnent l’impression d’ignorer la haine, la rancœur, le mépris, l’ostentation, le cynisme, la cruauté, l’ingratitude, etc.
Humbles et modestes, ces gens ne savent qu’aimer, accueillir, congratuler. Ils savent aussi endurer et se taire. Prompts à rendre service, à offrir aux visiteurs une pastèque volumineuse, des mets riches et variés et autres plats somptueux. On ne les entend jamais se plaindre. Leur plaisir, c’est cultiver la terre, rechercher des carpes au fond du fleuve, mener d’autres activités professionnelles à Saint-Louis.
Plusieurs versions pour remonter une histoire
Certains notables de cette localité soutiennent avec la dernière énergie que ce village a été fondé depuis deux siècles par le célèbre Diam Bâ, un berger peulh qui venait du Ndiambour, plus précisément de Ndiadiéré. D’autres habitants tels que Mamadou Séne, un proche collaborateur du chef de village Souleye Sow, nous racontent que Thiambel Sow, un éleveur peulh transhumant, serait le fondateur de ce village.
M. Séne nous a fait savoir que Ndiawsir est un terme peulh qui signifie « la paix, la quiétude, le calme, la tranquilité ».
A l’époque, le vieux Thiambel s’était rendu compte que ce site était un cadre propice pour y mener une vie tranquille, pour y développer un projet agricole.
A côté du fleuve, a-t-il poursuivi, Thiambel et sa famille exploitaient des parcelles agricoles et s’adonnaient à l’élevage, « ils vivaient en parfaite harmonie avec d’autres habitants wolofs et peulhs qui ont fait venir, eux-aussi, leurs parents et amis qui étaient déjà installés à Gueumbeul, Ngayna et dans d’autres localités du Gandiolais et du Toubé ».
Séne nous a fait comprendre que son origine est sérére car, à l’époque, « un ressortissant du Sine a eu l’occasion de venir séjourner dans cette localité, où il a pu épouser une femme peulhe, il est certainement notre ancêtre ».
Mais, même cette version de la présence des séréres dans ce village, a-t-il soulignée, est balayée d’un revers de main par d’autres habitants de Ndiawsir, qui affirment que Séne ne serait que le diminutif de Séno, qui signifierait en peulh, colline ou montagne, « à l’époque, on avait l’habitude de stigmatiser ceux qui habitaient sur la colline, en les désignant du doigt par l’expression –les gens de Séno-, au fil du temps Séno est devenu Séne ».
Abondant dans le même sens, le chef du village, Souleye Sow, a confirmé les explications de Mamadou Sène, tout en invitant les pouvoirs publics à aider les populations de ce village à bénéficier dans les plus brefs délais d’un projet d’aménagement d’un pont sur un bras du fleuve qui le sépare de Ngaye-Ngaye, de pistes rurales, d’extension des réseaux d’eau potable et d’électricité. Ce pont pourrait leur permettre de rallier facilement Ngaye-Ngaye et de se retrouver en un temps-record à Gandon et au bord de la route nationale.
Reportage de Mbagnick Kharachi Diagne