A l’âge de 14 ans, il fut consacré cheikh de cette voie et hérita, après la disparition de son père en 1869, de la guidance de la Qâdiriyya Fâdiliyya et de sa propagation dans toute l’Afrique au sud du Sahara.
L’une des principales particularités de Cheikhna Cheikh Saadbouh est qu’il fut un pôle de la sainteté avant l’âge 40 ans et qu’il reçut l’autorisation de délivrer plusieurs wirds ou affiliations mystiques tout en privilégiant son affiliation à l’authentique voie de la Qâdiriyya fâdiliyya.
MEDIATION ET INFLUENCE DANS LE CONTEXTE COLONIAL
La fin des travaux du colloque consacré par l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar à la célébration du centenaire de la disparition du fondateur de Nimjatt, en collaboration avec la famille chérifienne et les disciples de Cheikhna Cheikh Saadbouh chérif, nous offre l’occasion de revisiter l’actualité du message du saint homme dans un monde où les repères sont de plus en plus bousculés par les effets néfastes de la mondialisation sur la conscience universelle.
Aujourd’hui, la mondialisation des capitaux, par la mainmise des multinationales sur les économies locales ainsi que celle des idéologies de la terreur sur les forces vives des hémisphères Nord et Sud, pose de sérieux problèmes pour le développement d’une paix mondiale favorable à l’épanouissement de l’homme dans ses dimensions exotériques et ésotériques.
Quelle perspective nous offre la relecture de l’œuvre socio-politique de Cheikhna Cheikh Saadbouh par rapport à ces différentes problématiques ?
Question légitime s’il en est. Nous devons d’abord rappeler que le cheikh de Nimzat, de par l’époque de sa naissance (année 1848) inaugure une ère nouvelle faite de rupture des chaines de l’esclavage mais également de promotion du développement industriel (révolution industrielle de 1848).
Doté d’une vaste culture scientifique et littéraire (voir traités de médecine et de soufisme entre autres écrits) et fin connaisseur de la géopolitique mondiale et régionale, il entreprit auprès des autorités coloniales françaises de St-Louis du Sénégal une diplomatie à la fois vive, pondérée et réaliste pour la défense des intérêts moraux et économiques de l’espace connu sous le nom actuel de Mauritanie.
Il faut rappeler que déjà, en 1886, il est sollicité par le Gouverneur Delanneau pour une médiation dans le différend qui opposait le Damel(Roi) du Cayor Lat-DIOR au colonisateur sur la question du Chemin de fer.
De même, eu égard à sa grande influence et à son charisme dans le Trarza, il agit dans l’intérêt des populations de cette région malgré son opposition, au début, à la pénétration française, en participant aux pourparlers de St-Louis afin d’aboutir à la préservation desdits intérêts.
Il est de bon sens d’admettre que l’insécurité quasi-générale qui régnait au Trarza nécessitait la présence d’une force pacificatrice (même étrangère), garant de la sécurité des personnes et des biens.
Certes, cette dimension de l’homme public exerçant une médiation active sur le terrain politico-social n’est pas une exception historique (voir Jilali al Adnâni sur le rôle de l’historien marocain Ahmed Nâciri qui n’a pas hésité de taxer de folie toute entreprise de jihad contre les chrétiens.)
Ailleurs, en zone soudanaise, El Hadji Malick SY intervint auprès des autorités coloniales pour le retour en terre sénégalaise de Abdoulaye NIASSE, exilé en Gambie, suite à ses démêlés avec ces dernières. Ainsi, il put s’établir à Kaolack où il poursuivit ses activités religieuses.
On peut affirmer que, Cheikhna Cheikh Saadbouh, l’auteur d’ « An Nassîha » qui fut publiée en 1906 et imprimée en 1000 exemplaires au Maroc, marqua son époque par sa vaste érudition dans les sciences islamiques et son engagement sans faille pour la paix entre les peuples.
En effet, le respect de la liberté de culte consacré par les lois françaises instituant la laïcité ( la liberté de culte protégée par la loi du 09/12/1905) ainsi que l’existence de tribunaux musulmans institués par les français constituent un canevas plus favorable aux musulmans que la situation de quasi guerre civile qui régnait dans le TRARZA(luttes de pouvoir, pillage et rapines dont étaient victimes les populations civiles et les tribus maraboutiques de cette contrée.)
Celui qui fut surnommé « le Cheikh des deux rives » par Rahal BOUBRIK (Directeur du centre des études sahariennes-Université Mohamed V-Rabat)est considéré comme un visionnaire puisque sa position par rapport au jihad peut aujourd’hui inspirer de nombreux peuples ou Etats musulmans pour faire face à la spirale jihadiste nourrie par des cercles dits « fondamentalistes » et exécutée par des mouvements tels que Daech, Boko Haram ou talibans.
En outre, l’autre dimension du cheikh qu’il nous plait de souligner est celle de grand humaniste pour avoir sauvé Paul SOLEILLET, un passionné de géographie et d’exploration , des mains des tribus guerrières du Sahara mais également pour avoir, grâce à son influence, délivré, recueilli et soigné , dans sa casba de l’INCHIRI, pendant une semaine, Léon Fabert, un soldat français au service de la cause colonialiste. Et cela malgré l’effervescence politique de l’époque et le fait que ce dernier appartenait à une nation ennemie.
Là encore, l’influence grandiose du cheikh et ses dons de médiateur politique et social se manifestèrent efficacement au service de l’humain. Mais l’action du cheikh ne se limitait pas seulement aux régions contiguës aux deux rives du fleuve Sénégal : dans l’affaire du chemin de fer comme dans le Rip,il fut sollicité pour entreprendre une médiation en faveur de la paix notamment avec les troubles survenus avec l’implication des partisans de Biram CISSE.
En définitive, on peut dire que dans la période contemporaine, le rôle de médiateur des élites religieuses se confirma avec l’intervention de personnalités religieuses, à l’image de celle du guide de la confrérie des tidianes du Sénégal Cheikh Abdoul Aziz Dabbagh en l’occurrence, lors des crises scolaires , universitaires et politiques des années 1980 sous le régime du président DIOUF.
Cette médiation permit d’adoucir ou de régler les différentes crises de l’époque en faveur de la paix sociale ou du dialogue politique fécond entre le pouvoir et l’opposition.
En ce sens, on peut affirmer, en définitive, que le Cheikh de Nimzat est le principal précurseur de l’immixtion des élites religieuses pour le règlement des conflits ou des crises socio-politiques : le mot islam n’est –il pas dérivé du mot « salam »qui signifie « la paix », préalable à l’épanouissement de l’homme dans ses multiples dimensions.
Cheikh Talibouya NIANG
Talibouya009@gmail.com
L’une des principales particularités de Cheikhna Cheikh Saadbouh est qu’il fut un pôle de la sainteté avant l’âge 40 ans et qu’il reçut l’autorisation de délivrer plusieurs wirds ou affiliations mystiques tout en privilégiant son affiliation à l’authentique voie de la Qâdiriyya fâdiliyya.
MEDIATION ET INFLUENCE DANS LE CONTEXTE COLONIAL
La fin des travaux du colloque consacré par l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar à la célébration du centenaire de la disparition du fondateur de Nimjatt, en collaboration avec la famille chérifienne et les disciples de Cheikhna Cheikh Saadbouh chérif, nous offre l’occasion de revisiter l’actualité du message du saint homme dans un monde où les repères sont de plus en plus bousculés par les effets néfastes de la mondialisation sur la conscience universelle.
Aujourd’hui, la mondialisation des capitaux, par la mainmise des multinationales sur les économies locales ainsi que celle des idéologies de la terreur sur les forces vives des hémisphères Nord et Sud, pose de sérieux problèmes pour le développement d’une paix mondiale favorable à l’épanouissement de l’homme dans ses dimensions exotériques et ésotériques.
Quelle perspective nous offre la relecture de l’œuvre socio-politique de Cheikhna Cheikh Saadbouh par rapport à ces différentes problématiques ?
Question légitime s’il en est. Nous devons d’abord rappeler que le cheikh de Nimzat, de par l’époque de sa naissance (année 1848) inaugure une ère nouvelle faite de rupture des chaines de l’esclavage mais également de promotion du développement industriel (révolution industrielle de 1848).
Doté d’une vaste culture scientifique et littéraire (voir traités de médecine et de soufisme entre autres écrits) et fin connaisseur de la géopolitique mondiale et régionale, il entreprit auprès des autorités coloniales françaises de St-Louis du Sénégal une diplomatie à la fois vive, pondérée et réaliste pour la défense des intérêts moraux et économiques de l’espace connu sous le nom actuel de Mauritanie.
Il faut rappeler que déjà, en 1886, il est sollicité par le Gouverneur Delanneau pour une médiation dans le différend qui opposait le Damel(Roi) du Cayor Lat-DIOR au colonisateur sur la question du Chemin de fer.
De même, eu égard à sa grande influence et à son charisme dans le Trarza, il agit dans l’intérêt des populations de cette région malgré son opposition, au début, à la pénétration française, en participant aux pourparlers de St-Louis afin d’aboutir à la préservation desdits intérêts.
Il est de bon sens d’admettre que l’insécurité quasi-générale qui régnait au Trarza nécessitait la présence d’une force pacificatrice (même étrangère), garant de la sécurité des personnes et des biens.
Certes, cette dimension de l’homme public exerçant une médiation active sur le terrain politico-social n’est pas une exception historique (voir Jilali al Adnâni sur le rôle de l’historien marocain Ahmed Nâciri qui n’a pas hésité de taxer de folie toute entreprise de jihad contre les chrétiens.)
Ailleurs, en zone soudanaise, El Hadji Malick SY intervint auprès des autorités coloniales pour le retour en terre sénégalaise de Abdoulaye NIASSE, exilé en Gambie, suite à ses démêlés avec ces dernières. Ainsi, il put s’établir à Kaolack où il poursuivit ses activités religieuses.
On peut affirmer que, Cheikhna Cheikh Saadbouh, l’auteur d’ « An Nassîha » qui fut publiée en 1906 et imprimée en 1000 exemplaires au Maroc, marqua son époque par sa vaste érudition dans les sciences islamiques et son engagement sans faille pour la paix entre les peuples.
En effet, le respect de la liberté de culte consacré par les lois françaises instituant la laïcité ( la liberté de culte protégée par la loi du 09/12/1905) ainsi que l’existence de tribunaux musulmans institués par les français constituent un canevas plus favorable aux musulmans que la situation de quasi guerre civile qui régnait dans le TRARZA(luttes de pouvoir, pillage et rapines dont étaient victimes les populations civiles et les tribus maraboutiques de cette contrée.)
Celui qui fut surnommé « le Cheikh des deux rives » par Rahal BOUBRIK (Directeur du centre des études sahariennes-Université Mohamed V-Rabat)est considéré comme un visionnaire puisque sa position par rapport au jihad peut aujourd’hui inspirer de nombreux peuples ou Etats musulmans pour faire face à la spirale jihadiste nourrie par des cercles dits « fondamentalistes » et exécutée par des mouvements tels que Daech, Boko Haram ou talibans.
En outre, l’autre dimension du cheikh qu’il nous plait de souligner est celle de grand humaniste pour avoir sauvé Paul SOLEILLET, un passionné de géographie et d’exploration , des mains des tribus guerrières du Sahara mais également pour avoir, grâce à son influence, délivré, recueilli et soigné , dans sa casba de l’INCHIRI, pendant une semaine, Léon Fabert, un soldat français au service de la cause colonialiste. Et cela malgré l’effervescence politique de l’époque et le fait que ce dernier appartenait à une nation ennemie.
Là encore, l’influence grandiose du cheikh et ses dons de médiateur politique et social se manifestèrent efficacement au service de l’humain. Mais l’action du cheikh ne se limitait pas seulement aux régions contiguës aux deux rives du fleuve Sénégal : dans l’affaire du chemin de fer comme dans le Rip,il fut sollicité pour entreprendre une médiation en faveur de la paix notamment avec les troubles survenus avec l’implication des partisans de Biram CISSE.
En définitive, on peut dire que dans la période contemporaine, le rôle de médiateur des élites religieuses se confirma avec l’intervention de personnalités religieuses, à l’image de celle du guide de la confrérie des tidianes du Sénégal Cheikh Abdoul Aziz Dabbagh en l’occurrence, lors des crises scolaires , universitaires et politiques des années 1980 sous le régime du président DIOUF.
Cette médiation permit d’adoucir ou de régler les différentes crises de l’époque en faveur de la paix sociale ou du dialogue politique fécond entre le pouvoir et l’opposition.
En ce sens, on peut affirmer, en définitive, que le Cheikh de Nimzat est le principal précurseur de l’immixtion des élites religieuses pour le règlement des conflits ou des crises socio-politiques : le mot islam n’est –il pas dérivé du mot « salam »qui signifie « la paix », préalable à l’épanouissement de l’homme dans ses multiples dimensions.
Cheikh Talibouya NIANG
Talibouya009@gmail.com