Découvrir Saint-Louis est déjà une expérience en soi. A l’occasion d’un festival du festival international de jazz, juste le temps d’un week-end, on entre dans le registre de l’aventure.
Le taxi traverse le pont Faidherbe, sur le fleuve Sénégal, où des poissons vivants et morts se pavanent dans le sens du courant. Agréable, cette fraîcheur soudaine qui s’invite à l’intérieur du véhicule comme pour saluer les visiteurs de cette île tricentenaire. L’architecture métallique du pont donne à l’infrastructure un air new yorkais, mais… pas de gratte-ciel à l’entrée de Saint-Louis. Seules des maisons basses, d’un autre siècle. Le taxi s’arrête au niveau de la gouvernance, dans le centre-ville : « Vous y êtes, ici c’est le pôle du festival », dis le chauffeur.
A Saint-Louis, malgré une population de près de 200 000 habitants, on croirait à un petit village. En longeant le côté ouest de l’île, du quartier nord, musulman, au quartier sud, historiquement chrétien, les immenses pirogues aux mille et une couleurs flottent sur les berges en face, accostées le long de la Langue de Barbarie, toute de sable, entre le fleuve et l’océan Atlantique.
C’est le quartier des pêcheurs, Guet Ndar. Il a l’air d’y avoir une concentration humaine incroyable par là-bas, contrairement à ce côté de la ville où la vie semble paisible et les gens ont de l’espace. Un passant me lance en désignant du bout du doigt la berge d’en face : « Dans ce quartier, c’est simple : si tu vois des hommes, ce sont des pêcheurs, si tu vois des femmes, ce sont des femmes de pêcheurs, si tu vois des enfants, ce sont des enfants de pêcheurs. » Quittant peu à peu les bords du fleuve et l’odeur envahissante de la pêche, je m’enfonce dans les ruelles, le soleil couchant illumine les façades des maisons au style colonial très marqué. Un pied devant l’autre, je foule le sable sec de la « Venise africaine » : ce sont maintenant des cris affolés d’enfants qui m’interpellent. Que se passe-t-il de l’autre côté de cette bâche qui fait si peur aux bambins ? Que font-ils ? Où courent-ils, ces enfants par dizaines, en uniforme d’écoliers ou pieds nus ? Cette peur qu’il y a dans leurs yeux est saisissante, elle se mélange à des rires nerveux. J’assiste à la tradition du « Simb ». Soudain, un « faux lion » surgit de nulle part et fonce dans le flot d’enfants qui court à toute allure, faisant voler le sable derrière eux, pour ne pas se laisser attraper. Ils jouent à se faire peur. Pendant des heures, ils tentent les mêmes approches du spectacle interdit, les mêmes frayeurs, les mêmes courses et les mêmes éclats de soulagement d’avoir échappé à la capture. Cette attraction de rue n’empêche pas mes yeux de se balader ailleurs.
D’observer le raffinement de ces façades aux couleurs pastelles, ces balcons plus ou moins entretenus, ces rues régulières, parallèles et perpendiculaires les unes aux autres.
Les femmes accoudées aux fenêtres, ou debout sur le pas de leur porte tenant leurs enfants dans les bras, ont l’air de peintures. Oui, cette ville a quelque chose d’un musée. Certaines bâtisses tombent en ruine, vides de l’intérieur, parfois seuls les quatre murs extérieurs de ces maisons restent debout. Mais rien de tout ça n’enlèvera à Saint-Louis son prestigieux statut de patrimoine de l’Unesco. Car, ce qui charge ce lieu de beauté est bien plus que matériel.
Période de festival oblige, un spectacle en cache un autre. Les voix d’une chorale dans la cathédrale de l’île m’attirent. Ce sont les choristes de Notre Dame de Lourdes, debout sur les marches devant l’autel, en tenue traditionnelle aux tons verts et jaunes, qui interprètent « Le lion est mort ce soir ».
Dans un roulement de « djembé » (percussions), les voix des jeunes filles jaillissent. Les choristes se balancent de gauche à droite en frappant des mains, accompagnés par le son électrique d’une guitare.
Il y a là le potentiel de « Sister Act », leurs voix viennent directement du cœur. La chanson suivante, interprétée en crescendo, conclut ce carnet de route mieux que moi : « Ouh, ouh… Freedom ! » - c’est probablement cela ma première impression de la ville de Saint-Louis, une île de « liberté ».
Un reportage de Fanny CHEYROU (stagiaire)
LE SOLEIL
Le taxi traverse le pont Faidherbe, sur le fleuve Sénégal, où des poissons vivants et morts se pavanent dans le sens du courant. Agréable, cette fraîcheur soudaine qui s’invite à l’intérieur du véhicule comme pour saluer les visiteurs de cette île tricentenaire. L’architecture métallique du pont donne à l’infrastructure un air new yorkais, mais… pas de gratte-ciel à l’entrée de Saint-Louis. Seules des maisons basses, d’un autre siècle. Le taxi s’arrête au niveau de la gouvernance, dans le centre-ville : « Vous y êtes, ici c’est le pôle du festival », dis le chauffeur.
A Saint-Louis, malgré une population de près de 200 000 habitants, on croirait à un petit village. En longeant le côté ouest de l’île, du quartier nord, musulman, au quartier sud, historiquement chrétien, les immenses pirogues aux mille et une couleurs flottent sur les berges en face, accostées le long de la Langue de Barbarie, toute de sable, entre le fleuve et l’océan Atlantique.
C’est le quartier des pêcheurs, Guet Ndar. Il a l’air d’y avoir une concentration humaine incroyable par là-bas, contrairement à ce côté de la ville où la vie semble paisible et les gens ont de l’espace. Un passant me lance en désignant du bout du doigt la berge d’en face : « Dans ce quartier, c’est simple : si tu vois des hommes, ce sont des pêcheurs, si tu vois des femmes, ce sont des femmes de pêcheurs, si tu vois des enfants, ce sont des enfants de pêcheurs. » Quittant peu à peu les bords du fleuve et l’odeur envahissante de la pêche, je m’enfonce dans les ruelles, le soleil couchant illumine les façades des maisons au style colonial très marqué. Un pied devant l’autre, je foule le sable sec de la « Venise africaine » : ce sont maintenant des cris affolés d’enfants qui m’interpellent. Que se passe-t-il de l’autre côté de cette bâche qui fait si peur aux bambins ? Que font-ils ? Où courent-ils, ces enfants par dizaines, en uniforme d’écoliers ou pieds nus ? Cette peur qu’il y a dans leurs yeux est saisissante, elle se mélange à des rires nerveux. J’assiste à la tradition du « Simb ». Soudain, un « faux lion » surgit de nulle part et fonce dans le flot d’enfants qui court à toute allure, faisant voler le sable derrière eux, pour ne pas se laisser attraper. Ils jouent à se faire peur. Pendant des heures, ils tentent les mêmes approches du spectacle interdit, les mêmes frayeurs, les mêmes courses et les mêmes éclats de soulagement d’avoir échappé à la capture. Cette attraction de rue n’empêche pas mes yeux de se balader ailleurs.
D’observer le raffinement de ces façades aux couleurs pastelles, ces balcons plus ou moins entretenus, ces rues régulières, parallèles et perpendiculaires les unes aux autres.
Les femmes accoudées aux fenêtres, ou debout sur le pas de leur porte tenant leurs enfants dans les bras, ont l’air de peintures. Oui, cette ville a quelque chose d’un musée. Certaines bâtisses tombent en ruine, vides de l’intérieur, parfois seuls les quatre murs extérieurs de ces maisons restent debout. Mais rien de tout ça n’enlèvera à Saint-Louis son prestigieux statut de patrimoine de l’Unesco. Car, ce qui charge ce lieu de beauté est bien plus que matériel.
Période de festival oblige, un spectacle en cache un autre. Les voix d’une chorale dans la cathédrale de l’île m’attirent. Ce sont les choristes de Notre Dame de Lourdes, debout sur les marches devant l’autel, en tenue traditionnelle aux tons verts et jaunes, qui interprètent « Le lion est mort ce soir ».
Dans un roulement de « djembé » (percussions), les voix des jeunes filles jaillissent. Les choristes se balancent de gauche à droite en frappant des mains, accompagnés par le son électrique d’une guitare.
Il y a là le potentiel de « Sister Act », leurs voix viennent directement du cœur. La chanson suivante, interprétée en crescendo, conclut ce carnet de route mieux que moi : « Ouh, ouh… Freedom ! » - c’est probablement cela ma première impression de la ville de Saint-Louis, une île de « liberté ».
Un reportage de Fanny CHEYROU (stagiaire)
LE SOLEIL