La situation politique marquée par une escalade de la violence verbale entre pouvoir et opposition autour du procès de Sonko et de la candidature contestée du Président Macky Sall, et même par des affrontements entre militants de l’opposition et forces de l’ordre (cas de Mbacké) ne cesse d’inquiéter les observateurs et experts politiques. A l’instar de l’Enseignant chercheur agrégé en Sciences politiques à l’UGB de Saint-Louis qui livre, dans cet entretien qu’il a accordé à Sud Quotidien, son diagnostic sans complaisance des causes ayant conduit à cette sorte d’impasse, tout en rappelant les causes profondes. Dans cet exercice, il n’élude pas moins la posture radicale de la France dans cette guerre de positionnement entre le régime en place et Ousmane Sonko pour le contrôle du pouvoir en 2024.
Depuis quelques temps, l’espace politique sénégalais est fortement perturbé par une escalade de violence verbale autour du procès de Sonko et de la 3e candidature du Président Macky Sall. A qui profite cette situation ?
C’est une situation qui ne profite à personne car elle porte gravement atteinte à l’image du Sénégal et menace la paix et la stabilité du pays. Cette confrontation entre pouvoir et opposition est en porte à faux avec les principes et valeurs démocratiques, mais également avec les valeurs sénégalaises de tolérance, de dialogue et de négociation, dans l’intérêt du pays. En effet, cette situation contredit les principes démocratiques : la démocratie sénégalaise semble déréglée, au triple sens de règlement, régulation et réglage. La compétition politique qui doit être ouverte, inclusive et transparente est aujourd’hui compromise, marquée par l’exclusion de Karim Wade et de Khalifa Ababacar Sall à la suite d’affaires politico-judiciaires, et par le mécanisme de sélection par le parrainage, illégal au regard de la décision n° ECW/CCJ/JUD/10/21 de la Cour de justice de la CEDEAO en date du 28 avril 2021, considérant que ce procédé viole le principe de la libre participation aux élections. La Cour avait donné à l’État du Sénégal un délai de 6 mois pour exécuter la décision, à compter de sa notification, mais l’État du Sénégal tarde à appliquer cette décision.
Que vous inspire cette situation d’escalade de la violence verbale entre pouvoir et opposition ?
La démocratie qui doit reposer sur le débat autour des programmes et projets de société, est ravalée de manière caricaturale à des injures, insanités, calomnies et surenchères de menaces. La relation entre pouvoir et opposition est fondée sur la persécution de cette dernière ; alors que l’opposition est un rouage essentiel dans le fonctionnement du jeu démocratique. Car la démocratie n’est pas un jeu à somme nulle où il est question de vie et de mort, dans le registre de l’inimitié ; il s’agit plutôt de perdre une élection et de se préparer pour en gagner une autre, ou de gagner une élection en étant conscient qu’on peut perdre la prochaine, dans le cadre de règles équitables et transparentes, acceptables et acceptées par les différents acteurs, dans le registre de l’adversité.
A votre avis, qu’est-ce qui peut expliquer cette situation de méfiance entre pouvoir et opposition ?
En effet, il y a déjà eu deux affaires politico-judiciaires qui ont présenté beaucoup d’entorses et de violations des droits des mis en cause, notamment Karim Wade et Khalifa Sall. Dès lors, une troisième affaire politico-judiciaire risque d’asseoir davantage l’idée d’une instrumentalisation de la justice à des fins politiques.
En effet concernant Karim Wade, il a été jugé par une juridiction d’exception, la CREI (Cour de répression de l’enrichissement illicite), réactivé en 2012 après presque 30 ans de léthargie, et qui pose beaucoup de problèmes par rapport aux principes qui garantissent un procès équitable : renversement de la charge de la preuve ; rupture d’égalité entre le procureur spécial partie au procès qui seul peut faire appel mais l’accusé, lui, ne peut pas interjeter appel ; absence de définition précise du délit d’enrichissement illicite : il est constitué à travers un détournement de procédure : l’incapacité à justifier l’origine licite de ses biens ou de son train de vie au bout d’un délai d’un mois à la suite d’une mise en demeure du procureur spécial, etc.
La deuxième mise en demeure servie à Karim Wade pour le maintenir en prison après l’épuisement du délai de détention préventive de 6 mois est illégale ; la découverte d’un supposé nouvel élément de patrimoine ne saurait en être le fondement, en raison du principe de l’unicité du patrimoine. Le groupe consultatif des Nations-Unies contre la détention arbitraire en son avis du 20 avril 2015 considère comme arbitraire la privation de liberté de Karim Wade et a demandé au Gouvernement du Sénégal de prendre les mesures nécessaires pour remédier à la situation et la rendre conforme aux normes internationales des droits de l’homme.
Les procédures initiées par l’État du Sénégal au niveau international pour la plupart n’ont pas prospéré, car la CREI viole allègrement les droits des mis en cause. Finalement, la traque détraquée des biens mal acquis semble avoir été un plan de règlement de comptes politiques et de construction hégémonique plutôt que l’expression d’une réelle volonté de lutter contre la corruption, ce fléau qui gangrène le développement. La traque a plutôt été un moyen cynique de démanteler le Parti démocratique sénégalais (Pds) et de susciter un vaste mouvement de transhumance vers la nouvelle majorité présidentielle.
Dans l’affaire Khalifa Sall, la Cour de justice de la CEDEAO a condamné l’État du Sénégal pour les nombreuses violations des droits des supposés infracteurs. En effet, dans son arrêt n° ECW/CCJ/JUD/17/18 du 29 juin 2018, Khalifa Ababacar Sall et autres contre État du Sénégal, la Cour de justice de la CEDEAO décide en ces termes : « Dit que le droit à l’assistance d’un conseil, le droit à la présomption d’innocence et le droit à un procès équitable des requérants ont été violés ; Dit également, que la détention, de Monsieur Khalifa Ababacar Sall, entre la date de la proclamation des résultats de l’élection législative par le Conseil constitutionnel, c’est-à-dire le 14 août 2017, et celle de la levée de son immunité parlementaire, à savoir le 25 novembre 2017, est arbitraire ; Dit que la responsabilité de l’État du Sénégal, par le truchement des autorités policières et judiciaires est engagée ; Condamne le défendeur [l’État du Sénégal] à payer aux requérants la somme de 35. 000. 000 francs CFA à titre de réparation (…) ».
À préciser que les déboires de Khalifa Sall résultent d’actes politiques de démarcation de la coalition Benno Bokk Yaakaar : victoire de la liste Taxawu Dakar qu’il a dirigée aux élections locales de 2014 ; appel à voter « NON » au référendum du 20 mars 2016 ; et velléités de participer aux élections législatives du 30 juillet 2017 sous sa propre bannière. Il y a ensuite la progression très rapide de son dossier judiciaire qui a franchi toutes les étapes de la procédure en un temps record : première instance, appel et cassation, pour que sa candidature à l’élection présidentielle de 2019 soit rejetée. Si on ajoute à cela l’imposition du parrainage pour éliminer l’essentiel des candidats à la Présidentielle de 2019, pour n’en retenir que 5, d’une manière qui n’est pas transparente ; car ceux qui ont été exclus ne savent pas sur quelle base ils l’ont été ; ils n’ont eu aucune possibilité de vérification parce qu’ils ne détenaient pas le fichier électoral.
Tout cela pour dire quoi ?
Tout cela permet de conforter l’idée selon laquelle le droit et les institutions sont manipulés à outrance à des fins de conservation du pouvoir. Si en plus de cela, un autre opposant bien positionné pour l’élection présidentielle de 2024 fait face à une autre affaire politico-judiciaire, cela jette le trouble dans l’esprit de beaucoup de Sénégalais.
À cela s’ajoute que le Président Sall a atteint son seuil de tolérance aux pratiques autoritaires, lesquelles dans l’évolution du système politique sénégalais, depuis la crise du 17 décembre 1962, est de 8 ans environ. Après quoi, les citoyens et les forces sociopolitiques se mobilisent, au-delà de l’opposition, pour une évolution vers des réformes démocratiques pouvant mener à une alternance.
Le Président Senghor a construit un pouvoir fort à partir de 1963 mais il est obligé après 8 ans, en 1970, après donc la crise de 1968, de revenir au poste de Premier ministre et d’ouvrir le jeu démocratique à travers le multipartisme limité à partir de 1974 et qui culmine à quatre partis en 1978 : l’UPS (Union progressiste sénégalaise) de Senghor, le PDS (Parti démocratique sénégalais) de Me Wade, le PAI (Parti africain de l’indépendance) de Majemouth Diop, et le Parti conservateur de Me Boubacar Guèye.
Le Président Diouf arrive au pouvoir en 1981 et environ 8 ans plus tard en 1988, son régime est secoué par une grave crise qui l’amène à des réformes profondes : Gouvernement de majorité présidentielle élargie en 1991 ; code électorale consensuel en 1992 ; création du Haut conseil de la radio-télévision en 1991 ; réforme judiciaire avec l’éclatement de la Cour suprême en 3 juridictions : Conseil constitutionnel, Conseil d’État et Cour de cassation en 1992 ; création de l’ONEL (Observatoire national des élections) en 1997 ; nomination d’un Général au ministère de l’Intérieur pour garantir la neutralité de l’administration jusqu’à l’alternance de 2000.
Pour le Président Wade, la construction hégémonique de son pouvoir dure environ 8 ans également : de 2000 à 2008, après quoi l’opposition suite aux nombreuses dérives oppressives, répressives et corruptives du Président Wade, boycotte les élections législatives de juin 2007 et lance les Assises nationales, se réorganise à travers le Front Siggil Senegaal qui devient Benno Siggil Senegaal et gagne les grandes villes en 2009, et mène le combat jusqu’à l’alternance en 2012.
Le Président Sall également a atteint ce point culminant des 8 ans environ de construction hégémonique : 2012-2020, avec ses pratiques autoritaires ; les événements de mars 2021 vont constituer une des crises les plus graves de l’histoire politique du Sénégal. C’est pourquoi persister dans la perpétration d’actes autocratiques au-delà de ce seuil de 8 ans, peut déboucher sur une crise politique dont les conséquences peuvent être dramatiques. Si un opposant de tout premier plan de la dimension de Ousmane Sonko est encore éliminé de la course par une affaire politico-judiciaire, le même sort ayant été subi par Karim Wade et Khalifa Ababacar Sall, en plus de la volonté du Président Sall de poser une troisième candidature illégale au regard de la Constitution qui dispose en son article 27 : « Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs », c’est alors une situation de tous les dangers qui menace la paix et la stabilité du pays. Pourtant, on voit le régime maintenir la pression sur les militants de Pastef qui font objet d’arrestations tous azimuts. La paix est aux États ce que la santé est aux individus. Sans elle, on ne peut rien faire. Mais la paix repose sur la justice. La justice repose sur le respect scrupuleux des droits et libertés des citoyens ; et il est illusoire de penser que la répression peut être un mode de gestion du pouvoir pour compenser un déficit ou un défaut de légitimité, ou pour imposer des forfaitures contre la légalité. À cet effet, Jean-Jacques Rousseau rappelle à bon escient : « Le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître, s’il ne transforme sa force en droit, et l’obéissance en devoir ». Car comme en rajoute Tallerand : « On peut tout faire avec des baïonnettes sauf s’asseoir dessus ».
Après le grand format accordé au leader de Pastef par France 24 et RFI, Le Figaro a publié un article à charge contre le régime en place sur le TER. Que vous inspirent ces sorties surtout dans le contexte actuel de débat sur la prochaine présidentielle ?
Pour le TER (Train Express Régional), il faut préciser qu’il appartient bel et bien au Sénégal mais que l’exploitation est confiée à une entreprise française, la SNCF (Société nationale des chemins de fer). Au demeurant, cette ouverture des médias français internationaux France 24 et RFI à Ousmane Sonko peut être interprétée comme une volonté de la France de s’ajuster et de s’adapter par rapport à la nouvelle donne politique au Sénégal, en vue de préserver ses intérêts. Car il y a un sentiment anti-français véhiculé par des organisations comme le Front pour une révolution anti-impérialiste, populaire et panafricaine (FRAPP)-France dégage, proche d’Ousmane Sonko, qui lui-même est clair dans ses options nationalistes ; et si la France prend fait et cause pour le régime du Président Sall, elle court le risque en cas de basculement de majorité et un changement de régime d’avoir des gouvernants qui tirent en partie leur légitimité de leur opposition à la France. Vu les intérêts économiques de la France au Sénégal, vu les liens historiques et politiques qu’il y a entre les deux pays, la France ne semble pas vouloir prendre un tel risque.
En plus, le Sénégal a toujours joué un rôle d’avant-garde par rapport à la démocratie en Afrique. Cette posture de pionnier du Sénégal trouve ses racines profondes dans l’histoire. En effet, c’est en 1848 que le Sénégal est représenté au palais Bourbon, en élisant un député. L’élection de Blaise Diagne en 1914 marque une étape décisive dans la prise de conscience de l’électorat noir, car jusque-là, seuls les blancs et les métis étaient élus à la députation.
Le Sénégal a fait également l’expérience des communes de plein exercice, dont le fonctionnement est basé comme en métropole, sur le choix électoral et la gestion libre des affaires locales. Il s’agit de Saint-Louis et Gorée instituées le 10 août 1872 ; de Rufisque, le 12 juin 1880 ; de Dakar, le 17 juin 1887. Mais il faut préciser également que la démocratie sénégalaise a aussi et surtout des racines précoloniales : à travers les assemblées élues qui limitaient le pouvoir du roi dans les monarchies traditionnelles ; à travers le sacré comme moyen de neutraliser les possibles nuisances politiques ; à travers des figures emblématiques de la contestation comme Kocc Barma Fall ; à travers les principes de bonne gouvernance et de lutte contre les abus de pouvoir et contre l’arbitraire et la promotion du mérite, énoncés par Thierno Souleymane Baal en 1776, suite à la Révolution Toorodo ; à travers la République parlementaire Lébou fondée en 1812 à Dakar, après une lutte d’indépendance envers le royaume du Cayor à partir de 1790. En définitive, la France est en train de se repositionner par rapport à la réallocation des forces politiques, afin de préserver ses intérêts économiques ; mais également pour préserver l’intérêt symbolique que représente la démocratie sénégalaise dont les bases remontent à l’époque précoloniale, mais qui a connu pendant la période coloniale une trajectoire singulière à nulle autre pareille en Afrique.
Est-ce à dire que la France est en train de préparer l’après Macky Sall ?
La France cherche à préserver au mieux ses intérêts en cas de changement de régime. La politique étrangère de la France en Afrique a toujours été empreinte de réalisme. Il y a toujours eu des relations assez particulières entre la France et ses anciennes colonies ; relations teintées de clientélisme, d’échanges de services, de manigances subversives et coercitives pour éliminer des régimes contredisant les intérêts français, de connivences corruptives entre élites françaises et africaines dans le financement occulte d’activités politiques en France en échange d’un soutien aux gouvernants africains. Tout cela est condensé dans l’expression la « Françafrique… La France a toujours lâché ou écarté ses alliés gênants, lorsque ses intérêts l’ont exigé. On peut citer comme exemples l’opération Caban et l’opération Barracuda initiées en 1979 par la France pour destituer l’« empereur Bokassa 1er », lorsque l’affaire des diamants de Centrafrique ébruitée par Pierre Péan dans le Canard Enchaîné a éclaboussé le Président Valéry Giscard d’Estaing. L’« empereur Bokassa 1er » qui pensait que le Président Giscard était son ami en a été très surpris, après toutes les largesses qu’il lui avait faites. Lorsque le Président Wade a voulu obtenir un troisième mandat en 2012, il a soutenu en 2011 l’initiative de guerre du Président Sarkozy en Libye ; escorté par les avions de chasse français, il est allé à Benghazi parler à Kadhafi sur le petit écran, afin d’obtenir éventuellement un soutien ou la neutralité bienveillante de l’ancienne puissance coloniale. Finalement, le Président Wade n’a pas été soutenu par la France dans son projet de troisième mandat, fortement rejeté par le peuple sénégalais. Fort probablement, vu le rôle politique et symbolique prépondérant du Sénégal en Afrique en matière de démocratie, la France, mais au-delà d’elle, la plupart des puissances occidentales, ne cautionneront pas une éventuelle troisième candidature du Président Sall, en violation flagrante de la Constitution qui dispose clairement en son article 27 alinéa 2 : « Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ». Cette transgression de la loi fondamentale risque de soulever des tensions dans le pays, comme en 2012, concernant le Président Wade, avec un bilan d’une dizaine de morts. C’est à cause de cette situation vécue en 2012 que la réforme de 2016, qui n’est pas une nouvelle Constitution, a entendu confirmer et verrouiller davantage la limitation des mandats à deux posée par la Constitution du 22 janvier 2001, et sur la base de laquelle le Président Sall a été élu en 2012.
De l’avis des partisans du pouvoir, c’est cette réforme de 2016 qui autorise leur leader à briguer un deuxième quinquennat.
En fait, la réforme de 2016 a porté sur la réduction de la durée du mandat, mais non sur la limitation du nombre de mandats consécutifs pouvant être exercés, qui est fixé à deux depuis 2001. Il n’y a donc pas, en l’espèce, sur la limitation à deux du nombre de mandats, un conflit de lois dans le temps. Parce que la loi nouvelle ne contredit pas la loi ancienne. En effet, la durée du mandat ramenée de 7 ans à 5 ans par la réforme de 2016 ne pouvait pas s’appliquer au mandat en cours du Président Sall acquis en 2012, parce qu’en cette situation, la loi nouvelle dispose pour l’avenir. Mais, la limitation des mandats à deux, établie depuis 2001, n’a pas été changée par la réforme de 2016, qui l’a réaffirmée plus fermement en ces termes : « Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ». Or, un mandat est une habilitation à représenter, parler et agir au nom et pour le compte du peuple pour un temps, qui est variable : 4 ans aux États-Unis ; 4 ans au Brésil ; 5 ans en France ; 7 ans en République démocratique du Congo. Donc, un mandat de 4 ans est un mandat, un mandat de 5 ans est un mandat, un mandat de 7 ans est un mandat. Lorsque la Constitution dispose en son article 27 alinéa 2 : « Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ». C’est très clair. Il suffit de remplacer le pronom impersonnel nul, par la personne concernée par la situation juridique en question, cela donne : « Macky Sall ne peut pas exercer plus de deux mandats consécutifs ». Personne ne peut nier que c’est le Président Macky Sall qui a exercé le premier mandat de 2012 à 2019 ; et personne ne peut contester également que c’est le Président Macky Sall qui exerce le second mandat en cours depuis 2019, et qui se termine en 2024. Personne ne peut soutenir également que les deux mandats : 2012-2019 et 2019-2024 ne sont pas consécutifs, c’est-à-dire qu’ils entretiennent une relation de succession immédiate. Autrement dit, aucun autre mandat, ni même quelque autre temps, ne peut être intercalé entre les deux, sauf à pouvoir déplacer les années dans le temps, ce qui relève d’une impossibilité absolue.
Depuis quelques temps, l’espace politique sénégalais est fortement perturbé par une escalade de violence verbale autour du procès de Sonko et de la 3e candidature du Président Macky Sall. A qui profite cette situation ?
C’est une situation qui ne profite à personne car elle porte gravement atteinte à l’image du Sénégal et menace la paix et la stabilité du pays. Cette confrontation entre pouvoir et opposition est en porte à faux avec les principes et valeurs démocratiques, mais également avec les valeurs sénégalaises de tolérance, de dialogue et de négociation, dans l’intérêt du pays. En effet, cette situation contredit les principes démocratiques : la démocratie sénégalaise semble déréglée, au triple sens de règlement, régulation et réglage. La compétition politique qui doit être ouverte, inclusive et transparente est aujourd’hui compromise, marquée par l’exclusion de Karim Wade et de Khalifa Ababacar Sall à la suite d’affaires politico-judiciaires, et par le mécanisme de sélection par le parrainage, illégal au regard de la décision n° ECW/CCJ/JUD/10/21 de la Cour de justice de la CEDEAO en date du 28 avril 2021, considérant que ce procédé viole le principe de la libre participation aux élections. La Cour avait donné à l’État du Sénégal un délai de 6 mois pour exécuter la décision, à compter de sa notification, mais l’État du Sénégal tarde à appliquer cette décision.
Que vous inspire cette situation d’escalade de la violence verbale entre pouvoir et opposition ?
La démocratie qui doit reposer sur le débat autour des programmes et projets de société, est ravalée de manière caricaturale à des injures, insanités, calomnies et surenchères de menaces. La relation entre pouvoir et opposition est fondée sur la persécution de cette dernière ; alors que l’opposition est un rouage essentiel dans le fonctionnement du jeu démocratique. Car la démocratie n’est pas un jeu à somme nulle où il est question de vie et de mort, dans le registre de l’inimitié ; il s’agit plutôt de perdre une élection et de se préparer pour en gagner une autre, ou de gagner une élection en étant conscient qu’on peut perdre la prochaine, dans le cadre de règles équitables et transparentes, acceptables et acceptées par les différents acteurs, dans le registre de l’adversité.
A votre avis, qu’est-ce qui peut expliquer cette situation de méfiance entre pouvoir et opposition ?
En effet, il y a déjà eu deux affaires politico-judiciaires qui ont présenté beaucoup d’entorses et de violations des droits des mis en cause, notamment Karim Wade et Khalifa Sall. Dès lors, une troisième affaire politico-judiciaire risque d’asseoir davantage l’idée d’une instrumentalisation de la justice à des fins politiques.
En effet concernant Karim Wade, il a été jugé par une juridiction d’exception, la CREI (Cour de répression de l’enrichissement illicite), réactivé en 2012 après presque 30 ans de léthargie, et qui pose beaucoup de problèmes par rapport aux principes qui garantissent un procès équitable : renversement de la charge de la preuve ; rupture d’égalité entre le procureur spécial partie au procès qui seul peut faire appel mais l’accusé, lui, ne peut pas interjeter appel ; absence de définition précise du délit d’enrichissement illicite : il est constitué à travers un détournement de procédure : l’incapacité à justifier l’origine licite de ses biens ou de son train de vie au bout d’un délai d’un mois à la suite d’une mise en demeure du procureur spécial, etc.
La deuxième mise en demeure servie à Karim Wade pour le maintenir en prison après l’épuisement du délai de détention préventive de 6 mois est illégale ; la découverte d’un supposé nouvel élément de patrimoine ne saurait en être le fondement, en raison du principe de l’unicité du patrimoine. Le groupe consultatif des Nations-Unies contre la détention arbitraire en son avis du 20 avril 2015 considère comme arbitraire la privation de liberté de Karim Wade et a demandé au Gouvernement du Sénégal de prendre les mesures nécessaires pour remédier à la situation et la rendre conforme aux normes internationales des droits de l’homme.
Les procédures initiées par l’État du Sénégal au niveau international pour la plupart n’ont pas prospéré, car la CREI viole allègrement les droits des mis en cause. Finalement, la traque détraquée des biens mal acquis semble avoir été un plan de règlement de comptes politiques et de construction hégémonique plutôt que l’expression d’une réelle volonté de lutter contre la corruption, ce fléau qui gangrène le développement. La traque a plutôt été un moyen cynique de démanteler le Parti démocratique sénégalais (Pds) et de susciter un vaste mouvement de transhumance vers la nouvelle majorité présidentielle.
Dans l’affaire Khalifa Sall, la Cour de justice de la CEDEAO a condamné l’État du Sénégal pour les nombreuses violations des droits des supposés infracteurs. En effet, dans son arrêt n° ECW/CCJ/JUD/17/18 du 29 juin 2018, Khalifa Ababacar Sall et autres contre État du Sénégal, la Cour de justice de la CEDEAO décide en ces termes : « Dit que le droit à l’assistance d’un conseil, le droit à la présomption d’innocence et le droit à un procès équitable des requérants ont été violés ; Dit également, que la détention, de Monsieur Khalifa Ababacar Sall, entre la date de la proclamation des résultats de l’élection législative par le Conseil constitutionnel, c’est-à-dire le 14 août 2017, et celle de la levée de son immunité parlementaire, à savoir le 25 novembre 2017, est arbitraire ; Dit que la responsabilité de l’État du Sénégal, par le truchement des autorités policières et judiciaires est engagée ; Condamne le défendeur [l’État du Sénégal] à payer aux requérants la somme de 35. 000. 000 francs CFA à titre de réparation (…) ».
À préciser que les déboires de Khalifa Sall résultent d’actes politiques de démarcation de la coalition Benno Bokk Yaakaar : victoire de la liste Taxawu Dakar qu’il a dirigée aux élections locales de 2014 ; appel à voter « NON » au référendum du 20 mars 2016 ; et velléités de participer aux élections législatives du 30 juillet 2017 sous sa propre bannière. Il y a ensuite la progression très rapide de son dossier judiciaire qui a franchi toutes les étapes de la procédure en un temps record : première instance, appel et cassation, pour que sa candidature à l’élection présidentielle de 2019 soit rejetée. Si on ajoute à cela l’imposition du parrainage pour éliminer l’essentiel des candidats à la Présidentielle de 2019, pour n’en retenir que 5, d’une manière qui n’est pas transparente ; car ceux qui ont été exclus ne savent pas sur quelle base ils l’ont été ; ils n’ont eu aucune possibilité de vérification parce qu’ils ne détenaient pas le fichier électoral.
Tout cela pour dire quoi ?
Tout cela permet de conforter l’idée selon laquelle le droit et les institutions sont manipulés à outrance à des fins de conservation du pouvoir. Si en plus de cela, un autre opposant bien positionné pour l’élection présidentielle de 2024 fait face à une autre affaire politico-judiciaire, cela jette le trouble dans l’esprit de beaucoup de Sénégalais.
À cela s’ajoute que le Président Sall a atteint son seuil de tolérance aux pratiques autoritaires, lesquelles dans l’évolution du système politique sénégalais, depuis la crise du 17 décembre 1962, est de 8 ans environ. Après quoi, les citoyens et les forces sociopolitiques se mobilisent, au-delà de l’opposition, pour une évolution vers des réformes démocratiques pouvant mener à une alternance.
Le Président Senghor a construit un pouvoir fort à partir de 1963 mais il est obligé après 8 ans, en 1970, après donc la crise de 1968, de revenir au poste de Premier ministre et d’ouvrir le jeu démocratique à travers le multipartisme limité à partir de 1974 et qui culmine à quatre partis en 1978 : l’UPS (Union progressiste sénégalaise) de Senghor, le PDS (Parti démocratique sénégalais) de Me Wade, le PAI (Parti africain de l’indépendance) de Majemouth Diop, et le Parti conservateur de Me Boubacar Guèye.
Le Président Diouf arrive au pouvoir en 1981 et environ 8 ans plus tard en 1988, son régime est secoué par une grave crise qui l’amène à des réformes profondes : Gouvernement de majorité présidentielle élargie en 1991 ; code électorale consensuel en 1992 ; création du Haut conseil de la radio-télévision en 1991 ; réforme judiciaire avec l’éclatement de la Cour suprême en 3 juridictions : Conseil constitutionnel, Conseil d’État et Cour de cassation en 1992 ; création de l’ONEL (Observatoire national des élections) en 1997 ; nomination d’un Général au ministère de l’Intérieur pour garantir la neutralité de l’administration jusqu’à l’alternance de 2000.
Pour le Président Wade, la construction hégémonique de son pouvoir dure environ 8 ans également : de 2000 à 2008, après quoi l’opposition suite aux nombreuses dérives oppressives, répressives et corruptives du Président Wade, boycotte les élections législatives de juin 2007 et lance les Assises nationales, se réorganise à travers le Front Siggil Senegaal qui devient Benno Siggil Senegaal et gagne les grandes villes en 2009, et mène le combat jusqu’à l’alternance en 2012.
Le Président Sall également a atteint ce point culminant des 8 ans environ de construction hégémonique : 2012-2020, avec ses pratiques autoritaires ; les événements de mars 2021 vont constituer une des crises les plus graves de l’histoire politique du Sénégal. C’est pourquoi persister dans la perpétration d’actes autocratiques au-delà de ce seuil de 8 ans, peut déboucher sur une crise politique dont les conséquences peuvent être dramatiques. Si un opposant de tout premier plan de la dimension de Ousmane Sonko est encore éliminé de la course par une affaire politico-judiciaire, le même sort ayant été subi par Karim Wade et Khalifa Ababacar Sall, en plus de la volonté du Président Sall de poser une troisième candidature illégale au regard de la Constitution qui dispose en son article 27 : « Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs », c’est alors une situation de tous les dangers qui menace la paix et la stabilité du pays. Pourtant, on voit le régime maintenir la pression sur les militants de Pastef qui font objet d’arrestations tous azimuts. La paix est aux États ce que la santé est aux individus. Sans elle, on ne peut rien faire. Mais la paix repose sur la justice. La justice repose sur le respect scrupuleux des droits et libertés des citoyens ; et il est illusoire de penser que la répression peut être un mode de gestion du pouvoir pour compenser un déficit ou un défaut de légitimité, ou pour imposer des forfaitures contre la légalité. À cet effet, Jean-Jacques Rousseau rappelle à bon escient : « Le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître, s’il ne transforme sa force en droit, et l’obéissance en devoir ». Car comme en rajoute Tallerand : « On peut tout faire avec des baïonnettes sauf s’asseoir dessus ».
Après le grand format accordé au leader de Pastef par France 24 et RFI, Le Figaro a publié un article à charge contre le régime en place sur le TER. Que vous inspirent ces sorties surtout dans le contexte actuel de débat sur la prochaine présidentielle ?
Pour le TER (Train Express Régional), il faut préciser qu’il appartient bel et bien au Sénégal mais que l’exploitation est confiée à une entreprise française, la SNCF (Société nationale des chemins de fer). Au demeurant, cette ouverture des médias français internationaux France 24 et RFI à Ousmane Sonko peut être interprétée comme une volonté de la France de s’ajuster et de s’adapter par rapport à la nouvelle donne politique au Sénégal, en vue de préserver ses intérêts. Car il y a un sentiment anti-français véhiculé par des organisations comme le Front pour une révolution anti-impérialiste, populaire et panafricaine (FRAPP)-France dégage, proche d’Ousmane Sonko, qui lui-même est clair dans ses options nationalistes ; et si la France prend fait et cause pour le régime du Président Sall, elle court le risque en cas de basculement de majorité et un changement de régime d’avoir des gouvernants qui tirent en partie leur légitimité de leur opposition à la France. Vu les intérêts économiques de la France au Sénégal, vu les liens historiques et politiques qu’il y a entre les deux pays, la France ne semble pas vouloir prendre un tel risque.
En plus, le Sénégal a toujours joué un rôle d’avant-garde par rapport à la démocratie en Afrique. Cette posture de pionnier du Sénégal trouve ses racines profondes dans l’histoire. En effet, c’est en 1848 que le Sénégal est représenté au palais Bourbon, en élisant un député. L’élection de Blaise Diagne en 1914 marque une étape décisive dans la prise de conscience de l’électorat noir, car jusque-là, seuls les blancs et les métis étaient élus à la députation.
Le Sénégal a fait également l’expérience des communes de plein exercice, dont le fonctionnement est basé comme en métropole, sur le choix électoral et la gestion libre des affaires locales. Il s’agit de Saint-Louis et Gorée instituées le 10 août 1872 ; de Rufisque, le 12 juin 1880 ; de Dakar, le 17 juin 1887. Mais il faut préciser également que la démocratie sénégalaise a aussi et surtout des racines précoloniales : à travers les assemblées élues qui limitaient le pouvoir du roi dans les monarchies traditionnelles ; à travers le sacré comme moyen de neutraliser les possibles nuisances politiques ; à travers des figures emblématiques de la contestation comme Kocc Barma Fall ; à travers les principes de bonne gouvernance et de lutte contre les abus de pouvoir et contre l’arbitraire et la promotion du mérite, énoncés par Thierno Souleymane Baal en 1776, suite à la Révolution Toorodo ; à travers la République parlementaire Lébou fondée en 1812 à Dakar, après une lutte d’indépendance envers le royaume du Cayor à partir de 1790. En définitive, la France est en train de se repositionner par rapport à la réallocation des forces politiques, afin de préserver ses intérêts économiques ; mais également pour préserver l’intérêt symbolique que représente la démocratie sénégalaise dont les bases remontent à l’époque précoloniale, mais qui a connu pendant la période coloniale une trajectoire singulière à nulle autre pareille en Afrique.
Est-ce à dire que la France est en train de préparer l’après Macky Sall ?
La France cherche à préserver au mieux ses intérêts en cas de changement de régime. La politique étrangère de la France en Afrique a toujours été empreinte de réalisme. Il y a toujours eu des relations assez particulières entre la France et ses anciennes colonies ; relations teintées de clientélisme, d’échanges de services, de manigances subversives et coercitives pour éliminer des régimes contredisant les intérêts français, de connivences corruptives entre élites françaises et africaines dans le financement occulte d’activités politiques en France en échange d’un soutien aux gouvernants africains. Tout cela est condensé dans l’expression la « Françafrique… La France a toujours lâché ou écarté ses alliés gênants, lorsque ses intérêts l’ont exigé. On peut citer comme exemples l’opération Caban et l’opération Barracuda initiées en 1979 par la France pour destituer l’« empereur Bokassa 1er », lorsque l’affaire des diamants de Centrafrique ébruitée par Pierre Péan dans le Canard Enchaîné a éclaboussé le Président Valéry Giscard d’Estaing. L’« empereur Bokassa 1er » qui pensait que le Président Giscard était son ami en a été très surpris, après toutes les largesses qu’il lui avait faites. Lorsque le Président Wade a voulu obtenir un troisième mandat en 2012, il a soutenu en 2011 l’initiative de guerre du Président Sarkozy en Libye ; escorté par les avions de chasse français, il est allé à Benghazi parler à Kadhafi sur le petit écran, afin d’obtenir éventuellement un soutien ou la neutralité bienveillante de l’ancienne puissance coloniale. Finalement, le Président Wade n’a pas été soutenu par la France dans son projet de troisième mandat, fortement rejeté par le peuple sénégalais. Fort probablement, vu le rôle politique et symbolique prépondérant du Sénégal en Afrique en matière de démocratie, la France, mais au-delà d’elle, la plupart des puissances occidentales, ne cautionneront pas une éventuelle troisième candidature du Président Sall, en violation flagrante de la Constitution qui dispose clairement en son article 27 alinéa 2 : « Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ». Cette transgression de la loi fondamentale risque de soulever des tensions dans le pays, comme en 2012, concernant le Président Wade, avec un bilan d’une dizaine de morts. C’est à cause de cette situation vécue en 2012 que la réforme de 2016, qui n’est pas une nouvelle Constitution, a entendu confirmer et verrouiller davantage la limitation des mandats à deux posée par la Constitution du 22 janvier 2001, et sur la base de laquelle le Président Sall a été élu en 2012.
De l’avis des partisans du pouvoir, c’est cette réforme de 2016 qui autorise leur leader à briguer un deuxième quinquennat.
En fait, la réforme de 2016 a porté sur la réduction de la durée du mandat, mais non sur la limitation du nombre de mandats consécutifs pouvant être exercés, qui est fixé à deux depuis 2001. Il n’y a donc pas, en l’espèce, sur la limitation à deux du nombre de mandats, un conflit de lois dans le temps. Parce que la loi nouvelle ne contredit pas la loi ancienne. En effet, la durée du mandat ramenée de 7 ans à 5 ans par la réforme de 2016 ne pouvait pas s’appliquer au mandat en cours du Président Sall acquis en 2012, parce qu’en cette situation, la loi nouvelle dispose pour l’avenir. Mais, la limitation des mandats à deux, établie depuis 2001, n’a pas été changée par la réforme de 2016, qui l’a réaffirmée plus fermement en ces termes : « Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ». Or, un mandat est une habilitation à représenter, parler et agir au nom et pour le compte du peuple pour un temps, qui est variable : 4 ans aux États-Unis ; 4 ans au Brésil ; 5 ans en France ; 7 ans en République démocratique du Congo. Donc, un mandat de 4 ans est un mandat, un mandat de 5 ans est un mandat, un mandat de 7 ans est un mandat. Lorsque la Constitution dispose en son article 27 alinéa 2 : « Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ». C’est très clair. Il suffit de remplacer le pronom impersonnel nul, par la personne concernée par la situation juridique en question, cela donne : « Macky Sall ne peut pas exercer plus de deux mandats consécutifs ». Personne ne peut nier que c’est le Président Macky Sall qui a exercé le premier mandat de 2012 à 2019 ; et personne ne peut contester également que c’est le Président Macky Sall qui exerce le second mandat en cours depuis 2019, et qui se termine en 2024. Personne ne peut soutenir également que les deux mandats : 2012-2019 et 2019-2024 ne sont pas consécutifs, c’est-à-dire qu’ils entretiennent une relation de succession immédiate. Autrement dit, aucun autre mandat, ni même quelque autre temps, ne peut être intercalé entre les deux, sauf à pouvoir déplacer les années dans le temps, ce qui relève d’une impossibilité absolue.