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CONTRE-COURANT - Si leurs recettes pouvaient développer le Sénégal…(Par Ibrahima BAKHOUM)

Mardi 14 Août 2012

Dans ses «Mémoires pour l’Espoir» (l’Harmattan, juillet 2012) arrivé dans les rayons la semaine dernière, Sogué Diarisso dont on ne peut douter qu’il sait de quoi il parle lorsqu’il est question d’économie, met presqu’en garde contre l’approche de certains partenaires au développement, quand ils prétendent donner à nos gouvernants les recettes pouvant faire espérer un mieux-être national profitable aux populations.


CONTRE-COURANT - Si leurs recettes pouvaient développer le Sénégal…(Par Ibrahima BAKHOUM)
A la page 119 de l’ouvrage qui en compte un peu plus de 200, l’ancien directeur de la Prévision et de la Statistique, puis directeur de la Prévision et des Etudes Economiques et Conseiller économique à la Primature dans la décennie Wade (2000-2010) explique comment les Institutions qui «appuient» nos pays empruntent des voies généralement au-dessus de tout soupçon, pour faire passer leurs recettes. Ainsi, M Diarisso raconte avoir « personnellement pris part à plusieurs négociations où des institutions internationales ont voulu subtilement, nous imposer des points de vue qui étaient ceux d’Ong qu’elles finançaient, en nous faisant croire que c’est ce que voulaient les populations (…) Aussi, lorsqu’elles viennent en mission dans nos pays, elles commencent par faire le tour des ambassades pour prendre les instructions nécessaires et voila pourquoi elles n’hésitent pas à fouler au pied des principes, dès lors que des intérêts sont remis en cause ».

Comprendre cette politique des puissants partenaires qui décident de comment nos pays doivent être gérés « au mieux pour les populations » devrait constituer une étape décisive vers de radicales, mais incontournables ruptures dans les approches de développement et de partenariat. Le même haut fonctionnaire, alors placé au cœur de la conception et du suivi des programmes économiques du Sénégal, enfonce le clou pour recadrer les décideurs et autres experts nationaux trop souvent portés à « répéter bêtement » comme des robots (sic) « ce qu’ils auront lu de leurs homologues occidentaux dont les analyses sont légitimement marquées par la culture et les intérêts de l’Occident ».
On peut retenir de cet appel à la prudence que, des recettes qui nous sont proposées (un euphémisme pour ne pas dire imposées) dans le cadre de la coopération multilatérale, se dégage une forte odeur de jeu d’intérêts dont les premiers bénéficiaires ne sont pas toujours ceux que l’on met en avant dans les plaidoyers et documents de stratégie.


A l’insuccès sur les APE…

Dans un peu plus de 45 jours, le 27 septembre prochain, il y aura 5 années, les pays ACP et des organisations de la société civile manifestaient dans différentes parties du monde, pour dénoncer ce qu’ils considéraient comme une « pression inadmissible » de l’Union européenne sur les partenaires du Sud invités à signer des Accords de Partenariat Economique (APE) dont les termes élaborés au début des années 2000, étaient loin d’être avantageux pour les pays Afrique- Caraïbes-Pacifique.

Dans le manifeste publié en direction des manifestations au programme pour la journée de mobilisation du 27 septembre 2007, on pouvait lire notamment : « tout en présentant ces accords commerciaux comme des instruments de développement, l’UE exerce sur les pays ACP une pression inadmissible afin de faire des APE des accords de libre échange qui auraient non seulement pour effet d’éliminer les droits de douane sur les biens et les marchandises en provenance d'Europe, mais comprendraient également des mesures de libéralisation des services, des investissements et des marchés publics et imposeraient des règles sur la politique de concurrence, la propriété intellectuelle, etc ».

Dans le même document produit par des organisations de la Société civile de différents pays du Nord et du Sud, les protestataires indiquent que « de tels APE ouvriront les marchés des pays ACP à la concurrence inégale des exportations européennes, anéantiront les efforts d’intégration régionale et mettront en péril les industries naissantes, l’agriculture familiale, les emplois et les conditions de vie. En outre, ils réduiront
fortement l’espace politique dont disposent les pays ACP pour réguler et dessiner leurs propres politiques, qui répondent à leurs besoins et objectifs de développement. Les APE conduiront donc à une augmentation des inégalités sociales et de la pauvreté ». De l’eau au moulin de Sogué Diariso dont l’argumentaire sur la nécessaire vigilance est d’une brûlante actualité.

La presse quotidienne a largement relayé hier lundi, l’appel du Rassemblement démocratique sénégalais (RDS) à ne pas faire de Mamadou Racine Sy « un Bara Tall bis » allusion au traitement imposé à l’entrepreneur de travaux publics par les autorités de l’ancien régime et qui a fini par contraindre Jean Lefèbvre de délocaliser ses activités dans un pays voisin.

…ils substituent des remises en question anti nationales

Si le parti dirigé par Mame Mactar Guèye fait le rapprochement avec ce qui est en train de se dessiner contre Mamadou Racine Sy, c’est parce que les nouvelles autorités seraient sur le point de sacrifier un entrepreneur national sur l’autel de ce qu’elles appellent la « rupture » avec la gouvernance de Wade. Au péril des intérêts nationaux ? Ce serait une absurdité. Le principe de la discrimination positive devrait autoriser de prendre des mesures autres que mettre un Sénégalais en compétition avec des opérateurs autrement plus puissants, rien que pour faire bonne figure aux yeux de ces gens dont Sogué Diarisso dit qu’ils viennent avec des schémas pas toujours les meilleurs pour l’atteinte des objectifs de mieux-être des populations africaines, donc sénégalaises.

Que les institutions internationales poussent des gouvernements africains à mettre en place des mécanismes d’amélioration de la gouvernance, il n y a pas à s’offusquer. Le problème c’est le but visé. Les APE tardant à être signés (le seront-ils jamais ?) ceux qui mettaient la pression sur nos dirigeants ne lâchent pas le morceau pour autant. Obtenir du gouvernement qu’il remette à plat un avantage déjà consenti au premier des Sénégalais dans son domaine, c’est faire courir au pays le risque que l’économie nationale ne gagne que des miettes dans l’exploitation du King Fahd Palace.

Refuser à un national, capitaine d’industrie, le droit de gagner de l’argent, équivaudrait à enrichir des groupes étrangers qui ont, de toute évidence des capacités de négociations hors de portée d’un Mamadou Racine Sy adossé à sa seule capacité à prendre des risques alors que le King Fahd de 2011 et des années précédentes ne payait guère de mine côté chiffre d’affaires. Si demain l’ex Méridien Président tombe entre les mains d’étrangers, ce sera le début d’une redistribution de cartes dont les nationaux seraient les plus grands perdants. J’ai entendu une personne dire, parlant de la France, que si elle était capable de développer le Sénégal, elle en a eu tout le temps, depuis Pinet Laprade, gouverneur installé à Saint-Louis au 19 ème siècle. Les signes de ruptures ne se lisent dans des mois passés à aboyer contre d’anciens dirigeants chassés du pouvoir par la volonté des Sénégalais qui croient d’abord en leur pays. C’est la nature des actes posés pour le futur qui indique que quelque chose est en train de bouger. Dans un sens profitable à l’économie nationale.


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