Selon l’ex présidente du Conseil économique, social et environnemental, qui s’appuie sur les exemples du Cap-Vert, de la Mauritanie, du Libéria ou encore de la Sierra Leone, le respect des Constitutions, qui est attendu partout dans le continent africain, est gage de stabilité des pays. « Depuis 1990, Il faut noter que 21 leaders ont sagement quitté le pouvoir dans 14 pays africains grâce à la disposition de la limitation de mandat. Ce qui prouve qu’il peut y avoir une vie paisible après la Présidence. La limitation des mandats est un moyen important de faciliter l’alternance au pouvoir sur le continent. Son respect est aussi, de nos jours, un moyen de quitter le pouvoir avec les honneurs. »
Pour le cas du Sénégal, Mimi Touré ne passe pas par quatre chemins pour déclarer que la question est déjà tranchée. « Le Président Macky Sall réélu le 24 février 2019 a affirmé à de nombreuses reprises qu’il effectuerait son second et dernier mandat notamment le 31 décembre 2018. Donc, au Sénégal, la question est derrière nous comme je l’ai déjà dit à diverses occasions », dira-t-elle, dans un discours qui semble pourtant prendre le contre-pied de celui tenu par la mouvance présidentielle.
Ce que l'Afrique veut
Mimi Touré reste convaincue que la majorité des citoyens africains préfère donner des durées limitées aux hommes et femmes qu’ils se choisissent comme dirigeants : « Il faut dire qu’aujourd’hui, sur les 55 États membres de l’Union Africaine, 35 pays disposent de la clause de limitation de mandats. Les pays, à travers leur Peuple, se choisissent leur Constitution donc la question de la limitation des mandats s’analyse à l’aune des choix constitutionnels des pays (...), le Sénégal a modifié sa constitution limitant les mandats présidentiels à 2 consécutifs, et précisant en son article premier que : « La durée du mandat du président de la république est de cinq ans. Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ».
Faut-il lier sa position à sa situation actuelle après qu’elle a été remplacée à la tête du CESE par une de ses cibles préférées dans l’opposition ? En tout cas, Mimi Touré se présente clairement comme une grande avocate de la limitation des mandats dont elle étale ainsi les avantages : « La limitation des mandats permet des transitions politiques à des intervalles réguliers et prévisibles. Ce qui fait que les partis et les candidats rivaux n’ont pas vraiment de raison de recourir à des moyens détournés pour renverser le système à travers des manifestations violentes, la désobéissance civile et autres formes de manifestation de mécontentement public. Les dirigeants se sentent davantage motivés à produire des résultats pour laisser un héritage positif à leur successeur ou/et pour entrer dans l’Histoire avec grand H de leur pays. La limitation des mandats permet aussi de renouveler le leadership et encourage la montée d’une autre génération de dirigeants politiques, elle permet aussi l’apport de sang neuf et la possibilité de changements de politiques. »
Les dangers d'un forcing
Quid des risques du non-respect de la limitation des mandats ? Pour l’ex PM, cest la tentation de la manipulation des élections, l’affaiblissement de l’autorité des autres pouvoirs de l’Etat et la marginalisation d’adversaires politiques, qui en cas de limitation de mandat seraient plus enclin à honorer leurs prédécesseurs. Elle estime que cela « produit de fortes tensions sociales avec des répercutions économiques et sociales graves alors que pour consolider les progrès du développement l’Afrique a grandement besoin de paix et de stabilité sociale pérennes. Il s’y ajoute le risque de voir les forces de sécurité intervenir dans le jeu politique en cas de forte tension qui paralyserait le pays alors que l’Afrique doit définitivement en finir avec les coups d’Etat. »
En résumé, défendra-t-elle, « la limitation des mandats s’inscrit dans le renforcement des institutions et des processus démocratiques. Elle assure la stabilité sociale dont le continent a besoin pour consolider son développement. Elle peut assurer une sortie honorable et paisible aux dirigeants en poste tout en favorisant l’arrivée de nouvelles générations et élites au pouvoir. »
LERAL